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Raisonner au cas par cas le risque de pollution diffuse

La maîtrise du risque pesticides doit se raisonner selon la molécule, le milieu agropédoclimatique et la période d’application. C’est ce qui ressort des suivis sur les stations Arvalis.

La maîtrise du risque de transfert à l’eau des produits phytosanitaires est un enjeu essentiel.
La maîtrise du risque de transfert à l’eau des produits phytosanitaires est un enjeu essentiel.
© V. Bargain

« La première étape pour évaluer le risque de transfert de pesticides est d’identifier les modes de circulation de l’eau », explique Anne-Sophie Colart, d’Arvalis. Dans le cas d’écoulement par le drainage, si la sortie se fait dans une rivière, un fossé, l’eau et les résidus circulent rapidement et la contamination est potentielle. « Les recommandations sont alors de traiter hors période d’écoulement des drains et de diriger les sorties vers des fossés végétalisés ou des zones tampons humides. » Si l’eau s’infiltre rapidement dans un sol peu profond, fissuré ou filtrant, certains produits ne doivent plus être appliqués ou seulement à une période donnée. En cas d’écoulement rapide via des fentes de retrait, il faut travailler le sol avant traitement ou modifier la période d’application.


Des risques variables selon le type de sol


Autre situation : un écoulement par ruissellement, avec là encore différentes possibilités. « Si le ruissellement et la dérive de pulvérisation s’infiltrent rapidement via des dolines, bétoires… ceux-ci doivent être protégés par des zones tampons. »
Mais dans le cas d’un ruissellement par battance ou dans les rangs de semis, il est plutôt recommandé « de revoir la préparation de sol (non-labour…) et les techniques de semis, d’enrichir le sol en matière organique et si nécessaire de cultiver la parcelle dans le sens inverse à la pente ». Si l’eau ruisselle dans un talweg ou remplit rapidement les fossés, des zones tampons et la végétalisation des fossés sont des solutions. Mais des pneus basse pression peuvent suffire quand l’eau ruisselle surtout dans les passages de roues. Enfin, une zone humide régulière indique une remontée de la nappe et implique de ne pas traiter à l’automne voire d’implanter une bande enherbée.


L’état hydrique du sol est déterminant


Attention aussi au type de sol. « Sur le site de la Jaillère, constitué de limons sur schistes, représentatifs du Grand Ouest, le drainage et le ruissellement ont lieu surtout en hiver », souligne Benoît Réal, d’Arvalis. De 1993 à 2010, quatre-vingt substances actives y ont été étudiées. Vingt n’ont jamais été quantifiées. Les principales substances dépassant parfois 2 mg/l - seuil réglementaire pour des eaux de surface - sont l’isoproturon, l’atrazine, le prosulfocarbe et le glyphosate. « Les quantités entraînées sont faibles au regard des quantités appliquées. Le seuil de 2 mg/l n’est dépassé que pour quelques molécules et à des fréquences inférieures à 10 %. » L’état hydrique du sol lors de l’application est déterminant. Les transferts d’isoproturon et glyphosate sont ainsi beaucoup plus importants quand l’application est faite en période d’écoulement. Pour une même période, la dose est aussi un levier efficace pour certaines molécules. Et les suivis montrent que les transferts sont plus importants en parcelle non drainée et que le travail du sol a un impact variable selon la période d’application.
Au Magneraud, au sol argilo-calcaire caillouteux, les risques sont surtout liés à l’infiltration rapide de l’eau par des circuits préférentiels. De 2000 à 2010, quarante-deux substances actives y ont été suivies. Treize n’ont jamais été quantifiées. Trois ont été quantifiées fréquemment, avec plus de 20 % de dépassements de 0,1 mg/l, seuil réglementaire pour des eaux rejoignant la nappe : la bentazone, le glyphosate et l’isoproturon. « La comparaison à ces seuils est une première approche qu’il faut compléter par des informations sur le type de sol, la période d’application…, précise Anne-Monique Bodilis, d’Arvalis. Toutefois, elle permet de repérer les grands enjeux pour cibler les actions sur le terrain. »
« Les modes de transfert sont aussi très variables selon les molécules », souligne Céline Drillaud-Marteau, d’Arvalis. Au Magneraud, les transferts d’isoproturon sont en général assez rapides (<100 jours) même s’ils peuvent perdurer pendant toute la période d’écoulement hivernal.


Des transferts très variables selon la molécule


Pour le dmta–p, la plupart des transferts sont observés dans les premiers écoulements mais les plus importants ont lieu le printemps et l’été suivant l’application. Pour le S-métolachlore ou la bentazone, les temps de transfert sont assez longs (>5 mois) et les transferts les plus importants sont mesurés le printemps et l’été suivant l’application. Enfin, plus de 50 % des transferts importants de glyphosate ont lieu plus de 160 jours après l’application, la molécule n’étant presque pas dégradée dans ce milieu. « Les comportements très différents des molécules entre sites et selon les périodes d’application confirment qu’une approche par molécule, milieu agropédoclimatique et période d’application est indispensable. »

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