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Légumes sous abri : comment favoriser les auxiliaires pour la gestion des pucerons

Le projet Dephy Expé Cosynus vise à favoriser la régulation naturelle des ravageurs et l’autoproduction d’auxiliaires pour réduire les traitements dans les systèmes de culture sous abri.

<em class="placeholder">La technique de l’aménagement d’infrastructures agroécologiques permet de favoriser des auxiliaires présents naturellement dans l’environnement de la serre.</em>
La technique de l’aménagement d’infrastructures agroécologiques permet de favoriser des auxiliaires présents naturellement dans l’environnement de la serre.
© GL

Fini les solutions phytosanitaires uniques. Désormais, en réponse à la demande sociétale et réglementaire de protection des citoyens et de l’environnement, la protection contre les bioagresseurs est traitée par une gestion complète de l’aménagement de l’exploitation – intra et interparcellaire – et par une adaptation globale des pratiques culturales.

Le but ? Optimiser le service rendu par la biodiversité fonctionnelle et abaisser l’indice de fréquence de traitement (IFT), tout en améliorant les performances de l’exploitation. Sauf que… La rotation type des cultures sous abri pratiquée dans le sud de la France et comprenant la séquence « solanacée-salade-cucurbitacées-salade » engendre notamment des pertes importantes et/ou des traitements répétés. En cause la pression des ravageurs, aux premiers rangs desquels les pucerons.

Optimisant le service des auxiliaires

Aussi, le projet Cosynus – pour Conception de systèmes maraîchers favorisant la régulation naturelle des organismes nuisibles – met en œuvre la reconception du système de production par l’aménagement d’infrastructures agroécologiques favorisant les auxiliaires. Il s’agit même du levier principal afin de limiter la pression des bioagresseurs. Le concept a été déployé dans un essai visant à lutter contre les pucerons sur concombres et aubergines. Les aménagements sont à la fois multiples et combinés : bandes fleuries, zones réservoirs, haies, gestion des abords, plantes relais…

Des stratégies optimisant le service rendu (transfert actif d’auxiliaires) sont également évaluées dans le cadre de ce projet, et complétées si nécessaire par des apports d’auxiliaires exogènes ou des traitements de biocontrôle. Trois sites expérimentaux complémentaires les uns des autres ont été choisis : un suivi par le Groupe de recherche en agriculture biologique (Grab), un suivi par l’Association provençale de recherche et d’expérimentation légumière (Aprel) et un dernier suivi par le CTIFL, unité de Brindas. Anthony Ginez (Aprel) et Pierre Lasne (CTIFL) présentaient en janvier dernier quelques premiers résultats de ce projet qui prend fin cette année.

Des transferts passifs observés sur aubergines

Plusieurs leviers ont ainsi été mis en œuvre chez Frédéric Bon, maraîcher à Châteaurenard dans les Bouches-du-Rhône, avec un double objectif : utilisation d’infrastructures agroécologiques en relais d’auxiliaires autoproduits sur l’exploitation. « À l’extérieur, nous avons ainsi semé des bandes fleuries et maintenu des banquettes herbeuses auprès de haies composites, installées après un diagnostic. Nous avons aussi installé des gîtes à chauve-souris et planté des zones réservoir d’auxiliaires », détaille Anthony Ginez. Dans les abris, des bandes fleuries (souci, lotier, achillée, alysse sur le rang pour enrichir les plantes mellifères) ont été mises en place sur le rang, aux côtés de plantes relais et des céréales semées à l’automne au pied des bâches, sans oublier des zones réservoir dans la serre, « avec une gestion de l’enherbement entre les serres également ».

« Nous avons constaté que Macrolophus était bien attiré par les bandes fleuries. Sur alysses, nous avons compté 25 % de ravageurs, mais ils sont restés en place et ne se sont pas transférés sur la culture », complète Pierre Lasne. Dans les bandes de céréales, Aphidius a été aspiré, avec un pic le 13 mai (6 individus par mètre carré). Mieux, « on retrouve un pic d’auxiliaires au même moment que le pic de pucerons. Ce qui prouve que l’on a bien un transfert passif », relance Anthony Ginez, c’est-à-dire sans intervention humaine, de parasitoïdes (momies dorées) récupérées notamment sur laiterons et aubergine, ces momies dorées ayant été posées artificiellement (transfert actif) deux semaines avant, à raison de 0,5 individu par mètre carré.

Un pic de parasitoïdes avant le pic de pucerons

« Nous retrouvons dans le même ordre d’idée des Coccinellidae transférée artificiellement et récupérées dans les bandes fleuries de muscari (0,25 individu par mètre carré) », précise Pierre Lasne. Les deux spécialistes constatent donc un pic de parasitoïdes une à deux semaines avant le pic de pucerons. « C’est l’objectif recherché : une présence en amont qui se poursuit et s’installe en parasitant les pucerons qui arrivent dans la foulée. » Le transfert actif permet de passer de 70 individus de pucerons à 0 en deux semaines. « En 2021, nous avons eu un bon transfert sur aubergines, tout en permettant des économies évaluées à 0,08 euro par mètre carré par culture », ont-ils calculé.

Résultats encourageants aussi sur concombre

« La technique est intéressante car elle apporte une réactivité forte des auxiliaires adaptés à la serre, Aphidius et Coccinellidae étant initialement présents dans l’écosystème de la serre et ne nécessitant donc pas d’apports extérieurs », précise Anthony Ginez. Ainsi, grâce à cette technique, les populations de pucerons ont baissé entre 2020 et 2022 sur concombres, avec un ratio de présence divisé par 10 (pic observé à 35 individus par feuille en 2020 contre 2,5 individus par feuille en 2022), avec une baisse des coûts de stratégies liées à la protection des cultures. Par ailleurs, les rendements agronomiques ont été améliorés, en particulier le rendement commercialisable de concombres, passé de 4,58 kilos par mètre carré en 2020 à 5,15 kilos par mètre carré en 2022, essentiellement en raison de la réduction du taux de déchets de 37 % (moins de dégâts liés aux ravageurs).

Avantages - Inconvénients

Des avantages…

Augmentation de la diversité et de l’abondance des auxiliaires.

Réduction des coûts liés à la protection biologique intégrée.

Davantage de réactivité en cas d’attaque.

Action préventive sur le long terme.

Économies d’intrants par réduction des traitements.

… et des inconvénients

Attention aux choix des espèces semées.

Nécessité d’assurer une surveillance attentive dans la serre.

Stratégie globale à l’échelle de l’exploitation, à intégrer à l’itinéraire en complément d’autres mesures, et qui dans tous les cas n’offre pas de garantie de résultats systématique.

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