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Les atouts du caillebotis pour les vaches allaitantes

Les stabulations intégrant au moins une partie de caillebotis sur fosse sont courantes en élevage laitier, plus rares en système allaitant. Initialement coûteuses, elles permettent par la suite de réduire les frais de fonctionnement et nécessitent un temps de travail plus limité.

 

D’après une enquête déjà ancienne réalisée par le ministère de l’Agriculture, les stabulations 100 % paillées permettaient de loger en 2008 un peu plus de 55 % des vaches allaitantes. Et ce pourcentage concernait 90 % des cheptels dans certaines zones. Une situation héritée pour partie de la mise aux normes. Le fait de pouvoir stocker au champ le fumier issu de litière accumulée permet de se passer de fumières. Qui plus est, les stabulations 100 % paillées sont moins coûteuses à construire. Bien des techniciens soulignent cependant l’importance de raisonner en amont tant le coût de la construction du bâtiment, que son coût de fonctionnement. Lequel ne s’arrête pas à l’achat de la paille, mais gagnerait à inclure tout ce qui va avec une litière paillée : pailleuse, matériel pour le curage puis l’épandage du fumier sans oublier gasoil, éventuel hangar de stockage et surtout temps de travail de l’éleveur.

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« Ce choix d’une stabulation 100 % paillée demeure la meilleure solution pour les élevages disposant des surfaces en céréales leur permettant d’être autonomes en paille mais également pour ceux qui sont proches de l’autonomie ou ont la possibilité de s’en procurer des quantités suffisantes à des tarifs raisonnables », souligne Stéphane Berthin, technicien en charge du conseil pour les bâtiments d’élevage à l’EDE du Puy-de-Dôme. Ceci est d’autant plus vrai en polyculture-élevage où le fumier est un amendement précieux pour entretenir la fertilité des sols.

Pas seulement le prix de la paille

Mais ramené à l’animal logé, le prix de revient d’un bâtiment 100 % paillé a parfois incité à construire ce type de stabulation en zone d’altitude ou sur des exploitations de plaine très herbagères produisant peu ou pas de paille tout en ayant de longues durées de l’hivernage : cinq mois et même parfois davantage.

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« Un bâtiment 100 % paillé, c’est 8 à 12 kg de paille par jour et par couple mère veau. Quand l’élevage est à plus de 900 mètres d’altitude et que la durée de l’hivernage avoisine 180 jours, cela représente à quelque chose près 1,8 tonne de paille par vache. Et avec de la paille à 120 euros la tonne livrée, tarifs classiquement rencontrés dans bien des zones cet hiver, cela représente une dépense qui avoisine 200 euros par vache par hiver, soit 20 000 euros pour un troupeau de 100 vaches, soit à la louche une dépense de 200 000 euros sur 10 ans sans bien entendu comptabiliser la pailleuse, le tracteur et le gasoil pour le faire tourner. C’est un chiffre à bien avoir en tête », souligne Stéphane Berthin. D’autres détails ont leur importance : une vache de 900 kg nécessite davantage de paille qu’une de 700 et plus le nombre de m2/vache est important, moins la consommation de paille est importante. Il convient également de prendre en compte la date moyenne de vêlage, sans occulter le recours à l’ensilage d’herbe dans les rations, lequel accélère le salissement des litières. Le renchérissement régulier des tarifs de la paille fait que ces enjeux doivent être mûrement réfléchis avant d’envisager tout projet. Or les banques analysent souvent davantage le montant de l’investissement initial et beaucoup moins celui des frais de fonctionnement.

Caillebotis sous logettes

« Il y a 10 ans, au moins dans notre département, les stabulations pour vaches allaitantes intégrant une fosse sous caillebotis étaient rarement envisagées. Ce n’est plus le cas. C’est aujourd’hui évoqué dans au moins 50 % des projets », souligne Stéphane Berthin pour qui la bonne alternative au 100 % paillé est le système aire paillée avec caillebotis dans la mesure où les logettes renchérissent de façon conséquente les projets.

Lire aussi : Économiser avec les stabulations à logettes

La progression régulière et semble-t-il inexorable du prix de la paille est le premier facteur qui interroge. Ce produit obéit comme tous les autres à la loi de l’offre et de la demande. Entre le fort développement des mètres carrés de stabulation 100 % paillé, l’élargissement de ses débouchés (chaudière, méthanisation…), les évolutions du climat (sécheresses estivales récurrentes, risques de recul des surfaces en céréales consécutifs à des automnes trop pluvieux pour semer dans de bonnes conditions), bien des données laissent à penser que la belle époque où la paille valait moins de 70 euros la tonne livrée cour de ferme dans les zones éloignées des plaines céréalières est révolue. Un ciseau infernal quand dans le même temps le prix des bovins sur pied stagne ou même recule. La facture de paille est donc parfois assimilée à « une nouvelle annuité supplémentaire dont on ne connaît pas à l’avance le montant. » Certes, il existe des alternatives (plaquette forestière, canne de maïs, balle de riz, dolomie…), mais elles ne sont pas gratuites pour autant.

