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Regroupement de l’offre
Les OP et AssOP territoriales vont-elles enfin prendre toute leur dimension ?

Les organisations de producteurs et les associations d’OP (AssOP) pourront accélérer leur massification suite à la parution du décret d’octobre dernier. Petit tour de quatre initiatives régionales.

Il se passe des choses en cette fin d’année qui pourraient donner un coup de pouce à la structuration des organisations de producteurs (OP). Un décret est paru le 22 octobre 2016 qui élargit les conditions dans lesquelles une OP peut adhérer à plusieurs associations d’OP (AssOP) dans le secteur du lait de vache (lire encadré). La mise en application de la loi Sapin II (contrat cadre, référence à un coût de production) est aussi très attendue dans les OP, pour finaliser les négociations sur les contrats avec les industriels.

"Il reste du chemin à parcourir : regrouper les producteurs, se professionnaliser…", résument les OP et AssOP contactées. Elles progressent néanmoins et sont convaincues de la nécessité de poursuivre leurs efforts. Voici un tour d’horizon de quatre OP transversales (représentant des éleveurs livrant plusieurs laiteries) et AssOP : leurs actions et leurs projets. Il en existe d’autres, comme l’OP lait bio Seine et Loire ou l’UPLV dans les Vosges. Et il existe d’autres projets d’AssOP, comme sur le bassin Nord Picardie.

L’association d’OP Grand Ouest veut peser ??? (PHOTO LE NAN)

"Nous attendions le décret ((paru en octobre)) avec impatience, pour finaliser la structuration de notre AssOP Grand Ouest ! Nous avons des OP membres qui adhèrent déjà à une AssOP verticale (plusieurs OP d’éleveurs livrant une même laiterie) ou dont c’est le projet ; ça les bloquait pour nous rejoindre", indique Christian Le Nan, président de l’association d’OP Grand Ouest, une association d’OP représentant des éleveurs livrant différentes laiteries. C’est typiquement le cas de l’OP Cleps Ouest, qui adhère déjà à Sunlait, l’AssOP regroupant douze OP Savencia. Et qui s’était mise dans les rangs de l’AssOP Grand Ouest. "Avec Sunlait, les activités sont centrées sur l’application et la renégociation du contrat Savencia. Avec l’AssOP Grand Ouest, l’objectif est de partager de l’expertise et du conseil, et d’échanger des informations avec d’autres OP", résume Denis Berranger, président de Cleps Ouest.

"Nous allons enfin pouvoir avancer. Nous pouvons maintenant avoir un discours officiel auprès de la région, de l’État et de l’Union européenne", plante Christian Le Nan. Agréé le 5 octobre dernier, l’AssOP Grand Ouest couvre la Bretagne, les Pays de la Loire et la Normandie. Aujourd’hui, cinq OP y adhèrent : Rolland, Sill Malo, Cleps Ouest, Bel, APLBL Lactalis, représentant 3 700 exploitations (1,4 milliard de litres de lait).

Première étape, massifier l’AssOP. "Cet hiver, nous allons à la rencontre des autres OP du secteur, pour rassembler un maximum. Plus nous serons nombreux et représentatifs, plus nous pourrons obtenir de choses, comme un soutien aux OP par les régions. L’AssOP est ouverte aux représentants de coopératives. Les coopératives ancrées régionalement auront sans doute davantage d’intérêts à rejoindre notre AssOP."

Deuxième étape, mutualiser les coûts. "Pour le premier trimestre 2017, nous devons finaliser notre travail sur le programme informatique adéquat pour gérer les fichiers des adhérents et recenser les volumes livrés à transmettre à FranceAgriMer. Il faudra aussi trouver un outil de prévision des livraisons à proposer à nos OP adhérentes. Des outils existent dans certaines OP. L’objet de l’AssOP est de réunir les expériences de chacun, pour en faire bénéficier le groupe. Les coûts de formation et d’expertises pourront à l’avenir être mutualisés. Nous avons une animatrice de l’AssOP, pour récolter des informations et faire un retour à nos OP adhérentes pour renforcer leur argumentaire."

