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Foncier agricole : vers quelles solutions de portage se tourner pour s’installer ?

De multiples solutions existent pour se délester du portage du foncier quand on veut s’installer en agriculture. Ces dispositifs s’adressent notamment aux personnes non issues du milieu agricole pour qui l’accès au foncier est un frein important. Comment ces dispositifs fonctionnent-ils et à quels types de projets sont-ils destinés ? Tour d’horizon.

Paysage agricole, parcelle de cultures
La FNSafer dénombre une trentaine d’opérateurs « sérieux » qui proposent des solutions de portage foncier.
© Freepik

Le défi du renouvellement des générations en agriculture impose de trouver des solutions de portage foncier pour permettre à des jeunes de s’installer à la tête des exploitations. C’est un enjeu pour tous les futurs installés, mais en particulier pour les personnes non issues du milieu agricole (Nima). « Les descendants d’agriculteurs peuvent reprendre l’exploitation progressivement au travers du rachat des parts sociales. Dans ces cas, l’accès au foncier ne pose pas trop de problèmes », remarque Jean-Baptiste Millard, directeur général d’Agridées, lors d’un webinaire organisé par la Safer Occitanie le 19 octobre. Ce n’est pas le cas des porteurs de projets qui ne viennent pas du monde agricole. « C’est par la location de terres et non par l’acquisition qu’ils vont pouvoir mettre le pied à l’étrier », souligne le responsable.

Dans un rapport paru en 2023, le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) précise que le portage foncier consiste à mettre à disposition d’un exploitant (individu, société…) par un propriétaire foncier (individu, indivision, société foncière, collectivité, associations, coopératives…) des biens agricoles, soit en location (baux ruraux en fermage ou métayage), soit par convention d’occupation précaire (Safer, collectivités).

Des solutions de portage avec ou sans possibilité de racheter les terres

Avec un peu plus de 50 % de la surface agricole utile française exploitée en fermage (Agreste, recensement agricole 2020), la détention du foncier par un propriétaire qui le met à disposition d’un fermier reste de loin la solution de portage la plus répandue. Au côté de ce schéma traditionnel, de nombreux dispositifs existent. La Fédération nationale des Safer (FNSafer) dénombre une trentaine d’opérateurs « sérieux » qui proposent des solutions de portage foncier avec ou sans possibilité pour l’agriculteur de racheter les terres.

Le foncier peut être détenu en propriété par des personnes morales avec une volonté d’orienter l’agriculture concernée. C’est le cas de Terre de liens qui installe des porteurs de projet en agriculture biologique, sans possibilité de racheter le foncier. « C’est la foncière de l’association au niveau national qui détient les terres et qui les met à disposition du fermier à travers un bail environnemental qui lui offre une sécurité tout au long de sa carrière », explique Thierry Lemaire, administrateur et bénévole à Terre de liens Île-de-France. Le financement s’appuie sur l’épargne solidaire de citoyens.

Il existe ensuite tout une gradation de solutions de portage temporaire. Le dispositif à la durée la plus courte est le stockage de propriété par la Safer pendant un ou deux ans pour permettre à un jeune de ne pas rater une opportunité foncière mais en lui laissant le temps de préparer son projet avant de s’installer.

Le portage temporaire pour différer la charge de l’acquisition de foncier

Certaines structures sont des émanations de collectivités territoriales comme la Foncière Occitanie, créée en juin 2022. Son actionnariat est principalement public (Arac Occitanie, Safer, chambres d’agriculture et partenaires bancaires). « On s’adresse aux porteurs de projet qui ne pourraient pas s’installer sans solution de portage temporaire pour au moins une partie du foncier », explique Emmanuelle Laganier, responsable aménagement et foncier agricole à l’Arac Occitanie. La foncière a vocation à acheter temporairement les terres (fonds propres et emprunts) qui sont ensuite mises à disposition de l’agriculteur via un bail Safer pour une durée de quatre à neuf ans. Passé ce délai, l’agriculteur doit racheter les terres au prix initial d’achat par la foncière. Le temps du bail, il doit aussi s’acquitter d’une redevance foncière pour les frais de portage. Le montant maximum d’achat de foncier pour un projet est de 150 000 euros.

Il y a aussi des portages assurés par des organismes bancaires : Volney bocage ou Starterre agri (Crédit mutuel) avec des durées de portage de cinq à neuf ans. Là encore, la logique est de soulager la charge foncière au départ avec une option d’achat. On peut aussi citer des sociétés de l’économie sociale et solidaire comme Printemps des terres ou Fermes en vie (Feves).

Vers la création de groupements fonciers agricoles d’investissement ?

Dans ce paysage, la société Terrafine, créée en 2017, propose un schéma intermédiaire. Le dispositif s’appuie sur le démembrement de propriété. À travers sa foncière, Terrafine achète une partie de la propriété foncière qu’elle reloue ensuite au cédant via un bail cessible. « Notre cheval de bataille est de promouvoir la logique économique plutôt que la logique patrimoniale au sein de l’entreprise agricole, explique Jean-Jacques Gaudiche, cofondateur de Terrafine. L’agriculteur a la possibilité de racheter le foncier à son rythme, sans que cela soit une obligation, il peut rester locataire. »

Parmi les annonces de la future loi d’orientation agricole (LOA) figure la possibilité de créer des groupements fonciers agricoles d’investissement (GFAI) dans lesquels les Français pourront investir leur épargne pour soutenir l’acquisition de foncier agricole par les agriculteurs. « Pour relever le défi du renouvellement des générations, il n’y aura pas de solutions uniques pour porter le foncier, résume Hervé Flament, directeur général adjoint de la Safer Occitanie. À l’avenir, on peut imaginer des montages pluri-opérateurs pour soutenir l’installation. »

Bientôt un nouveau fonds pour accompagner les installations

La FNSafer compte s’appuyer prochainement sur le fonds Élan pour accompagner les installations. Elle attend l’engagement de l’État pour lancer concrètement le dispositif. Le fonds achètera le foncier et le mettra à disposition de l’agriculteur (bail rural à long terme) avec une option d’achat entre la 10e et la 30e année. « C’est du portage moyen-long terme pour donner de la visibilité à l’agriculteur qui s’installe avec une garantie que le foncier ne lui échappera pas », avance Nicolas Agresti, directeur du service études, veille et prospective à la FNSafer.

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