Pailleuse, gasoil, temps de travail

À côté de ces achats de paille, les éleveurs rencontrés pour les besoins de dossier mettent aussi en avant le temps passé à gérer une litière. « La paille, il faut faire un gros chèque quand on l’achète. Se pose ensuite la question de son stockage, puis de sa reprise, du temps passé au paillage avec forcément tôt ou tard l’achat d’une pailleuse, laquelle génère bien de la poussière. Il faudrait aussi pour bien faire inclure l’usure du tracteur, le coût du gasoil sans occulter non plus notre temps de travail. » souligne Damien Pignol, éleveur en Lozère. Vient ensuite la gestion du fumier. « Entre le moment où la paille nous est livrée dans la cour de ferme et celui où le fumier est épandu, la paille et/ou le fumier sera manipulé au moins quatre fois. Le lisier, on le pompe, on l’épand dans la foulée et le travail est terminé. Et dans nos zones herbagères, les teneurs en matière organique ne sont pas un problème », ajoute Jean-Pierre Rispal, éleveur dans le Cantal. Alors que la période hivernale est devenue la plus gourmande en travail d’astreinte dans bien des élevages allaitants, « cet impact du temps de travail que nécessite une litière paillée n’est probablement pas suffisamment mis en avant », reconnaît Stéphane Berthin. « Et une litière paillée nécessite aussi un endroit pour stocker la paille. Dans l’idéal encore un bâtiment supplémentaire ! » ajoute Jean-Pierre Rispal.

Le caillebotis n’est bien entendu pas le remède à tous les maux. Il représente d’abord un surcoût conséquent, lequel doit pouvoir être amorti par des économies sur les achats de paille, matériel, carburant et temps de travail. Un point faible des caillebotis est également lié à gestion de la reproduction. Ils ne sont guère compatibles avec la monte naturelle surtout s’ils sont associés aux logettes. Avec du vêlage d’automne, à moins de faire inséminer le troupeau, si les saillies doivent avoir lieu en bâtiment, le caillebotis ne convient pas. Le risque d’accident est trop important. Il faut prévoir un petit parc pour le taureau avec la nécessité de sortir les vaches les unes après les autres au fur et à mesure qu’elles viennent en chaleur. Une option contradictoire si un des objectifs du caillebotis était de limiter le temps de travail !

La question du bien-être animal est parfois soulevée. Les caillebotis sont parfois critiqués car analysés comme peu confortables. Dans la plupart des situations, les caillebotis s’accompagnent cependant d’une aire paillée ou de logettes dont les allaitantes, à l’image de leurs consœurs laitières savent parfaitement s’accommoder. Certains éleveurs optent aussi délibérément pour des solutions 100 % caillebotis. Une option qui n’est pas recommandée par les techniciens car pouvant générer des boiteries et blessures avec également des réserves pour l’ambiance dans le bâtiment compte tenu de la lame d’air froid présente sous la fosse au cœur de l’hiver. Même si elle n’est pas recommandée cette solution est parfois adoptée. Elle est d’ailleurs présente dans de nombreux bâtiments d’engraissement italiens et donne des résultats à condition de la réserver à des animaux pas trop lourds et disposant de solides aplombs.

Mais à choisir et toute « rustique » qu’elle soit, cette solution 100 % caillebotis n’est-elle pas préférable à la solution 100 % paillée si compte tenu de son coût, la quantité de paille apportée est en deçà des préconisations avec, comme on le voit parfois une litière sale, humide sur laquelle les animaux ne se couchent qu’à contrecœur ? Ce serait peut-être aux vaches de répondre à cette question ?

« Quoi qu’il en soit, avant de se décider pour tel ou tel type de bâtiment, je trouve qu’il faut aller en voir le plus possible, prendre le temps de discuter avec leurs utilisateurs, et peser le pour du contre des différents systèmes dans le contexte de son exploitation », résume Damien Pignol. « Beaucoup d’éleveurs nous demandent des adresses. Ils veulent des références. C’est d’ailleurs pour cela que nous organisons régulièrement des journées portes ouvertes sur des réalisations qui ont fait leurs preuves et qui peuvent donner des idées », ajoute Stéphane Berthin.

Quant à l’éventualité de transformer une stabulation avec aire paillée en creusant une fosse pour en faire une association caillebotis avec aire paillée, elle peut être étudiée mais est rarement aisée à envisager (présence de poteaux, sérieux risque d’affaiblissement de la charpente au moment de creuser la fosse).

Hiérarchie dans le coût de réalisation

Quel que soit le type de bâtiment, les coûts de réalisation ramenés à la place ont progressé dans des proportions sensibles ces dernières années avec des montants qui tendraient à devenir prohibitifs si on fait un parallèle avec l’évolution du prix du bétail ! Ces coûts sont très dépendants de la topographie, du cubage de terre et parfois de roches à déplacer et des différents devis qui pourront être proposés par les entreprises représentant les différents corps de métiers amenés à travailler sur le chantier. Il est donc difficile d’entrer dans les détails dans la mesure où chaque projet est aussi un cas particulier.

Pour donner malgré tout une échelle de valeur, Stéphane Berthin fait état 3 000 à 4 000 euros la place pour une stabulation aire paillée intégrale, 4 000 à 5 500 euros la place pour une fosse sous caillebotis et aire paillée et de 5 000 à 7 000 euros la place pour une fosse sous caillebotis et logettes. À cela s’ajoute toute la complexité des différentes possibilités d’aides extérieures pour le financement avec une part des subventions souvent variables d’une région à une autre et pour laquelle l’âge du porteur de projet a aussi son importance. Stéphane Berthin de mettre en garde sur le risque lié à une trop forte part d’autoconstruction. Le temps passé sur le chantier ne pourra être consacré aux soins du troupeau ou au parcellaire avec le risque que cela représente pour la détérioration des performances techniques.

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