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Maintenir la production porcine bretonne par une augmentation de la production par éleveur : utopie ou réalisme ?

La baisse de la production porcine bretonne constatée depuis 2008 n’est pas inéluctable. Une étude réalisée par la Chambre d’agriculture de Bretagne et Evel’up démontre qu’une augmentation de la taille des élevages de 37 % d’ici à 2035 permettrait d’enrayer cette évolution.

La production porcine bretonne diminue de manière régulière depuis 2008. En effet, les gains de productivité ne suffisent plus à compenser la diminution du nombre d’élevages et de truies.

Si l’évolution de la démographie et de la concentration des élevages se poursuit au même rythme, le nombre de porcs charcutiers produits diminuera de 10 % d’ici à 2038 et de 20 % d’ici à 2049. Les tendances démographiques ayant peu de chances d’évoluer de manière significative, le maintien de la production nécessiterait donc une augmentation de la production par éleveur. Pour quantifier le besoin de restructuration et de concentration nécessaires pour enrayer cette baisse, un travail a été mené par les équipes porc et économie-emploi de la chambre d’agriculture de Bretagne avec le groupement Evel’up.

Agrandir de 33 % pour maintenir la production

En considérant le nombre de porcs engraissés en Bretagne (source Uniporc), chaque exploitant breton a produit en moyenne 4 612 porcs par an en 2023 (activité principale porc -source MSA). À productivité égale et si les tendances démographiques se poursuivent, ce ratio doit augmenter pour maintenir le niveau de production régionale de 2023. Les calculs réalisés par la Chambre d’agriculture de Bretagne indiquent qu’il serait nécessaire d’augmenter ce ratio de 37 % d’ici à 2035 et de 56 % d’ici 2040.

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Graphique = Projection du nombre de porcs par chef d'exploitation pour maintien du potentiel de production 2022-2023 (à iso-évolution démographique)Le maintien du potentiel de production 2022-2023 nécessite une concentration des élevagesde 37 % d’ici à 2035 © Source : Unioprc, MSA et Chambre de Bretagne à partir de 2024

En 2024, le nombre moyen de truies détenues par site naisseur-engraisseur est de 243 (source BD porc). Si on applique les ratios calculés, il faudrait donc que ce nombre moyen augmente de 90 truies en 10 ans pour atteindre 323 en 2035 et de 136 truies en 15 ans pour atteindre 370 en 2040. La possibilité pour les éleveurs d’engraisser la totalité de leurs porcs permettrait également d’améliorer la production régionale. Ces deux évolutions nécessitent que les élevages puissent restructurer leurs élevages pour rapatrier des places d’engraissement, regrouper des sites et augmenter la taille des troupeaux.

Près de 50 % d’éleveurs de plus de 55 ans

Une rupture des tendances démographiques amènerait évidemment à revoir ces calculs. Mais les tendances observées sont lourdes. Le nombre d’éleveurs de porcs bretons dont l’activité principale est le porc (source MSA) diminue depuis 20 ans : il est ainsi passé de 4 975 en 2003 à 2 667 en 2023. Le manque de renouvellement des générations se traduit également par un vieillissement de la population. Le nombre d’éleveurs de moins de 35 ans s’est effondré entre 2003 et 2013 ; même si cette baisse s’est réduite depuis 2013, elle se poursuit. Le nombre d’éleveurs de plus de 55 ans a égalisé celui des 36-55 ans en 2021 et est désormais légèrement supérieur. Entre 2003 et 2023, l’indice de vieillissement (c’est-à-dire le nombre d’éleveurs de plus de 55 ans sur celui des moins de 35 ans) est passé de 1,2 à 6,1.

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Graphique = Répartition du nombre d'éleveurs de porcs par classe d'âgeentre 2003 et 2023 en BretagneLe nombre d’éleveurs de plus de 55 ans a égalisé celui des 36-55 ansen 2021 et est désormais légèrement supérieur © Sources : MSA

Une baisse de production régulière

Le nombre de porcs charcutiers produits en Bretagne diminue néanmoins moins vite que le nombre d’éleveurs grâce, d’une part, à la concentration et l’agrandissement des structures et, d’autre part, aux gains de productivité. À cela se rajoute l’alourdissement des carcasses qui freine encore la baisse de la production en termes de tonnages. Mais ces phénomènes ne suffisent pas à compenser la baisse démographique. Depuis vingt ans, la production porcine française recule plus rapidement que la consommation. En 2023, la France a produit 101,8 % de sa consommation globale de viande de porc en volume contre 103 % en 2022. Et en 2024, la production couvre tout juste les besoins de la consommation nationale (1). Dans un contexte où la souveraineté alimentaire est érigée en priorité nationale, ces tendances doivent alerter les pouvoirs publics sur la nécessité de permettre la restructuration des élevages. Il s’agit bien sûr de stopper cette baisse de production. Il s’agit aussi de faciliter la modernisation des élevages nécessaire à l’optimisation technico-économique et à la mise en place des adaptations indispensables pour répondre aux enjeux sociaux, sociétaux et environnementaux.

