Aller au contenu principal

Quelles sont les questions que pose l'utilisation du cuivre en viticulture ?

Bien qu’elle soit historique dans les vignes, l’utilisation du cuivre est toujours source de questionnement. Voici le point de vue d’experts sur les principales problématiques, que ce soit en viticulture biologique ou en conventionnelle.

REPARTITION Le cuivre se concentre essentiellement en surfaceLe cuivre migre plus facilement en profondeur sur les sols légers. Le travail du sol profond accentue aussi le phénomène.
© LHyGeS

Avec les progrès de la métrologie et la prise de conscience des problématiques environnementales, le devenir des résidus de traitement est considéré comme une préoccupation majeure. Aujourd’hui, nous savons que le cuivre, fongicide historique et anti-mildiou par excellence, reste en quasi-totalité sur la parcelle. « Quelle que soit la forme, il se fixe en grande partie sur la matière organique, mais aussi sur les argiles », pose Thierry Lebeau, enseignant chercheur à l’université de Nantes. De fait, de nombreuses études ont prouvé que l’on retrouve le cuivre principalement dans le premier horizon du sol, et que sa concentration diminue avec la profondeur. Il faut dire que c’est un élément très peu mobile.

Sachant cela, les viticulteurs peuvent mettre en place certaines actions, afin d’en limiter ses effets. « Un sol riche en matières organiques permet d’augmenter la fixation du métal », illustre Gwenaël Imfeld, chercheur CNRS au Laboratoire d’hydrologie et de géochimie de Strasbourg (LHyGeS). Les terres argileuses et calcaires sont elles aussi très adsorbantes, à l’inverse des limons et des sables. Ces dernières représentent des zones plus vulnérables, où les actions pour éviter la dissémination du cuivre dans l’environnement peuvent être menées en priorité. À commencer par l’enherbement des parcelles, qui limite l’érosion. Car lorsque la terre s’échappe, elle emporte avec elle les éléments métalliques. « Nous avons aussi démontré l’efficacité des bassins de rétentions d’eau, qui favorisent la sédimentation des particules auxquels le cuivre est associé et peuvent ainsi servir de zones tampons humides », ajoute le scientifique. Des bassins qui permettent de diminuer la part de cuivre partant dans les cours d’eaux, mais nécessitent toutefois d’une bonne gestion des sédiments, qui concentrent la pollution.

Cette dynamique du cuivre dans les parcelles de vigne, un consortium d’instituts alsaciens l’étudie en détail à travers le projet Pacov, Plateforme alsacienne du cuivre d’origine viticole. « L’idée est de mesurer précisément les flux d’entrée et de sortie, afin de réaliser un bilan de masse complet », explique Gwenaël Imfeld. Et les premiers résultats donnent à réfléchir. Près de 95 % du cuivre apporté par les vignerons vient s’ajouter aux traitements précédents, soit une accumulation de l’ordre de 10 % par rapport au stock initial sur les trois premiers centimètres. « Entre 1 et 3 % seulement sont exportés de la parcelle, principalement par le ruissellement, ajoute le chercheur. Les pertes verticales par les eaux d’infiltration sont minimes, et ne semblent pas représenter un danger pour les nappes. »

Implanter de l’avoine pour extraire le cuivre

L’assimilation par la vigne est elle aussi très faible. Au final, les scientifiques ont calculé un taux d’accumulation d’environ 1,2 kg de cuivre élémentaire par hectare et par an. Avec le temps, on arrive à des teneurs en cuivre dans les sols viticoles qui avoisinent souvent les 200 mg/kg, et peuvent atteindre 2 000 mg/kg, alors que la moyenne française du fond pédo-géochimique est de 15 mg/kg. « À ces concentrations, ce n’est plus un oligo-élément, c’est un antiseptique », alerte Thierry Lebeau, qui estime que la totalité des sols viticoles peuvent être considérés comme pollués. En effet, les premiers effets visibles sur les micro-organismes du sol apparaissent vers 150 mg/kg, voire moins. « Même si l’on n’observe que très rarement des cas de phytotoxicité, on ne sait pas quelle sera l’évolution à long terme, pointe Gwenaël Imfeld. Vis-à-vis de la qualité des eaux, ce stock important pourrait par ailleurs être partiellement et progressivement relargué, sur le long terme, si le pH ou l’intensité des pluies change fortement, par exemple. » D’où l’importance de travailler dès aujourd’hui sur la réduction des doses de cuivre.

Si la problématique est réelle, il y a toutefois lieu d’être optimiste. Thierry Lebeau travaille actuellement sur un projet de dépollution prometteur : celui de cultiver de l’avoine, plante accumulatrice, pour extraire l’élément, et l’utiliser dans l’alimentation porcine ou bovine pour contrer les carences. Une véritable boucle vertueuse…

Le cuivre représente plutôt une menace sur le long terme.

Association cuivre et mouton : attention !

Et si vous étiez en train d’empoisonner le troupeau au fur et à mesure que vous l’emmenez paître dans vos vignes ? L’idée n’est pas si incongrue, puisqu’il existe dans la littérature des cas d’intoxication de moutons au cuivre par l’eau. Même si l’herbe n’accumule pas fortement le métal, les ovins broutent toujours un peu de terre en même temps. Il est bon de se poser la question, quitte à réaliser quelques analyses et à moduler l’exposition en cas de fort taux de cuivre. Surtout si vous voyez apparaître des symptômes physiologiques (diarrhées…).

Les plus lus

Le Skiterre se compose de deux grands skis qui assurent le contrôle de la profondeur et de la position de la lame.
« Le Skiterre, un outil intercep simple et productif »
Vignerons en Anjou, Nicolas et Christophe Moron se sont équipés d’un outil de travail du sol intercep Skiterre.
Vigneron plantant une nouvelle parcelle avec des pieds de Pinot noir dans la vallee de la Marne en AOC Champagne.Droit de plantation.
Quand FranceAgriMer exaspère les viticulteurs

FranceAgriMer joue un rôle essentiel dans l’attribution des aides. Face aux dossiers chronophages, aux contrôles…

Pellenc - Un robot à chenilles dans les vignes

Pellenc dévoile un robot à chenilles pour les vignes, le RX-20.

Le Dyna-Drive est un outil de travail du sol auto-animé réalisant un mulchage en superficie.
« Le Bomford Dyna-Drive est un outil interrang entre le rolofaca et le rotavator »

Jérôme O’Kelly utilise depuis quatre ans un outil de travail du sol auto-animé.

Chargement d'un camion citerne de la coopérative viticole CRVC (Coopérative régionale des vins de Champagne) enlèvement d'une cuvée chez un vigneron adhérent durant les ...
Vin en vrac acheté à prix abusivement bas : que peut changer la condamnation de deux négociants bordelais

En pleine crise viticole, un jugement se basant en partie sur un article issu de la loi Egalim vient de condamner deux…

Taille de la vigne avec le sécateur électrique viticole sans fil Mage Sam 25, fonctionnant avec batterie au Li-ion, à Mâcon, dans les vignes du Vitilab, en octobre 2022
Lutte contre le gel : « Il faut réserver la taille tardive aux parcelles viticoles les plus gélives et pas trop chétives »

Benjamin Bois, chercheur à l’institut universitaire de la vigne et du vin Jules Guyot, en Bourgogne, a travaillé sur la taille…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 100€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Vigne
Consultez les revues Réussir Vigne au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters des filières viticole et vinicole