La BVP française en quête de croissance à l'international
Confrontés à un marché français arrivé à maturité et affichant une progression faible, les industriels et les enseignes de restauration recherchent des relais de croissance à l'étranger.

Le salon Europain & Intersuc, qui vient de fermer ses portes le 9 février à Paris, a été l'occasion pour les opérateurs du secteur de la boulangerie, viennoiserie et pâtisserie (BVP) de rencontrer leurs clients français et étrangers. Le secteur est confronté à plusieurs enjeux, notamment sur le marché domestique, où l'objectif est de séduire plus de clients avec des nouveaux produits, accompagnant les nouvelles façons de s'alimenter. Sur le long cours, la consommation de pain baisse régulièrement en volume passant de 325 g par jour et par personne en 1950 à 135 g en 2010. Les artisans boulangers, moins nombreux, sont confrontés à la grande distribution dont l'offre, de plus en plus diversifiée et qualitative, plaît aux consommateurs.
En hypermarchés et en supermarchés, là où se vendent 26 % des volumes de BVP, le pain emballé a progressé en 2015 de 1,3 % en volume avec 437,6 millions d'unités commercialisées, selon Nielsen. Le pain de mie, qui représente les deux tiers du marché du pain emballé, a reculé de 0,6 % en volume l'année dernière, tandis que les pains spéciaux (un tiers du marché) sont en hausse de 5 %. Le secteur est un poids lourd de l'industrie agroalimentaire, avec 2,6 Mt de farine panifiée chaque année. Composée des industriels, des réseaux de magasins et des panèteries, la BVP représente un CA de 6,2 Md€ chaque année et emploie 35.000 salariés, selon la Fédération des entrepreneurs de la boulangerie. Certes, les produits plus élaborés, comme les pains spéciaux et le snacking, dynamisent le marché domestique mais pour de nombreux industriels ou chaînes de points de vente, l'avenir se dessine au-delà des frontières nationales. Le secteur réalise un peu plus de 13 % du son CA au-delà des frontières selon la Fédération des entrepreneurs de la boulangerie, c'est-à-dire mieux que la moyenne des industries agroalimentaires (IAA) françaises qui se situe à 11 %. Or les opportunités sont importantes. Selon les dernières analyses publiées par Euler Hermes sur l'agroalimentaire français, les produits céréaliers resteront, avec les boissons, les produits moteurs des exportations des IAA françaises en 2016. Ils profitent du peu de contraintes réglementaires à l'export, contrairement aux produits carnés ou laitiers. Selon Euler Hermes, les exportations des IAA devraient progresser de 2,6 Md€ en 2016 pour s'établir à 61,2 Md€.
Santé et praticité
Business France estime, de son côté, que la BVP réalise un CA à l'export de 1,8 Md€. Il s'agit de la part la plus importante des exportations françaises de produits gourmets (27 % en 2014). Parmi les tendances identifiées : les produits biologiques, sains et “sans”. « Les consommateurs de produits matures sont à la recherche de produits plus bénéfiques pour leur santé : sans gluten, sans additif et à base d'ingrédients naturels », note Business France. Ces produits trouveront un écho tout particulier sur les marchés porteurs et matures d'Europe occidentale et d'Amérique du Nord, là où une partie des consommateurs est sensible au clean label et aux listes d'ingrédients réduites. La praticité est une tendance forte, les clients recherchant des produits faciles à ouvrir, réchauffer et consommer.
Parmi les tendances identifiées, on retrouve les produits bio, sains et “sans”.
Cela pousse les industriels à consentir des efforts de plus en plus importants en R&D, afin « de développer des produits dont les qualités organoleptiques se rapprochent le plus des produits frais, malgré l'augmentation de la durée de conservation, la surgélation, la re-mise en œuvre de plus en plus simplifiée », selon Business France. La recherche accrue sur les ingrédients utilisés (matières grasses, farines, etc.) est aussi observée. En termes de débouchés, Business France recommande notamment aux professionnels de prospecter les circuits commerciaux (GMS, circuits spécialisés, points chauds), les réseaux d'hôtellerie et de restauration, notamment haut de gamme (Chine continentale, Afrique subsaharienne, etc.) et le catering de transport (Europe occidentale, Moyen-Orient, Asie du Sud et Amérique du Nord).
Même si les grandes entreprises sont celles qui profitent le plus des retombées de la french cuisine mondialement reconnue (celles réalisant un CA supérieur à 1,5 Md€ font 45 % de leur CA à l'étranger), les PME peuvent aussi tirer parti de cette belle image qui irrigue l'ensemble de la filière. C'est le cas de Jacquet Brossard, filiale de Lima-grain, qui exporte ses brownies outre-Atlantique et a ouvert une usine au Brésil. Son objectif : réaliser 30 % de son CA à l'étranger contre 18 % actuellement. Ou Grain d'Or Gel qui parie sur ses innovations (cf. encadré ci-dessous).
Arrivé à saturation en France avec environ 80 % de parts de marché de la boule à pizza surgelée, la PME nordiste Grain d'Or Gel met l'accent sur l'Europe. Avec 10 % du CA réalisé à l'étranger, grâce notamment à deux chaînes de restaurant en Espagne, l'entreprise compte aller beaucoup plus loin à l'avenir. La société a ainsi mis au point la Fozza à garnir, un hybride de la focaccia et de la pizza, pour laquelle elle a déposé la marque. L'entreprise veut aussi profiter de la mode des burgers, avec des pains permettant de réaliser des recettes qualitatives comme le burger old school. Autre nouveauté : le rondini, premier panini rond du marché, à utiliser froid ou chaud, avec lequel l'entreprise espère créer un nouveau segment de marché. La PME (110 salariés, 3 usines) a réalisé 27 M€ de CA en 2014/2015, en progression de 5 % par an depuis les deux derniers exercices.