Troisième étape, défendre les projets de l’AssOP. "Nous voulons interpeller les régions sur la possibilité qu’elles ont de constituer un fonds de stabilité des revenus, dans le cadre du second pilier de la PAC. Nous comptons aussi défendre au niveau national la nécessité de faire encore évoluer la fiscalité, pour inciter les exploitations à gérer leurs risques économiques. Enfin, nous voulons reprendre en main le volet communication vers le grand public, aujourd’hui essentiellement faite par les industriels."

L’APLBC travaille le coût de production

L’association des producteurs de lait du bassin Centre (APLBC) représente 388 adhérents (juin 2016), dont 71 producteurs livrant à Triballat Rians et 317 livrant à Laiterie Saint Denis de l’Hôtel (LSDH). "Les producteurs T. Rians du Centre n’auraient pas pu constituer une OP à eux tout seul. Ça s’est fait avec les éleveurs LSDH dans une logique territoriale, plutôt qu’avec les autres producteurs Rians des Vosges et de Haute-Marne. Dans une région de faible densité laitière comme la nôtre, avec la volonté des deux laiteries de travailler avec leurs OP, c’était un choix logique", expose Jean-Michel Bisson, président de l’APLBC.

Depuis l’an dernier, la zone d’actions de l’OP s’est étendue au-delà de la région Centre, à cinq départements limitrophes. Le taux d’adhésion est de plus de 95 % ! Il faut dire que les règles incitent fortement à adhérer à l’OP. "Nous voulions que les acquis de l’OP soient réservés à ses adhérents. Comme les laiteries sont intéressées pour travailler avec des OP représentatives, elles ont joué le jeu. Pour pouvoir bénéficier du nouveau dispositif de calcul du prix du lait de LSDH, il faut être adhérent de l’OP. Pour recevoir une attribution gratuite de volume, il faut être adhérent", explique Jean-Michel Bisson.

L’APLBC ne se contente pas de regrouper deux sections par entreprise. "On échange entre sections pour se donner des idées, s’informer et porter collectivement nos propositions. Quand une décision est prise par l’OP, elle est portée par les sections." Par exemple, l’APLBC s’est prononcée pour que le contrat soit librement cessible mais non monnayable. "Les règles de transfert sont les mêmes pour les deux sections. Par contre, la gestion des volumes reste section par section. Les transferts sont supervisés par un comité constitué de représentants de la laiterie et de la section de l’OP concernée."

Pour le prix du lait, le travail se fait par section, car les marchés des deux laiteries sont trop différents : le lait liquide pour la LSDH avec des laits différenciés et des contrats tripartites, et des produits ultrafrais très spécifiques pour T. Rians. Par contre, le travail accompli pour le contrat cadre LSDH (1), a pu inspirer celui mené avec T. Rians, en passe d’aboutir. "Il doit permettre d’avoir plus de visibilité sur le prix et de mieux défendre le prix du lait."

Les trois FMB préparent une AssOP nationale (PHOTO JEHANNIN)

France Milk Board Grand Ouest, Sud Ouest et Normandie travailleront cet hiver à la création d’une association nationale FMB, en vue de son agrément. Cette association sera ouverte à d’autres OP. "Cette création formalisera un fonctionnement déjà en place entre les trois FMB. Les dépenses sont déjà mutualisées pour les dépenses d’expertise juridique, frais d’avocat… Chaque trimestre, pour discuter prix du lait, des représentants des trois OP rencontrent Savencia ensemble, comme si l’AssOP existait déjà", expose Serge Lagahé, président de FMB Sud Ouest (180 exploitations adhérentes). Autre projet pour 2017, la création d’une association d’OP à l’échelle européenne avec deux organisations allemande et belge. "Avec le décret paru en octobre, les FMB pourront adhérer à deux AssOP, la structure nationale et l’européenne. L’objet de cette dernière est essentiellement l’échange d’informations", indique Denis Jehannin, responsable communication de FMB Grand Ouest (300 exploitations adhérentes).

