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Congrès Légumes de France : « Sans la mondialisation, vous ne pourriez pas faire votre boulot », lance Jean-Marc Jancovici

Invité à animer une conférence lors du congrès Légumes de France, le 5 décembre à Arras, l’expert Jean-Marc Jancovici a sensibilisé le public à la dépendance de l’agriculture vis-à-vis de l’énergie mais aussi de la mondialisation.

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De ses propres mots, Jean-Marc Jancovici s’est fait « un peu taquin » face au public qui comptait notamment des maraîchers.
© Légumes de France

Pour son 68e congrès, coorganisé avec l’Apef (association des producteurs d'endives de France), Légumes de France a invité Jean-Marc Jancovici à intervenir sur le thème Vers un maraîchage bas carbone, résilient et prospère, le 5 décembre à Arras. L’expert en énergie et climat, qui préside The Shift Project, ne s’est pas spécifiquement exprimé sur le maraîchage, car les travaux menés depuis deux ans par son think tank sont centrés sur les grandes cultures et l’élevage. Il a en revanche rappelé les liens qui se sont tissés entre agriculture, énergie et mondialisation.

« Le gros du boulot est fait par les machines »

De ses propres mots, Jean-Marc Jancovici s’est fait « un peu taquin » face au public qui comptait notamment des maraîchers. « Un agriculteur moderne produit en moyenne deux cents fois ce que produisait un agriculteur il y a deux siècles, explique-t-il, car ce n’est plus vous qui produisez, le gros du boulot est fait par les machines - même si quelques personnes travaillent encore ici et là. » Il décrit les agriculteurs actuels comme des pilotes. « Vous pilotez les tracteurs, les serres, les appareils de chauffage et autres », liste-t-il.

Une dépendance à la mécanisation et à l’énergie

« Le monde agricole est devenu extrêmement dépendant de la mécanisation, c’est-à-dire de l’énergie », rappelle Jean-Marc Jancovici. Il cite les nombreuses machines nécessaires pour nous nourrir, dont celles utilisées dans les champs ou en dehors, qui contiennent de l’acier fabriqué avec du charbon (tracteurs, armatures de serres, usines agroalimentaires, etc.), ou encore le pétrole qui fait avancer les tracteurs. « Si vous utilisez des engrais azotés, ils ont été fabriqués à partir de gaz », ajoute-t-il. Sans oublier les camions, « les globules rouges de l’économie », compare-t-il, qui rendent possible entre autres la spécialisation des bassins de production, et que l’on ne pourra jamais totalement remplacer par des trains.

« Sans la mondialisation, vous ne pourriez pas faire votre boulot »

Alors que les effets néfastes de la mondialisation sont régulièrement pointés du doigt par les producteurs français de fruits et légumes, Jean-Marc Jancovici a insisté sur la forte dépendance de l’agriculture tricolore à la mondialisation. « À l’amont, sans la mondialisation, vous ne pourriez pas faire votre boulot, affirme-t-il. Par exemple, vous n’auriez pas de pétrole car il n’y a presque pas de pétrole en France. Pas de gaz, donc pas d’engrais. Pas de plastique (pétrochimie) or il y a du plastique dans toutes les machines agricoles. Pas de gaz dans les fours à verre français, donc pas de verre pour les serres, etc. »

Les panneaux photovoltaïques, une solution pour les endiveries ?

À la fin de la conférence, des agriculteurs ont témoigné, dont Philippe Bréhon, producteur d’endives et président de l’Apef. « Avec la guerre en Ukraine et la crise énergétique, la facture d’électricité a été multipliée par trois voire quatre, se souvient-il. Cela nous a poussés à encore améliorer notre performance énergétique. » Ainsi, alors que des efforts avaient déjà été faits sur son endiverie avant la crise, tels que « la récupération de chaleur sur les équipements frigorifiques », des panneaux photovoltaïques ont été installés sur environ la moitié de la surface de l’endiverie. « J’autoconsomme quasiment la totalité de ma production solaire et cela fait baisser ma facture énergétique de 18 % environ », chiffre Philippe Bréhon.

Interrogé sur le caractère vertueux ou non d’une telle installation photovoltaïque, Jean-Marc Jancovici, connu pour ses positions pro-nucléaires, répond qu’il est « très difficile » d’apporter une réponse courte à cette question. Il souligne qu’il s’agit, dans cet exemple, d’une autoconsommation connectée au réseau, ce qui pose la question de « ce que l’on demande au réseau de faire au moment où le soleil n’est pas là ». « À l’échelle du pays, ajoute-t-il, on peut s’interroger sur la pertinence de rajouter des panneaux, donc un investissement supplémentaire, juste pour éviter d’utiliser un truc à coûts fixes déjà disponible – le nucléaire. » Néanmoins, si la France est excédentaire en électricité et exportatrice, il faut garder en tête les défis futurs d’électrification (transports, industries, etc.). « En tout cas, ce n’est pas aussi simple que de dire "cela se joue à mon échelle parce que les panneaux sont chez moi", pointe le conférencier. Cela se joue à une échelle plus large. » Plus que jamais, les enjeux agricoles sont imbriqués avec d’autres grands enjeux sociétaux.

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