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Des caillebotis pour les vaches, pour ne pas remettre en cause l’autonomie

Le Gaec d’Éole utilise à peine 12 tonnes de paille-hiver pour les seules cases à veaux et cases de vêlage d’une stabulation « logettes et caillebotis » abritant 60 vaches suitées. Un bâtiment onéreux mais économe en frais de fonctionnement et temps de travail.

À Brion, petit village situé sur l’Aubrac aux confins de la Lozère et du Cantal, il est un principe que Damien Pignol n’entend pas remettre en cause dans le fonctionnement du Gaec dans lequel il est associé avec sa mère. C’est celui de l’autonomie. Qu’il s’agisse de foin ou de paille, l’objectif est de limiter au maximum les achats et de coupler cet impératif à la volonté de réduire en période hivernale le temps passé aux soins des bovins pour se consacrer davantage à leur surveillance.

Le siège de l’exploitation est à 1 220 mètres et une bonne partie des surfaces utilisées sont à une altitude supérieure. Seule la culture du seigle pourrait éventuellement être envisagée sur de rares parcelles, sans être certain de pouvoir le battre chaque année. La SAU est donc entièrement consacrée à l’herbe et les stocks fourragers presque exclusivement basés sur le foin complété par un peu d’enrubannage.

Lire aussi : Les atouts du caillebotis pour les vaches allaitantes

Jusqu’en 2018, les 75 mères conduites pour une bonne part en croisement avec une forte proportion d’IA étaient hivernées dans deux bâtiments entravés situés à 3 kilomètres de distance. L’incendie de l’un d’eux s’est traduit par une location provisoire avec la nécessité de le remplacer au plus tôt. Même si elle était ancienne, l’étable entravée victime des flammes demeurait fonctionnelle. « D’ailleurs, alors que j’avais écarté d’emblée la construction d’une stabulation 100 % paillée, je me suis à plusieurs reprises interrogé sur le fait de reconstruire une étable entravée », souligne Damien Pignol. Avant d’envisager quoi que ce soit, le jeune éleveur a visité différents bâtiments récents situés près de chez lui tout en bénéficiant des conseils de son frère, inséminateur. « Au final, j’ai fait un 'copier-coller' d’une stabulation libre caillebotis plus logettes d’un collègue. Le principe me plaisait. Le fait qu’il en soit en tout point satisfait a conforté mon choix. » Le terrassement a été réalisé en mars 2019 et le bâtiment était prêt en novembre. « Compte tenu de ces délais tendus, j’ai confié à des entreprises l’essentiel du travail en dehors du montage des tubulaires. »

60 vaches pour quatre cases

Au final, la stabulation totalise 1 356 m2 de surface couverte dont un bureau-local sanitaire de 22 m2 et permet d’hiverner 60 vaches suitées réparties en quatre cases (2x12 et 2x18 places). « J’ai 60 places aux cornadis mais un peu moins de logettes que de cornadis. Cela ne perturbe guère les animaux. » Les 10 parcs à veaux (5 m x 5 m) également utilisés comme parcs de vêlage en début de campagne sont positionnés à l’avant des logettes permettant aux vaches de surveiller leur progéniture pendant qu’elles ruminent. Ces cases sont bordées par un large couloir (4 m). Le paillage est manuel mais aisé avec des bottes positionnées dans le couloir bien avant la rentrée des animaux. L’an dernier 24 bottes ont permis de passer l’hiver sans problème avec un paillage généreux pour des vêlages très groupés qui démarrent mi-décembre avec un pic en janvier. « J’ai curé les cases une seule fois fin mai, juste après la mise à l’herbe. » Les veaux ont libre accès aux cases des mères seulement deux heures par jour, matin et soir. Mais ce n’est pas compliqué de les faire rentrer d’autant qu’ils ont un peu de concentré et surtout du très bon foin à libre disposition. « Les caillebotis ne les empêchent pas de gambader. C’est même parfait pour aider à faire descendre les bouses dans la fosse. » Pour autant, Damien Pignol ne les nettoie jamais en dehors du nettoyeur haute pression une fois les vaches à l’herbe. « En revanche je racle tous les jours quelques bouses à l’extrémité des logettes. »

Lire aussi : Bâtiment sur caillebotis : associer l’économie en paille à son confort

Ce bâtiment représente un investissement conséquent (près de 6 800 euros la place), mais une stabulation 100 % paillée aurait obligé à acheter au moins 90 tonnes de paille chaque hiver pour ces seules 60 vaches (8 kg/vache/jour pour 170 jours d’hivernage + la paille des cases à veaux). « Et actuellement sur notre zone, pas moyen de trouver une paille de qualité à moins de 120 euros la tonne livrée ! », souligne Damien Pignol qui met également en avant l’économie liée à l’absence de frais pour l’entretien de la litière, son curage puis la gestion du fumier. « Ce bâtiment m’apporte un réel confort de travail. J’en suis très satisfait. J’apprécie l’absence de poussière liée à l’absence de pailleuse et le fait de pouvoir nourrir mes animaux sans démarrer de moteur. » Le valet de ferme n’est que ponctuellement utilisé pour déposer les ballots devant les cornadis du couloir d’alimentation, lequel mesure 6,5 m de large sur 54 m de long et permet de stocker 120 boules de foin et les big bag de concentré. De quoi tenir plusieurs semaines avant de reconstituer le stock avec le foin remisé dans le hangar situé à une trentaine de mètres.

