« Dans les Pays de la Loire, j’ai pensé ma chèvrerie et mon élevage bio pour travailler seule »
Marlène Thibault conjugue efficacité, confort et autonomie dans sa chèvrerie bio, bien pensée pour une femme seule.







Installée depuis 2022 à Conlie (Sarthe), Marlène Thibault, 34 ans, élève 200 chèvres bio dans une chèvrerie flambant neuve, conçue pour maximiser l’efficacité… sans sacrifier sa qualité de vie. « Tout a été réfléchi pour qu’une femme seule puisse tout faire, tout en ayant une vie de famille », affirme cette ancienne conseillère bancaire reconvertie éleveuse. L’ensemble du projet a nécessité plus de 500 000 euros d’investissement, complété récemment par 100 000 euros pour la pailleuse multifonction.
Une salle de traite qui dépote
Cœur du dispositif : la salle de traite GEA en 2x24 équipée de griffes Topflow avec manchon en silicone. « Je voulais une salle de traite rapide. Moi, je fais tout en quarante minutes. Quand je me fais remplacer, la personne termine en un peu plus d’une heure », explique-t-elle. Au quotidien, la traite commence à 6 heures du matin, ce qui lui permet d’être de retour à la maison à 7h30 pour préparer les enfants pour l’école. « Je me suis organisée pour concilier vie professionnelle et familiale, explique la dynamique éleveuse. Après l’école, je reviens à la chèvrerie vers 9 heures jusqu’à 10, 11 ou 12 heures en fonction du travail. L’après-midi, je reviens vers 15h30 et j’ai tout terminé à 17 heures, douche comprise, pour être disponible pour les enfants. »
Autre pièce maîtresse de la ferme : une pailleuse EHB sur rail multifonction, conçue par un paysan aveyronnais. « Elle distribue la paille et le foin. Au lieu d’investir dans un nouveau tracteur, on a choisi l’automatisation. » Tout est conçu pour limiter la pénibilité et les manipulations mécaniques. « Je ne bricole pas. Le système doit être simple, fiable, sans besoin de bidouille », insiste-t-elle.
Un bâtiment ventilé, fonctionnel et durable
Le bâtiment principal, large de 16 mètres et long de 36 mètres, a été construit en respectant les principes de ventilation naturelle : décalage entre les toitures, faîtage ouvert de 14 centimètres, lames orientables sur les pignons. « J’ai choisi ce système après avoir lu les publications de l’Institut de l’élevage. Ce qui compte, ce n’est pas l’isolation mais la vitesse de l’air. » Pas de rideaux motorisés ni de capteurs météo : tout est manuel mais optimisé.
Des cornadis facilitent les manipulations et les soins. Pour l’hygiène, l’éleveuse a adopté une routine stricte et des tableaux expliquent le mode d’emploi dans chaque zone du bâtiment : traite, laiterie, chevrettes, chèvres… Car l’éleveuse se fait remplacer occasionnellement par sa sœur ou le service de remplacement et elle emploie systématiquement un salarié en février, au moment des mises bas. « Mon mari et mon beau-frère viennent une semaine chacun pendant nos deux semaines de mises bas, apprécie Marlène. C’est volontairement très groupé pour que l’alimentation par lot soit facilitée. »
Une ferme inspirante pour la jeune génération
L’exploitation s’étend sur 80 hectares, dont 32 hectares sont conduits en bio pour nourrir le troupeau caprin (luzerne, maïs, méteil ou prairies multi-espèces). Les terres sont cultivées par une entreprise de travaux agricoles, sous la supervision du mari et du beau-frère de Marlène. Les chèvres sortent au pâturage dès que les conditions le permettent, de début mars à fin juillet environ, avant le départ en vacances. Chaque parcelle est pâturée trois fois par an au fil avant, avec un retour tous les 35 à 45 jours, parfois plus. Pour limiter les risques de parasitisme, Marlène évite le pâturage de fin de saison et ajuste l’alimentation en conséquence.
« Ce projet de ferme caprine, je l’ai dans la tête depuis mes sept ans », raconte Marlène, qui revendique une approche rigoureuse, documentée et ambitieuse. Lauréate du prix à l’installation des Jeunes agriculteurs de la Sarthe, elle assume un modèle où l’autonomie et la qualité de vie sont au cœur du projet technique. « Je voulais que mes enfants me voient. Si un jour je perds cet équilibre, tout sera à revoir. »