RAVAGEUR DU MAÏS
RAVAGEUR DU MAÏS - Combiner solutions chimique et agronomique contre le taupin
En dépit du retrait des spécialités Cheyenne
et Cruiser 350, des insecticides restent disponibles
pour lutter contre le taupin. Toutefois, s’ils réduisent
les attaques, ils ont très peu d’impact sur les
populations larvaires.
ou à l’automne. Le reste du temps, elles s’enfouissent dans le sol
à 40 ou 50 cm de profondeur sans s’alimenter.
Cruiser 350 et Cheyenne, deux spécialités à base de néonicotinoïdes, sont passées à la trappe… Leur suspension d’usage a été fixée pour une durée de deux ans avec une entrée en vigueur le 1er décembre.
Un traitement de semences est disponible malgré tout pour lutter contre les taupins sur maïs : Sonido. Le produit de Bayer CropScience se compose de thiaclopride, une molécule de la famille des néonicotinoïdes comme le thiamethoxam (Cruiser) et la clothianidine (Cheyenne). Mais le thiaclopride n’a pas été pris en compte par la Commission européenne dans ses mesures d’interdiction.
L’efficacité de Sonido est jugée moyenne par Arvalis contre les taupins. « Dans les situations d’attaques faibles à moyenne, Sonido se comporte bien. Sa faiblesse s’exprime dans les cas d’attaques tardives, c’est-à-dire au stade 5- 6 feuilles du maïs, où le produit perd beaucoup en efficacité, souligne Jean-Baptiste Thibord, Arvalis. D’autre part, cette protection des semences n’offre pas d’efficacité satisfaisante contre les pucerons et cicadelles comme pouvait la fournir Cruiser 350. Et dans les situations de sols froids, un peu fermes, il peut y avoir des problèmes de sélectivité sur maïs. Nous conseillons de ne pas sur-utiliser Sonido quand la pression taupin ne le justifie pas. »
Pour une meilleure efficacité, il faut bien positionner les microgranulés
En 2013, le produit de traitement de semences Cruiser était plébiscité: sur les 55 % de surfaces de maïs protégées contre le taupin, Cruiser 350 en représentait 80 % (soit 1,3 million d’ha) contre 20 % aux autres solutions de lutte, les microgranulés d’application de sol. Chez ces derniers, il reste Dursban 5 G, Belem 0,8mg et Force 1,5 G. Parmi ces trois spécialités, Force 1,5 G semble celui qui apporte les meilleures garanties, selon Arvalis. « C’est le cas surtout en Bretagne mais dans le Sud-Ouest, son efficacité est équivalente à celle de Belem 0,8 MG, note le spécialiste d’Arvalis. Une contrainte réglementaire pèse sur Force 1,5 G avec une autorisation d’utilisation un an sur trois sur une même parcelle. »
Les performances de ces microgranulés sont irrégulières selon les conditions pédo-climatiques au moment du semis et de la levée. « Des fois, ils montrent de bonnes performances. D’autres fois, nous enregistrons des échecs avec ces produits, remarque Bernard Guéry, du SRAL Aquitaine. Mais en 2013 avec les conditions climatiques froides et pluvieuses au printemps, même les traitements de semences ont été mis à rude épreuve. »
« L’efficacité de ces produits est très dépendante des conditions d’application, rappelle Alix Deléglise de la chambre d’agriculture régionale de Bretagne. Il faut bien positionner les microgranulés dans toute la profondeur de la raie de semis grâce à un diffuseur installé sur le semoir. Attention, pour une meilleure efficacité sur les semoirs à disques, le diffuseur doit se positionner avant l’élément semeur et non pas après. »
Un autre insecticide du sol est en attente d’homologation
En ce qui concerne Dursban 5G, il présente l’intérêt d’apporter un petit complément d’efficacité contre les scutigerelles comme Force 1,5 G. De tous les produits c’est le moins onéreux (33 euros/ha environ) contre 50 euros à Belem 0,8 MG, 65 euros à Force 1,5 G et entre 50 et 70 euros pour Sonido selon la densité de semis. «Dursban 5G est amené à quitter le marché, précise Jean-Baptiste Thibord. Nous attendons une décision de la DGAL à ce sujet mais un autre produit à base de chlorpyriphoséthyl d’une autre firme que Dow est en cours d’évaluation pour homologation. »
Un autre produit prometteur attend d’être homologué: Fury Geo, de Belchim Crop Protection. Il est à base de zeta-cyperméthrine, un insecticide de la famille des pyréthrinoïdes comme ceux de Belem 0,8 MG et Force 1,5 G. Il nécessite l’utilisation d’un diffuseur adapté sur le semoir pour son application dans la raie de semis. « Son efficacité est du niveau de celle de Force 1,5 G surtout si l’on retire des résultats deux des essais en Bretagne où il a décroché en performance, précise Jean- Baptiste Thibord. Dans le reste des neuf essais, il a montré une bonne régularité de performance. » Le taupin attire encore les nouveautés contre lui.
L’agronomie est aussi de mise contre le taupin
Face aux taupins, c’est en alliant l’agronomie aux solutions chimiques de façon répétée sur plusieurs années qu’une amélioration de la situation sera possible, en visant à réduire le stock larvaire présent dans le sol. « Nous avons mené en lien avec Arvalis une campagne d’analyses depuis trois ans sur une trentaine de parcelles en Bretagne. Cette enquête vise notamment à mieux cerner les situations agronomiques favorables au taupin », avance Alix Deléglise, de la chambre d’agriculture régionale de Bretagne.
L’enquête confirme que la présence d’une prairie dans la rotation ou à proximité constitue un facteur de risque majeur. Les prairies constituent un lieu de ponte privilégié pour les adultes leur offrant une couverture de sol dense et fraîche, sans perturbation mécanique, et de quoi se nourrir. Les sols riches en matière organique et à texture fine favorisent le déplacement des larves et la fréquence des dégâts. « La difficulté avec le taupin, c’est qu’il s’agit d’un problème multifactoriel, explique Philippe Larroudé, d’Arvalis. Par exemple, le labour peut avoir un impact sur les larves, mais certainement couplé au type de sol, au taux de matière organique… Il n’y a pas de solution agronomique efficace à 100 %. »
Nouveaux axes de recherche
Un Casdar « taupins » a été lancé en 2012 pour une durée de trois ans. « Ce programme de développement, en lien avec l’Inra, s’articule autour de trois axes, indique Michel Moquet d’Arvalis. Le premier concerne la biologie et le cycle du taupin. Le second s’intéresse à la prévision du risque avec l’objectif d’élaborer une nouvelle grille de risque sur maïs tenant compte de nouveaux critères tels que l’environnement parcellaire, la richesse en matière organique du sol, son pH, etc. Et le dernier porte sur la recherche de stratégies de lutte alternatives. ». Quelques pistes se dégagent même s’il n’y a pas de recette miracle.
Des produits de bio-contrôle, à travers la diffusion de champignons entomophages ou de nématodes pathogènes, sont en cours de test. Avec ces parasites naturels, l’idée est de réduire la population de taupins avec un effet à long terme, avant d’espérer un effet immédiat.
Le recours à des leurres ou appâts, sous forme de graines attractives germant avant le maïs viserait à « faire diversion » et limiter ainsi les dégâts sur la culture.
L’emploi de substances répulsives à base de glucosinolates est aussi étudié. Les glucosinolates sont des molécules sécrétées par les crucifères (notamment la moutarde brune) qui agissent contre les ravageurs. Deux mélanges de crucifères sont testés au champ.