Deux heures par jour en fin d’hiver

Les vaches se sont vite habituées à utiliser les logettes. Certaines se couchent régulièrement sur les caillebotis mais cela ne les perturbe guère. Elles n’ont de toute façon auparavant jamais vécu sur des litières paillées. Seulement dans des bâtiments entravés associant béton et grilles.

La fosse a une capacité de 600 m3 et permet de tenir tout l’hiver. « Je la remplis de 35 cm d’eau en fin d’automne puis en cours d’hiver je fais tourner le malaxeur une fois par semaine. Je n’ai qu’un hivernage de recul, mais aujourd’hui je m’en voudrais d’avoir opté pour une stabulation paillée. » Tant qu’aucun veau est né, les soins aux 60 vaches peuvent être faits en une demi-heure matin et soir et surtout peuvent être réalisés très facilement par n’importe qui. « Une fois la plupart des veaux nés, je table sur une heure le matin et autant le soir. Mais j’aime aussi prendre le temps de bien observer pour déceler au plus tôt les petits problèmes. » Côté performances, les veaux étaient l’an dernier légèrement plus lourds à la mise à l’herbe. Ils bénéficient de davantage de place et l’ambiance est plus saine et confortable que dans la case du bâtiment entravé. « Ils ont malheureusement perdu en cours d’été l’avance qu’ils avaient pris au premier semestre du fait du manque d’herbe dans les estives ! », se désole le jeune éleveur.

Côté mises à la reproduction, il est trop tôt pour tirer des conclusions après seulement un hiver. Le bâtiment est équipé d’une caméra que Damien Pignol utilise surtout depuis son smartphone. « Cela me permet de surveiller les vêlages à distance mais je l’utilise au moins autant pour détecter les chaleurs. »

Caillebotis au sol et photovoltaïque sur le toit

Le prix de revient du bâtiment de Damien Pignol est d’un peu plus de 400 000 euros.

Dans les grandes lignes, ce prix se répartit entre 50 000 euros pour le terrassement, 100 000 euros pour la fosse et les caillebotis (soit à quelque chose près 10 ans de facture de paille pour une stabulation paillée accueillant le même nombre d’animaux !), 30 000 euros pour les autres maçonneries, 160 000 euros pour la charpente bois, la toiture, le bardage et les portes, 5 000 euros pour le malaxeur, 50 000 euros pour les tubulaires et 12 000 euros pour l’électricité. « L’automne dernier, j’ai rajouté 5 000 euros pour un tapis en caoutchouc sur toute la longueur des logettes. »

La mauvaise surprise est venue du terrassement. Les 12 500 m3 à déplacer avaient bien été comptabilisés. Mais il a fallu de la dynamite pour venir à bout d’énormes blocs de granit, générant un surcoût important. La volonté était de se cantonner à l’emplacement et à l’orientation initialement prévus pour plusieurs raisons. D’abord la proximité avec la maison et le hangar à foin avec également la possibilité de brancher le bâtiment sur le circuit d’adduction d’eau.

Ce choix du positionnement est aussi très lié à la volonté d’avoir un bâtiment orienté Nord-Sud dans sa longueur pour pouvoir installer du photovoltaïque sur les deux pans Est-Ouest du toit. Une première centrale de 100 KW a été positionnée au printemps 2020 sur le versant ouest et une seconde le sera dans les mois à venir sur le versant est. « Je n’avais de toute façon pas la possibilité de le positionner plein sud. Le terrassement aurait été vraiment trop conséquent." Les frais de raccordement au réseau ont pu être contenus dans la mesure où la stabulation est à 80 mètres d’un transformateur. Pour la première tranche positionnée sur le pan Ouest, la production d’électricité réalisée en 2020 se situe un peu au-delà des prévisions dans la mesure où l’année a aussi été très ensoleillée. Un bon point pour la vente d’électricité mais un mauvais pour le poids des broutards vendus en moyenne plus légers que d’habitude ! Produire de l’électricité est analysé comme une diversification des revenus et limiter les risques inhérents à une monoproduction de bétail maigre. « Je trouvais dommage que ce bâtiment ne rapporte rien une bonne partie de l’année dans la mesure où il est utilisé pour les animaux à peine 6 mois par an. » Cette production d’électricité est réalisée dans le cadre d’une SAS indépendante du Gaec.

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