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Un élevage de limousines peu chargé associé à du maraîchage

Dans le Finistère, Sébastien Plouzennec s’est installé en 2020. Il engraisse des femelles vendues en bonne partie en direct à des bouchers, et des jeunes bovins performants. Le système fourrager peu chargé lui laisse des options pour se choisir une trajectoire dans les prochaines années.

Sébastien Plouzennec est installé à Pluguffan, dans le sud du Finistère, depuis le 1er mai 2020. Il est depuis cette date chef d’exploitation, et ses parents âgés de 55 ans sont devenus salariés. Cette organisation a l’avantage d’être à la fois souple et sécurisante, pour que la transmission se passe dans les meilleures conditions. « Au départ en retraite de mes parents, j’aurai remboursé entre la moitié et les deux tiers de la reprise de l’exploitation. On verra à ce moment quelle orientation je donnerai au système, entre maraîchage et polyculture élevage », présente le jeune éleveur.

L’exploitation associe en effet les légumes et l’élevage. Toute une gamme de légumes et petits fruits vendus en direct apportent environ un tiers du chiffre d’affaires. Tout le personnel y participe (Sébastien, ses parents et une saisonnière) et cela mobilise l’équivalent de deux unités de main-d’œuvre à l’année. « Cette activité amène de la trésorerie régulièrement. Sur le plan agronomique, c’est intéressant car la parcelle de plein champ est installée chaque année derrière une prairie, ce qui permet de faire moins de traitements et d’apporter moins d’engrais. Et le fumier des bovins est très bien valorisé », explique Sébastien Plouzennec.

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Le troupeau de limousines a été créé en 1990 par ses parents. Les animaux ne sont pas inscrits, mais les éleveurs adhèrent au syndicat de race départemental qui rassemble près de cinquante éleveurs, et s’attachent à travailler dans la précision un troupeau de type mixte viande. « Nous recherchons des vaches bien conformées, avec une bonne production laitière. Nous ne souhaitons pas accentuer la sélection sur les animaux de type élevage, rester à ce niveau de carcasse est bien. Plus le format est grand et plus nous mettrons du temps à bien les finir. Les bouchers commencent également à être réticents à travailler les grosses carcasses, explique Sébastien Plouzennec. Et j’utilise de préférence des taureaux porteurs du gène sans cornes. » Il n’y a pas encore de vache porteuse du gène dans le troupeau, mais un bon quart des veaux naissent déjà sans cornes. C’est un bon début.

Vêlage à trente mois et taux de renouvellement de 40 %

Sébastien Plouzennec a repris 85 vaches, et il a prévu de maintenir l’effectif à ce niveau mais sans aller au-delà. « La charge de travail est déjà bien assez importante comme ça. » Avec un premier vêlage à trente mois, les vêlages sont organisés de mi-janvier à mi-mars, et de fin août à mi-octobre. « Chaque période a ses avantages et ses inconvénients, mais l’intérêt principal pour moi est de répartir le travail entre les vaches et le maraîchage. » Pour faire au plus simple, Sébastien Plouzennec ne fait inséminer que les vaches et génisses qui sont en période de reproduction pendant le mois de novembre. Puis un taureau est utilisé à partir de décembre. « Nous produisons aussi un peu de sapins de Noël, et il faut pouvoir être disponible sur cette période de fêtes de fin d’année. » Les vêlages se passent très bien en général, mais l’année dernière fait exception. « Cela a été une claque, avec près de 14 % de mortalité au final, surtout à la naissance avec ensuite une épidémie d’E. coli. D’habitude, la mortalité est autour de 5 %, voire parfois 2 %. Alors qu’on a nourri et surveillé comme les autres années », réfléchit Sébastien Plouzennec. L’intervalle vêlage-vêlage moyen du troupeau était de 385 jours l’an dernier.

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La ration hivernale des vaches autour du vêlage est un mélange d’enrubannage de prairies et d’ensilage de maïs. Sébastien Plouzennec fait analyser tous les ans une partie des fauches. « J’ai des coupes à 13 % de MAT et d’autres à 22 % de MAT (avec 65 % de trèfles dans la parcelle). Il y a eu des moments où les vaches ne retenaient pas, probablement pour cause d’excès d’azote soluble dans les fourrages donc je fais bien attention à équilibrer les rations. »

Trois mois après le vêlage, les vaches passent à l’enrubannage seul (et paille ou foin) et les veaux sont complémentés. Au printemps, les veaux nés en septembre sont séparés en deux lots. Les femelles sortent directement au pâturage avec leurs mères et sont sevrées en moyenne à huit mois. Elles rentrent fin juin en stabulation et ne ressortent plus de l’année. Quant aux mâles, ils restent en stabulation avec leurs mères, celles-ci sortent seulement au pâturage une semaine après le sevrage. « J’engraisse la plupart en jeunes bovins, mis à part une dizaine de broutards qui sont vendus à l’âge de sept à neuf mois. Ils sont choisis parmi ceux nés en septembre ou octobre, faute de place en bâtiment. Après le sevrage, ils sont complémentés, et sont vendus entre 300 et 350 kilos », explique l’éleveur.

 

Une trentaine de jeunes bovins sont engraissés chaque année. Ils sont vendus entre 17 et 18 mois avec un poids moyen de 513 kgC l’an dernier. Leur ration est à base d’ensilage de maïs, avec un peu de foin de prairies naturelles et un mélange de deux concentrés achetés, et des levures (objectif de croissance : 1500 g/jour).

