Un jour avec Pierre Autef, vétérinaire
Entre visite d’élevage, conseil et analyse, le docteur Pierre Autef assure l’accompagnement des élevages de ruminants autour de Bellac, bastion du mouton.
8 h 30
Départ de la clinique pour rendre visite à un couple d’éleveurs, dont certaines brebis sont mal en point. Pierre Autef répartit son temps de travail entre 80 % de ruminants, et 20 % d’animaux de compagnie. Situés dans un bastion de l’élevage de moutons français, environ la moitié de ses clients élèvent des ovins, « mais il y a des journées où je vois zéro mouton ! Ça fait partie des agréments du métier, j’aime bien ne pas trop savoir ce qui m’attend quand je commence ma journée », apprécie le vétérinaire de 61 ans. Dans la camionnette, de quoi faire divers prélèvements, des injections, du gel obstétrical… Et surtout, désinfectant, blouses, gants, surpantalon et surbottes pour respecter les gestes de biosécurité.
9h
La visite en élevage a commencé. Une brebis a avorté, et d’autres, gestantes, ont une baisse inexpliquée d’état corporel. Le travail réside dans le conseil en fonction de l’analyse du contexte. Le Dr Autef, une fois à l’œuvre, ne cesse de poser des questions : la taille du lot, le stade physiologique, la date de rentrée en bergerie, comment se déroulent les agnelages de manière globale, leur comportement, leur alimentation, leur âge, les traitements précédents, tout compte pour décider des analyses à effectuer pour améliorer leur santé. Le parasitisme est une piste pour la brebis ayant avorté, un prélèvement de crottes est donc effectué. On choisit les animaux les moins en état, puis le vétérinaire vérifie la note d’état corporel ainsi que la coloration (plus ou moins rouge) de la muqueuse oculaire avant de leur faire une prise de sang.
10 h 30
De retour à la clinique, il est temps de traiter les prélèvements de la matinée. L’avorton est envoyé au laboratoire pour analyse, une partie du sang est analysée par un assistant de la clinique et la coprologie est faite par le Dr Autef. « Nous faisons environ 1 000 coprologies par an, et les trois quarts concernent des ovins. On distingue les coproscopies rapides, pour compter les œufs de strongles, ténia et coccidies, des coproscopies à double décantation pour faire ressortir aussi la grande douve, le paramphistome et la petite douve. » On commence par peser le prélèvement, le délayer avec un peu d’eau au pilon, puis il est versé dans un récipient à travers un tamis de 20 microns (laissant passer les œufs de parasite). Le vétérinaire ajoute de l’eau et laisse décanter au moins 30 minutes, pendant lesquelles les œufs de strongles, plus denses que l’eau, tombent au fond du récipient.
11h
Passage rapide par l’abattoir de Bellac, où quelques carcasses de brebis de réforme ont été consignées par les services vétérinaires sur place. « Ils sont chargés de la vérification du bien-être des animaux lors de l’ante mortem (c’est-à-dire avant l’abattage), du bon déroulement de la mise à mort, et de l’examen des carcasses en bout de chaîne, explique Pierre Autef. Lorsqu’une carcasse n’est pas conforme, ils la mettent de côté et c’est ici que j’interviens. » Le vétérinaire prononce la saisie totale de carcasses de brebis hydro cachectiques ou atteintes de néphrite, et la saisie partielle de gigots ou d’épaules d’agneaux présentant des arthrites.
11 h 15
Les résultats des analyses de sang du matin sont axés sur trois critères : le taux d’urée, de corps cétoniques et de glucose. Il y a peu d’urée dans le sang des brebis prélevées, qui sont donc en déficit protéique, leur glycémie est également faible, mais leurs taux de corps cétoniques sont normaux. « Cela veut dire qu’elles n’ont pas eu à aller chercher dans leurs réserves », explique le Dr Autef. Le reste du sang prélevé est envoyé au laboratoire pour dépister la grande douve.
13 h 30
Après la pause déjeuner, la deuxième décantation de la coprologie est lancée. Mais une cliente appelle pour un agnelage difficile. Les œufs de strongles attendront, car une seconde visite était déjà prévue cet après-midi, en élevage mixte ovin, bovin et caprin. L’urgence ne prend pas très longtemps, et le vétérinaire arrive à l’heure à son rendez-vous. Ici, Pierre Autef vient pour effectuer un suivi du taux de minéraux et vitamine A pour les petits ruminants de la ferme, en partenariat avec un laboratoire. Une visite assez protocolaire, mais les éleveurs en profitent pour faire ausculter une chèvre gestante, une vache et un veau.
16h
Le processus du matin se répète : il faut remplir les papiers. « On passe beaucoup de temps avec la paperasse. Mais c’est nécessaire pour que les laboratoires fassent les analyses dont on a besoin pour accompagner au mieux les élevages. ». Chaque laboratoire a ses formulaires, ses modalités d’analyses ; ce qui ne facilite pas toujours le travail des vétérinaires. Encore un colis qui partira en fin d’après-midi.
17h
Quelques clients passent acheter des produits, sous les conseils du vétérinaire et de ses collègues. Il est le plus ancien, et il met son expérience au service du travail de groupe du personnel de la clinique. Il n’y a plus qu’à analyser la coprologie, déposée sur une lame de microscope afin d’en observer les œufs de parasites. Résultat : la brebis prélevée le matin même ne présente pas de strongles. Il faudra trouver une autre explication à son avortement, au retour des analyses du laboratoire.
Curriculum
1986 : installation à la clinique de Bellac avec un associé.
Aujourd’hui, la clinique compte 5 associés, 4 vétérinaires salariés et 11 assistants de santé vétérinaire.