Rappelons que les FMB ont à leur actif la signature de deux contrats cadres (Savencia et Vaubernier) et de deux conventions de fonctionnement (Lactalis et Sill Malo). L’année 2016 a été une année de propositions et de discussions avec les industriels. "Nous attendons avec impatience la loi Sapin II pour finaliser la négociation de la seconde génération de contrat, avec Lactalis et la laiterie Sill Malo, indique Denis Jehannin. Le fait d’être des OP transversales nous a permis d’arriver à ce résultat. Mais on ne pèse pas encore assez pour avancer sur la gestion des volumes globaux avec Lactalis, comme cela se fait avec Savencia, ou sur la prise en compte des coûts de production dans le prix du lait."

"L’OP transversale permet de comparer les contrats, estime Serge Lagahé. Comme Savencia cherche des producteurs sur la zone, certains ont pu quitter leur laiterie pour rejoindre Savencia, et ils ont préféré notre contrat à celui de Sunlait. Ce fut le cas par exemple le 1er novembre dernier, de dix producteurs Danone."

(1) Lire Réussir lait, n°???, mars 2016, page 20.

En ATTENTE PHOTO Jean-Michel Bisson, président de l’APLBC. "Être transversale permet de savoir ce qui se passe chez le voisin ! Les idées, les informations circulent. Ça nourrit notre travail et nous permet d’avancer."))

L’Association d’OP Sud Est veut mutualiser les compétences (Avec PHOTO de Laurent)

"Notre AssOP a eu son agrément en novembre 2015. L’année 2016 a été compliquée. Une des OP adhérentes, Danone Sud-Est (470 exploitations) a quitté la structure, préférant travailler seule sur le contrat Danone. La porte leur reste ouverte, ainsi qu’aux autres OP. Les autres OP adhérentes sont l’APLSE (Lactalis, 250 exploitations), l’OP Guilloteau (110 exp.) et l’OP Saint Marcellin (100 exp.) qui est multientreprise", présente Nicolas Laurent, président de l’Association d’OP Sud-Est.

"La crise a provoqué le repli sur soi. Le court terme, c’est le prix du lait en fin de mois. Les moyen et long termes c’est comment on s’organise pour rétablir un rapport de force équilibré et se mettre dans une posture gagnant gagnant avec les industriels."

En 2017, l’association organisera des formations pour aider les représentants à se professionnaliser. "Il faudra formaliser les missions de l’AssOP et essayer de rassembler et d’entretenir la dynamique collective qui a démarré".

"Nous espérons qu’une fois que l’AssOP sera en ordre de marche, la délégation de la négociation puisse commencer à se mettre en place. C’est un vrai job à plein temps : se tenir toujours bien informé pour avoir le maximum de cartes en main. On aurait un professionnel qui accompagnerait la négociation pour chaque OP adhérente, comme en Bavière. Sa force ? Sa bonne connaissance de toutes les OP et entreprises du territoire. L’AssOP permet de mutualiser des coûts pour être en capacité de se former et de se payer de l’expertise, pour accéder à un bon niveau de compétence. Enfin, pour être pris au sérieux, rien de tel qu’un minimum d’indépendance. Avec par exemple, la reprise en main du froid, avec des tanks qui seraient soit propriété des éleveurs, soit de leur OP, et pas obligatoirement de l’AssOP car dans certaines OP les éleveurs sont déjà propriétaires de leur tank."

Une OP peut adhérer à plusieurs AssOP

Le décret paru en octobre stipule que l’OP délègue à l’AssOP à laquelle elle adhère les activités mentionnées dans les statuts de l’AssOP. Une OP peut adhérer à plusieurs AssOP sous réserve que ces associations poursuivent des objectifs distincts et compatibles entre eux, et adoptent des règles et mettent en œuvre des mesures qui ne portent pas sur le même objet. L’adhésion à plusieurs associations ne doit pas empêcher la réalisation correcte des activités de l’OP.

Atouts et enjeux des OP et AssOP territoriales

Atouts

• Partager des informations et des idées, se comparer.

• Mutualiser des coûts : animation, formation des représentants, expertise et conseil…

Enjeux

• Regrouper et représenter le plus de producteurs possible pour peser dans la négociation. Et pour aller chercher des soutiens financiers (aides publiques) permettant de se professionnaliser.

• Trouver un projet constructif avec les partenaires industriels.

• Défendre une stratégie. L’AssOP pourrait défendre une politique d’installation, la constitution d’un fonds de stabilité des revenus…

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