Sébastien Plouzennec utilise deux aliments du commerce qui conviennent aux différentes catégories d’animaux. L’un est fabriqué à façon (pour 30 euros la tonne) à partir de l’orge produite sur l’exploitation. Riche en énergie il est destiné aux animaux en croissance. Il est livré par petites quantités en fonction des besoins. Sébastien Plouzennec en utilise à peu près 35 tonnes par an. L’autre est un correcteur azoté tout simple formulé à partir de soja.

Engraissement des femelles en deux phases

L’engraissement des génisses et vaches est conduit en deux phases. Une première phase dure environ deux mois, avec une ration composée de 1,7 kg MS d’enrubanné à 13 % de MAT ; 0,1 kg paille ; 7,5 kg MS ensilage de maïs ; 2,4 d’aliment à base des sojas, et 4,4 kg d’aliment à base d’orge. Pendant les deux mois suivants, après une transition sur deux à trois semaines, elles consomment un mash acheté qui contient du lin, des pulpes de betteraves.. et de la paille. « Pour certaines femelles, la finition dépasse les quatre mois, et parfois même approche les six mois, précise Sébastien Plouzennec. Le boucher demande des carcasses homogènes de pas plus de 550 kgC. »

Une grosse partie des génisses et des jeunes vaches sont en effet vendues en direct à une grande surface de proximité sur la période d’été – un autre éleveur fournissant des bêtes sur le reste de l’année. Sur l’année 2020, 16 femelles y ont été vendues au prix fixe de 5,40 euros par kilo de carcasse. « C’est bien », estime Sébastien Plouzennec. Il travaille aussi plus ponctuellement avec un autre boucher de Quimper, pour cinq à sept vaches par an.

Le niveau de chargement est faible : il est à 1,2 UGB/ha SFP, alors la moyenne à 1,9 UGB/ha SFP chez les éleveurs bovins viande naisseurs engraisseurs finistériens. « J’ai eu l’opportunité de reprendre 45 hectares lorsque je me suis installé, j’ai saisi cette occasion pour sécuriser mon système. Sur la surface totale, il y a environ 30 hectares où je ne peux faire qu’une fauche par an, ce sont des terres qui seront sûrement amenées à disparaître, d’autant plus que l’exploitation est proche de la ville de Quimper. »

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L’éleveur exploite au total 150 hectares dont 25 hectares de céréales et 14 hectares de maïs ensilage. S’il a assez d’ensilages, il récolte en grain le surplus de maïs, ayant semé des variétés à double fin. Les prairies naturelles n’occupent qu’une dizaine d’hectares humides. L’association ray-grass anglais et trèfle blanc marche encore très bien du fait de ce niveau de chargement faible et malgré l’évolution du climat, qui n’épargne pas complètement la Bretagne.

Il valorise aussi 15 hectares de fauche sur l’aéroport dont il est voisin, et 15 autres hectares sur une zone de captage d’eau potable. « Certaines coupes servent davantage pour le paillage que pour l’alimentation. » Le pâturage est tournant sur trois à quatre jours, avec huit lots à gérer du fait du parcellaire morcelé.

Trésorerie et matière organique avec le maraîchage

Hélène Chancerelle, chambre d’agriculture du Finistère : "Une stratégie d'installation intéressante"

 
« Sébastien Plouzennec est un éleveur prudent et rigoureux. Il se laisse des portes ouvertes pour pouvoir choisir une trajectoire dans les prochaines années. Sa stratégie d’installation avec ses parents, progressive, tout en lui permettant de prendre lui-même ses décisions dès le début, est très intéressante. Il a un troupeau de qualité, très homogène. La production brute de viande vive était de 385,6 kg/UGB pour 152 UGB en 2020. Il faut souligner que reprendre clé en mains un élevage qui a ce niveau de performances n’est pas facile. Sébastien veut maintenir le niveau, et donc sécurise la conduite du troupeau. C’est un éleveur ouvert, qui veut réussir et qui a toutes les qualités pour y parvenir. »

 

S’installer est risqué

Avant de s’installer, Sébastien Plouzennec a passé un bac, un BTS ACSE et ensuite une licence en management des organisations agricoles. Puis il a travaillé deux ans dans un centre comptable. « Reprendre une exploitation comme celle de mes parents aurait été impossible sans une aide de leur part », raconte Sébastien Plouzennec. Le rachat du cheptel a été possible grâce à une donation, complétée par un emprunt privé sur dix ans. « La banque m’orientait sinon vers un rachat du cheptel sur sept ans : ce n’était pas possible. » Ses parents avaient investi dans leur ferme pendant toute leur carrière, ce qui fait que Sébastien travaille dans de bonnes conditions dès son installation ; et la situation de l’exploitation est saine. « J’ai racheté 150 000 euros de bâtiments, 150 000 euros de matériel, 30 000 euros de stocks. J’ai négocié mon prêt. Les taux sont vraiment bas en ce moment par rapport à il y a vingt ans. C’est un sacré avantage. » Il n’en demeure pas moins que le jeune éleveur estime que s’installer aujourd’hui est très risqué. « Nous n’avons aucune visibilité sur les prix et encore moins sur les aides Pac. »

Chiffres clés

156 ha de SAU ; prairie Permanente : 45 ha ; prairie Temporaire : 70,5 ha ; maïs ensilage : 14 ha ; céréales : 25 ha

Maraîchage : 1,5 ha dont 3000 m² de serres

3,5 unités de main-d’œuvre dont 1,5 pour la partie polyculture-élevage

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