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Photovoltaïque : créer une structure collective pour pouvoir investir

Certains exploitants agricoles créent une société pour investir collectivement dans des centrales solaires sur bâtiments. C’est le cas d’Agrisolaire 28, une SAS qui regroupe 15 agriculteurs d’Eure-et-Loir. Témoignages de Jean-Michel Laigneau et David Eymard, président et directeur général.

Un bâtiment neuf de 800 m2 équipé de panneaux photovoltaïques pour transformer en farine des céréales produites en agriculture biologique. Le nouvel atelier de diversification à la ferme de David Eymard, agriculteur à Trancrainville en Eure-et-Loir, est en cours d’aménagement.

Un projet qu’il a pu mener à bien grâce à Agrisolaire 28, une SAS (société par actions simplifiée) qu’il a créée avec 14 autres agriculteurs. Cette structure permet, pour chacun d’entre eux, de porter le financement de la construction d’un bâtiment équipé d’une centrale solaire sur sa propre exploitation. La SAS va ensuite revendre l’électricité sur le réseau, pour un tarif de 0,0947 euro/kWh. En contrepartie, les terrains sont mis à disposition de la SAS, via un bail à construction.

Un « pot commun » qui permet de mutualiser les démarches

Cette solution représente un intérêt pour répondre à un besoin d’investissement en mobilisant peu de financement, puisque les agriculteurs apportent uniquement des parts sociales dans la société. La part minimale des associés ne représente que 10 % du montant total de l’investissement qui s’élève à 3,8 millions d’euros, en ce qui concerne Agrisolaire 28, avec un financement prévu sur 20 ans.

« L’avantage de ce type de structuration est que certains frais peuvent être mutualisés comme ceux pour le raccordement », explique Claudia Huard, chargée de projets à la FNSEA Centre-Val de Loire. Aussi, c’est la SAS qui est chargée d’emprunter auprès de la banque. De quoi encourager certains agriculteurs, en cas de capacité d’investissement limitée, par exemple en cas d’emprunts déjà conséquents, ou pour un jeune installé.

Pour Jean-Michel Laigneau et David Eymard, la SAS, qu’ils comparent à un « pot commun », repose sur des principes de mutualisation et fonctionne grâce à la « force du groupe », que ce soit pour la gestion des appels d’offres auprès des fournisseurs, le contact avec les financeurs ou le volet assurances. « La SAS permet de faire en une fois les mêmes démarches qui concernent tous les associés », ajoutent-ils.

L’aspect fiscal est aussi l’une des raisons qui peut amener à la création d’une société commerciale dans le cadre de la production d’énergie à la ferme. « Nous ne pouvons pas dépasser un certain niveau de production et de, vente d’électricité, car fiscalement il ne s’agit pas d’une production agricole. D’où l’idée de créer une société commerciale », confirme Jean-Michel Laigneau.

Trois ans pour concrétiser le projet

Les formalités administratives sont très nombreuses pour faire aboutir un tel projet. Il aura fallu presque trois ans à la SAS Agrisolaire 28 pour que l’idée de départ se concrétise par la construction d’un premier bâtiment en janvier 2022.

Tout a débuté en 2019, lors de visites organisées par la FNSEA Centre-Val de Loire dans des exploitations agricoles de l’Indre s’étant regroupées en SAS. Convaincus par l’intérêt de mutualiser les démarches et d’investir collectivement, les 14 agriculteurs d’Eure-et-Loir décident à leur tour de se lancer dans l’aventure. Au printemps 2020, ils se consacrent à une approche de l’étude dans sa globalité. En juin 2020, deux appels d’offres, d’un côté pour les panneaux et de l’autre pour les bâtiments, sont lancés. « Finalement, nous avons pu les regrouper, car le fournisseur du bâtiment travaillait avec celui des panneaux », précise Jean-Michel Laigneau.

Entre décembre 2020 et février 2021, les demandes de permis de construire au nom de chaque associé sont déposées et la SAS Agrisolaire 28 est officiellement créée.

Un fonctionnement cadré pour rassurer les financeurs

Le comité de direction, composé de quatre associés, gère les relations avec les financeurs. Ces derniers imposent de définir les principes de fonctionnement de la SAS : « nous avons établi un règlement intérieur entre associés », précisent David Eymard et Jean-Michel Laigneau. L’idée est de donner une ligne directrice pour anticiper certaines problématiques comme la dégradation du bâtiment, fixer des règles comme le respect de « l’objectif d’optimisation de la production d’électricité » et pour « responsabiliser tout le monde vis-à-vis de la société ».

Chaque associé est tenu au respect du règlement intérieur, tandis que le comité de direction assume la charge de travail conséquente que représente le pilotage d’un tel projet. « Une fois par semaine nous organisons une réunion en visio. Chaque membre du comité de direction est référent des associés d’un secteur géographique donné », expliquent les deux agriculteurs.

Tous les associés peuvent s’impliquer en participant à des réunions plénières, qui se déroulent sur le terrain ou en visio et apportent un aperçu de l’avancée des travaux. C’est l’occasion d’évoquer les situations problématiques ou certaines thématiques, comme l’assurance. Sur ce point, chacun doit en effet assurer le contenu de son bâtiment. La SAS se charge d’assurer les panneaux et le bâtiment. En ce qui concerne l’entretien des installations, un contrat de maintenance apporte « une sérénité » par rapport aux onduleurs.

À ce jour, les constructions se poursuivent chez les associés : le dixième bâtiment s’achevant fin février 2023, un an après le premier. Cinq sont d’ores et déjà raccordés au réseau. « Il a fallu débourser 120 euros le mètre linéaire pour le raccordement », chiffrent Jean-Michel Laigneau et David Eymard. Fin 2023, tous les bâtiments devraient être opérationnels, même si les associés de la SAS « ne maîtrisent pas le délai de mise en production par les deux acheteurs d’électricité que sont Enedis et Synelva ».

Quatre conseils pour créer un projet photovoltaïque en collectif

Claudia Huard, chargée de projets à la FNSEA Centre-Val de Loire, insiste sur les points clés à prendre en compte avant de se lancer dans une SAS.

1. Privilégier cette structuration pour l’achat de bâtiments neufs plutôt que de la rénovation, pour des raisons d’équité entre associés ;

2. Identifier un ou plusieurs leaders dans le groupe ;

3. Se former au fonctionnement d’une centrale photovoltaïque ;

4. Ne pas minimiser la charge administrative : il faut en moyenne un an et demi entre la signature des devis et la mise en place de la centrale. Des délais sont à prévoir pour : le démarchage des fournisseurs et des banques, l’instruction pour le permis de construire (trois à quatre mois), la demande de raccordement, l’autorisation de construction, le devis par l’acheteur d’électricité (trois mois).

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