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Légumineuses : les défis de la filière légumes secs

La production de légumes secs est en forte progression en France. Si les filières se structurent peu à peu, des solutions techniques doivent encore être trouvées pour stabiliser les rendements.

En 2020, près de 100 000 ha en France étaient consacrés aux légumes secs, principalement aux lentilles, pois secs, haricots secs et pois chiches. Depuis quelques années, la production est en forte croissance, notamment en bio, pour accompagner le développement des menus végétariens à l’école et avec des atouts agronomiques pour les producteurs par la fixation de l’azote atmosphérique et pour casser le cycle des ravageurs des autres cultures. « De 2016 à 2020, les surfaces de légumes secs bio en France sont passées de 8 700 ha pour 1 045 producteurs à 28 000 ha pour 2 620 producteurs », précise Goulven Oillic, d’Initiative bio Bretagne.

Une contrainte pour le développement des surfaces est le matériel spécifique nécessaire, pour la culture (semoirs monograines, bineuses, moissonneuses-batteuses dédiées, écimeuses…) et surtout pour le séchage, le tri et le stockage des graines. Peu à peu, les filières se structurent toutefois, avec une mutualisation des moyens (Cuma, ETA…) et des investissements en séchage, tri, stockage, conditionnement, surgélation, réalisés par des opérateurs en place ou nouveaux.

Limiter l’impact des aléas climatiques

Une difficulté aujourd’hui est aussi que les rendements sont de plus en plus aléatoires. « La Cavac met en place des surfaces de légumes secs selon ses marchés, sur la base de rendements moyens, explique Alban Le Mao, responsable Filières bio à la Cavac, qui commercialise 30 000 tonnes de lentilles, haricots secs et pois chiches. Puis la production subit les aléas climatiques, qui peuvent conduire à de la surproduction, comme au printemps 2021, ou à de la sous-production. Et avec le changement climatique, les aléas sont de plus en plus fréquents et importants et la programmation de plus en plus difficile. » Un enjeu majeur pour les opérateurs est donc de financer des stocks pour remplir leurs engagements.

« Nos clients veulent des garanties de volumes, constate Vincent Seyeux, gérant d’Agro-Logic, en Mayenne, qui récolte, transforme et commercialise des légumes secs bio pour une centaine d’agriculteurs exploitant 2 000 ha de légumineuses. Nous devons travailler des partenariats entre régions ou départements pour ne pas tous faire des stocks les mêmes années. » La Cavac réfléchit aussi à répartir les périodes de semis entre le printemps et l’automne pour limiter les risques liés à la météo. L’irrigation est également importante pour sécuriser la production. Au GIE Légumes secs bio de Vendée, qui réunit dix fermes produisant 500 tonnes par an de lentilles vertes, haricots et quinoa, toute la production est irrigable. « Mais ce n’est pas simple, car il y a des enjeux sociétaux et environnementaux autour de l’eau », constate Simon Berland, cogérant du GIE.

Problèmes croissants de bruches

Un problème croissant avec le développement des surfaces est aussi celui des bruches, coléoptères ravageurs des légumineuses, qui pondent leurs œufs sur les gousses et dont les larves se développent dans les graines. « Les dégâts ne se voient pas forcément à la récolte, précise Zoé Le Bihan, de Terres Inovia. Mais au tri ou en cours de stockage, on retrouve des graines avec des larves ou des adultes ou des graines vidées de leur contenu. Des traitements après récolte sont possibles, mais délicats. La congélation ou la mise sous vide peuvent aussi être utilisées pour tuer les bruches, mais nécessitent des équipements supplémentaires. Dans tous les cas, la présence de bruches peut entraîner des pénalités pour le producteur. »

Les filières, notamment en lentille, étant de plus en plus impactées par ce ravageur, des travaux ont été engagés par Terres Inovia avec l’Anils (Association nationale interprofessionnelle des légumes secs) et la Fnams (Fédération nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences) pour trouver des solutions contre les attaques de bruches. De 2018 à 2020, des piégeages ont été réalisés dans les six principaux bassins de production de lentille. « Les attaques ont été variables selon les années, rapporte Zoé Le Bihan. Mais en moyenne, 12 % des graines étaient bruchées. Le Berry a été la région la plus touchée, suivi de la zone Charente-Maritime Vendée, puis de l’Yonne et du Gers. Le bassin du Puy a par contre été très peu impacté, contrairement à ce qui était attendu au regard de l’historique de production de la lentille, peut-être du fait de l’altitude ou de températures plus basses en hiver. » L’espèce largement majoritaire (99,8 % des piégeages) a été Bruchus signaticornis, une petite bruche spécifique de la lentill

La piste variétale

Des essais ont aussi été mis en œuvre pour tester différentes solutions de biocontrôle ou de produits phytosanitaires. « Aucune n’a montré d’efficacité contre Bruchus signaticornis. » En 2022, une autre piste, celle de kairomones, est donc étudiée par Terres Inovia avec un réseau de coopératives et Agriodor, distributeur de kairomones proposées par De Sangosse. « Le but est d’attirer les bruches et de les piéger, explique Zoé Le Bihan. Le protocole comprend 20 pièges/ha, entraînant un surcoût de 120 €/ha. » Une autre piste encore est la piste variétale. Un projet de recherche, ResiLens, porté par INRAE, a été engagé en 2019 pour évaluer une collection de ressources génétiques de lentilles.

Le but est d’y rechercher des sources de résistances variétales aux bruches et aux pourritures racinaires, notamment Aphanomyces euteiches, qui pose également des problèmes à la filière. Un autre programme, Ascolup, porté par Terres Inovia, a été engagé en 2020 pour acquérir des connaissances sur l’ascochytose du pois chiche et l’anthracnose du lupin, maladies transmissibles par les semences et qui peuvent avoir un impact très fort sur les rendements. « Il y a aujourd’hui une belle dynamique des filières légumes secs pour apporter plus de connaissances et de solutions aux producteurs, avec depuis 2021 l’accompagnement financier de Cap Protéines », souligne Zoé Le Bihan.

Développement dans toutes les régions

 

Les essais se multiplient sur les légumes secs, avec depuis 2021 l’appui financier de Cap Protéines. © G. Riquet

En 2020, en France, 35 500 ha étaient consacrés à la production de lentilles, 30 000 ha aux pois secs, 5 000 ha aux haricots secs et 23 500 ha aux pois chiches. En bio, sur les 28 000 ha de légumes secs cultivés pour l’alimentation humaine, 66 % sont consacrés aux lentilles, 26 % aux pois chiches, 5 % aux haricots et 3 % aux autres légumes secs (pois cassés, pois de consommation, fèves, flageolets…). Et si la production est importante surtout sur le bassin méditerranéen et dans le Sud-ouest, des filières se développent aujourd’hui dans la majorité des régions.

En Vendée, où la production de haricots blancs pour la conserve, importante dans les années 1960, avait fortement diminué, concurrencée par l’importation, une filière s’est relancée autour de la Mogette de Vendée Label Rouge. La Cavac, qui a investi dans des équipements de tri, stockage, conditionnement, précuisson et surgélation, produit ainsi aujourd’hui 3 500 tonnes de haricots (1/3 en bio), 25 000 tonnes de lentilles (50 % en bio) et 1 000 tonnes de pois chiches (70 % en bio) et veut encore développer la production.

 

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