Marie-Laurence Grannec et Anne Bertagnolio, marie-laurence.grannec@bretagne.chambagri.fr

(1) Source : Agreste

L’expertise R & D de la chambre d’agriculture au service des éleveurs

Les travaux de recherche appliquée menés par l’équipe porc de la chambre d’agriculture de Bretagne au sein de la station expérimentale de Crécom, au travers d’enquêtes terrain ou bien sous forme de veille bibliographique ont pour vocation de répondre aux attentes et demandes d’innovations de la filière. Leur diffusion doit permettre une large appropriation par les éleveurs et leurs partenaires. Cela repose sur la communication faite directement par la chambre d’agriculture, au travers de l’organisation de journées techniques ou de la rédaction de documents. Mais cela s’appuie aussi sur le travail de transfert fait par les organisations de producteurs (OP) vers leurs techniciens et adhérents. C’est dans cet objectif que, depuis de nombreuses années, la chambre d’agriculture a signé avec la majorité des OP bretonnes une convention de partenariat prévoyant la mise à disposition annuelle de journées d’expertise. Dans le cadre de la convention avec Evel’up, une partie des journées a été utilisée en 2025 pour réaliser un travail d’analyse des données démographique et de structures des exploitations afin de modéliser le besoin d’agrandissement des exploitations porcines bretonnes. Ce travail s’est appuyé sur les séries de données transmises par la MSA (données démographiques), Uniporc (données production) et BD porc (nombre et taille de sites). L’analyse a été réalisée par l’équipe porc et l’équipe veille économie et prospective économie-emploi de la chambre d’agriculture de Bretagne. Les données MSA correspondent aux éleveurs dont l’activité dominante est le porc. Les données de production correspondent aux données d’abattage des porcs charcutiers élevés en Bretagne. Les résultats ont été présentés lors de l‘assemble générale d’Evel’up, le 12 juin dernier à Carhaix-Plouguer.

MLG

" Avoir une vision à l’horizon 2035"

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Jacques Crolais, directeur d'Evel'up © Evel'up

Jacques Crolais, directeur d’Evel’up

" Pour Evel Up, ce travail de projection était nécessaire pour permettre à nos adhérents, aux éleveurs, aux candidats à l’installation, aux personnes en formation, aux acteurs de la filière, aux décideurs publics de se projeter avec une vision à horizon 2035. Que disent ces calculs extrapolables au Grand Ouest ? Pour demain, l’autosuffisance de la France en viande porcine passera par une augmentation de la taille des élevages, de l’ordre de 100 truies en moyenne. Pour la Bretagne, c’est 112 000 places de truies et 1,25 million de places d’engraissement. Et ces moyennes sous-entendent des agrandissements très différents selon les projets de carrière des éleveurs. Ce beau challenge de la souveraineté alimentaire pour les jeunes générations intervient aussi dans un contexte de croissance forte et continue de la consommation de viande au niveau mondial. Il y a, et il va y avoir de la place pour de belles carrières, de beaux projets, des projets qui ont du sens : investissement et développement permettent le progrès pour les éleveurs et leurs équipes (technique, sanitaire, qualité, bien-être animal, conditions de travail, social, économique), le progrès pour la société (environnement, climat, RSE). Cela est exigeant pour Evel Up en matière

1- d’accompagnement : nous mobilisons l’énergie de nos équipes d’experts à une approche pluridisciplinaire.
2- de sensibilisation et de mobilisation positive des acteurs dans les territoires.
3- de valorisation pérenne des porcs, nos clients sont engagés dans la création de valeurs et investissent fortement dans la modernisation de leurs outils.

Nous sommes impatients de voir traduits en actes concrets les propos de Madame la ministre de l’Agriculture en termes de simplification administrative et de sécurisation des actes. Le progrès pour tous passe aussi par là.

Chiffre clé

En 20 ans, entre 2003 et 2023, l’indice de vieillissement de la population des éleveurs de porcs bretons est passé de 1,2 à 6,1. Cela correspond au nombre d’éleveurs de plus de 55 ans sur celui des moins de 35 ans.

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