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Betteraves : le désherbage localisé, une solution efficace pour baisser les IFT

Opter pour le désherbage localisé en betteraves permet des économies substantielles en herbicide. Il faut toutefois accepter pour cela des investissements en matériel et en temps passé, du fait du recours nécessaire au binage.

À l'aide de sa rampe 36 rangs achetée d'occasion, Benjamin Royer applique tous ses traitements herbicides en localisé sur betteraves, à l'exception du premier en cas d'infestation de renouées. © J. Guichon
À l'aide de sa rampe 36 rangs achetée d'occasion, Benjamin Royer applique tous ses traitements herbicides en localisé sur betteraves, à l'exception du premier en cas d'infestation de renouées.
© J. Guichon

Dégager du résultat tout en réduisant l’usage des produits phytosanitaires lorsque c’est possible : pour atteindre ce résultat, cinq exploitations marnaises engagées dans le réseau Dephy se sont lancées dans le désherbage localisé en betteraves. Et cela fonctionne, à condition d’accepter certaines contraintes. « Le désherbage en localisé est une solution, mais c’est une technique très dépendante des conditions météo et qui nécessite des investissements en matériel et en temps", explique Sylvain Duthoit, conseiller à la chambre d’agriculture de la Marne et animateur du réseau des fermes Dephy. 

Depuis 2015, au sein du groupe Dephy, les IFT herbicides ont été réduits de 30 %, pour atteindre actuellement 1,4 en moyenne. « C’est compliqué de réduire les IFT herbicides car l’efficacité d’un désherbage dépend de nombreux paramètres dont le système de production et les cultures dans la rotation. C’est un poste qui requiert une charge de travail importante », souligne le conseiller.

Le recours au désherbage localisé est une piste intéressante. Elle peut être mise en œuvre de façon plus ou moins radicale, sur des semis à 45 centimètres d’écartement entre rang. La stratégie de Thierry Collin consiste à traiter en localisé les trois premiers passages. « Je clôture le programme avec un traitement en plein pour la rémanence. Pour les passages précédents, je dispose d’une rampe traînée de 24 rangs et d’une cuve de 1 200 litres. Avec un collègue, nous avons nous-mêmes conçu le principe pour 5 000 euros, main-d’œuvre non comprise. Je traite très tôt le matin à 80 l/ha avec des buses à 40°. » Depuis la mise en place de cette combinaison, il y a huit ans, Thierry Collin a réduit ses IFT herbicides de 50 %.

 

 

 

Chez Benjamin Royer, agriculteur à La Chapelle-Lasson, le raisonnement est quelque peu différent. Il y a 20 ans, il a investi dans une rampe d’occasion de 36 rangs, pour un montant de 2 000 euros. « Je réalise tous mes passages en localisé. J’applique un tiers de la dose herbicide par rapport à la dose conseillée. Cela me coûte 15 euros par hectare du passage. Je traite uniquement le premier passage en plein en cas d’infestation de renouées liseron pour les contrôler dès le départ. »

« Des économies d’herbicides de 60 à 70 euros/ha »

Le désherbage en localisé peut également s’effectuer avec un pulvérisateur traîné classique avec des buses espacées de 50 centimètres. Cette pratique s’effectue sur des semis à 50 centimètres d’écartement entre rang. C’est le cas chez Dominique et Christophe Royer, agriculteurs en Gaec à Faux-Fresnay, qui disposent d’un pulvé Amazon dernière génération, avec réglage automatique de la hauteur de rampe. Ils ont investi 600 euros dans des buses orientées à 60°. « Grâce à l’inclination des buses, nous pouvons décider de traiter en plein ou en localisé selon les conditions au moment de l’application. En alternant du généralisé avec du localisé, nous réalisons des économies de charges d’herbicides de l’ordre de 60 à 70 euros par hectare. »

Initié depuis quelques années au désherbage localisé avec une rampe poussée, Philippe Decorne, agriculteur à Mourmelon-le-Grand, réfléchit également à traiter avec son pulvé traîné avec des buses tous les 45 centimètres. Il considère que « le désherbage en localisé nécessite de passer du temps pour biner, ce qui représente un coût non négligeable. À l’heure où la rémunération des betteraves a tendance à baisser, je m’interroge sur la recherche d’un compromis pour réduire les produits phyto mais également le temps de travail consacré à la culture ».

Les agriculteurs s’accordent sur l’intérêt du traitement en localisé pour réduire les quantités d’herbicides. Revers de la médaille : ce système est plus long à mettre en œuvre et il nécessite du matériel spécifique ou des adaptations particulières. « Un désherbage abouti dépend certes de l’efficacité du traitement en localisé mais aussi de la réussite du binage en interrang », prévient Sylvain Duthoit. L’intervention rapide et régulière de la bineuse jusqu’à la fermeture des rangs est une condition sine qua none de réussite. Deux à quatre passages sont parfois nécessaires pour obtenir un résultat satisfaisant. « Le binage est essentiel. Il constitue 80 % de la réussite du désherbage », confirme Thierry Collin. D’après les données du groupe Dephy, le débit de chantier de binage s’élève entre 2 et 4 ha/h, selon le stade des betteraves. Ces résultats sont variables en fonction du matériel utilisé et de la largeur de travail.

Sylvain Duthoit précise que pour réduire les charges en herbicides sur la culture de la betterave, il faudrait tendre vers du 100 % localisé. « Les systèmes intermédiaires où les traitements en localisé et en plein se succèdent sont moins rentables car ils engendrent des investissements en matériel plus longs à amortir. » Sur une campagne, il faut compter deux heures par hectare en 100 % localisé (traitement et binage compris) contre 25 minutes par hectare en traitement en plein. « L’économie de produits compense, en partie, le coût de matériel. Elle rémunère le temps passé et permet une réduction de charges », estime l’animateur du groupe. Sur la campagne 2020, les fermes Dephy de la Marne ont réalisé des gains de 50 à 70 euros/ha d’herbicides grâce au traitement en localisé, soit une charge herbicides inférieure à 100 euros/ha.

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