Moins de viande caprine et toujours des difficultés à vivre de l’engraissement du chevreau
La production de viande caprine s’érode tandis que les ateliers d’engraissement peinent à survivre. La filière française du chevreau reste fragilisée par une concentration de la production et une méconnaissance du produit en France. Regards croisés de Gérard Chabauty d’Interbev et d’Anthony Garnier de la Fnenc.
La production de viande caprine s’érode tandis que les ateliers d’engraissement peinent à survivre. La filière française du chevreau reste fragilisée par une concentration de la production et une méconnaissance du produit en France. Regards croisés de Gérard Chabauty d’Interbev et d’Anthony Garnier de la Fnenc.
« La production de viande caprine a reculé de 3 % en 2024-2025 par rapport à l’année précédente », observe Gérard Chabauty, éleveur de chèvres dans les Deux-Sèvres et président de la section caprine d’Interbev, en commentant les dernières données de l’Institut de l’élevage. De septembre 2024 à août 2025, 5 680 tonnes équivalent carcasse ont été produites, dont 2 700 tonnes de viande de chevreaux. Les chevreaux français semblent de plus en plus appréciés à l’export, vers le Portugal surtout et vers l’Italie.
« Nous n’avons pas de stocks en fin de campagne », se réjouit Gérard Chabauty en regrettant toutefois que « les abatteurs ne mettent pas suffisamment de prix rémunérateurs autour de Noël alors que c’est là qu’est la demande. Avec 4,55 euros du kilo de poids vif pendant les trois semaines de Noël 2024, ce n’est pas suffisant pour motiver les éleveurs à changer leur date de mise bas. » Anthony Garnier, président de la Fédération nationale des engraisseurs de chevreaux (Fnenc), le confirme : « Il faudrait une vraie incitation économique car ceux qui décalent leur production perdent sur le prix du lait d’hiver et c’est difficile d’élever des chevreaux en novembre. »
Les ateliers d’engraissement ferment
Le président de la Fnenc déplore la dégradation des revenus des engraisseurs, malgré un léger soutien des abatteurs sur le coût de l’alimentation. « Les hausses négociées couvrent à peine l’augmentation du coût alimentaire alors que les autres charges continuent de croître », regrette-t-il en constatant que « la moitié des ateliers d’engraissement ont disparu en cinq ans. Sur vingt-deux ateliers en 2020, il en reste à peine une dizaine ». Pour maintenir les volumes, un abatteur a même repris une structure d’engraissement qui fermait.
Des actions de promotion indispensables
La consommation de viande de chevreau reste trop marginale en France. « Si nous voulons rémunérer nos producteurs, il faut des consommateurs, à l’étranger mais aussi en France », martèle Gérard Chabauty. « La plupart des éleveurs ne consomment pas de chevreaux », regrette Anthony Garnier en appelant à ce que chaque éleveur devienne ambassadeur du produit.
Interbev poursuit la promotion collective de la viande de chevreau à travers deux temps forts : « C’est la saison du chevreau de nos terroirs » du 16 février au 15 mars 2026 puis « Je craque pour le chevreau de Pâques ! » du 25 mars au 5 avril. Des initiatives régionales tentent aussi de faire connaître cette viande auprès des consommateurs et des bouchers en formation. « Les apprentis bouchers découvrent souvent cette viande pour la première fois, observe Gérard Chabauty. Il faut poursuivre cet effort pour que le consommateur ait le réflexe chevreau. »
Vers une hausse du coût de l’équarrissage
Les sections d’Interbev ont reconduit pour la période 2026-2028 le mode de financement de l’équarrissage pour la collecte et le traitement des animaux morts en ferme dans les élevages bovins, ovins et caprins. Pour rappel, depuis le désengagement de l’État en 2009, les filières d’élevage se sont dotées d’un outil interprofessionnel, ATM Ruminants, qui finance le coût de la collecte et du traitement des animaux morts en ferme pour un montant d’environ 100 millions d’euros par an.
Le tonnage de caprins ramassés reste très faible par rapport aux autres espèces et les nouveaux accords visent surtout « à faire face à la hausse des coûts de l’équarrissage et des volumes collectés en raison du contexte sanitaire ». Ces nouveaux accords doivent désormais être soumis à l’extension des pouvoirs publics afin de les rendre d’application obligatoire dès le 1er janvier 2026.
Une facture plus lourde pour les engraisseurs
Si Interbev ne peut pas donner de coûts précis d’équarrissage des caprins – ceux-ci relevant d’appels d’offres réalisés avec les sociétés d’équarrissage dans le cadre de marchés privés –, Gérard Chabauty, le président de la section caprine estime la hausse de facture à au moins 20 %.
Une hausse de la facture plus lourde pour les engraisseurs. Avec ses 16 000 chevreaux engraissés chaque année, Anthony Garnier estime par exemple la hausse du coût d’équarrissage à 750 euros par an chez lui. « Au-delà des montants, c’est le taux de mortalité élevé dans la filière qui fait grimper la facture », observe le président de la Fnenc.