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Mission d’information
Comment regagner de l’autonomie alimentaire en France ? 20 propositions des députés

Le rapport de la mission d’information parlementaire sur l’autonomie alimentaire française, adopté le 8 décembre, par la commission des affaires économiques de l’assemblée nationale émet 20 propositions pour renforcer la chaine alimentaire française.

Les députés Pascale Boyer (LREM, Hautes-Alpes) et Julien Dive (LR, Aisne).
Les rapporteurs Pascale Boyer (LREM, Hautes-Alpes) et Julien Dive (LR, Aisne) de la mission d'information sur l'autonomie alimentaire.
© Compte twitter de Julien Dive

Dans un rapport de mission d’information remis le 8 décembre à l’Assemblée nationale et adopté à l’unanimité par l’Hémicycle, les rapporteurs Pascale Boyer (LREM, Hautes-Alpes) et Julien Dive (LR, Aisne) émettent 20 propositions pour reconquérir l’autonomie alimentaire de la France. Une mission souhaitée par les Républicains, qui a duré 8 mois avec 40 personnes auditionnées, dans le cadre de la crise Covid-19. « La chaîne alimentaire n’a pas cédé, a fait un remarquable travail pendant la crise, mais la Covid-19 a révélé notre dépendance aux importations », a commenté Julien Dive, en introduction de l’examen du rapport. « Nous importons environ 20% de notre consommation alimentaire », a complété la co-rapporteure Pascale Boyer.
 

Détail des 20 propositions

  1. Bâtir des stratégies de filière plus offensives grâce « à l’affirmation d’un Etat stratège sur les questions de souveraineté alimentaire ». La mission propose d’ « identifier et soutenir les filières les plus stratégiques et les plus fragilisées via des plans spécifiques, sur le modèle du plan Protéines végétales ». Elle prône la mise en place d’un observatoire de l’autonomie alimentaire.
     
  2. Limiter les sur-transpositions en droit national des normes européennes qui freinent la compétitivité du modèle français.
     
  3. Renforcer les politiques de contrôle. Selon le sénateur Laurent Duplomb, entre 8 et 12% des denrées alimentaires importées de pays tiers ne respecteraient pas les normes européennes de production, rappelle la mission d'information.
     
  4. Mettre en place un règlement européen sur les clauses miroirs et intégrer le secteur agricole dans le dispositif de compensation carbone aux frontières.
     
  5. Réformer les règles applicables en matière de limites maximales de résidus de pesticides (LMR) en supprimant le principe des tolérances à l’importation et en raccourcissant les délais entre le non-renouvellement de l’approbation d’une substance dangereuse et l’abaissement effectif des LMR. « Des substances interdites dans l’UE, pour certaines depuis plus de deux ans, en raison notamment de problèmes de génotoxicité ou d’effets néfastes sur les organes endocriniens, ont toujours des LMR très élevées sur plusieurs denrées, telles que les poireaux, les houblons, la camomille, les citrons, les oranges et les tomates », souligne par exemple le rapport.
     
  6. Réviser le règlement Inco pour rendre obligatoires les informations relatives à l’origine géographique des produits, dans le cadre de la présidence française du conseil de l’Union européenne. « Cette révision doit permettre de rendre obligatoire la mention de l’origine nationale sur l’ensemble des denrées alimentaires, y compris les denrées transformées, en appliquant la règle prévue au niveau européen sur l’ingrédient primaire », notent les rapporteurs.
     
  7. Accompagner les acheteurs publics et les acteurs de la restauration collective pour atteindre les objectifs fixés par la loi Egalim.
     
  8. Rendre l’affichage obligatoire de l’origine des produits dans la restauration commerciale (dans le cadre de la révision d’Inco) et prendre le décret d’application de l’article L. 412-9 concernant les obligations d’indication de l’origine des plats contenant un ou plusieurs morceaux de viande bovine, hachée ou non, porcine, ovine et de volaille.
     
  9. Revaloriser le revenu des agriculteurs en soutenant les OP, identifiant de nouveaux leviers pour réduire les charges d’exploitation, généraliser le rémunérascore et soutenir les consommateurs les plus modestes pour diminuer « la sensibilité prix » des achats alimentaires (en ciblant surtout les produits locaux).
     
  10. Renforcer les groupements d’employeurs et améliorer les conditions de travail des saisonniers pour pallier la pénurie de main-d’œuvre. Le rapport rappelle que selon la FNSEA 60 000 postes de saisonniers seraient non pourvus.
     
  11. Pérenniser le dispositif d’allégement des charges pour les travailleurs occasionnels (TO-DE) et amplifier le mouvement de fiscalisation du financement de la protection sociale.
     
  12. Mieux faire connaître les métiers du vivant et renforcer les actions de formations
     
  13. Créer un fonds pour la transition agro-écologique afin de pérenniser le soutien financier à l’investissement pour l’achat d’agroéquipements mis en place dans le cadre du plan de relance
     
  14. Faire évoluer le cadre juridique européen et soutenir la recherche publique et privée pour développer de nouvelles variétés issues des NBT, plus résistantes et moins consommatrices d’intrants. « Au regard des avancées scientifiques et des différentes auditions menées », les rapporteurs du rapport considèrent en effet que « les NBT, judicieusement encadrées, présentent des avantages indéniables pour soutenir l’autonomie alimentaire française et répondre aux défis du changement climatique ».
     
  15. Soutenir les projets territoriaux de gestion de l’eau, optimiser la gestion des eaux usées, réduire les délais administratifs ou encore former les exploitants aux pratiques permettant une gestion plus économe de cette ressource. « Si la France dispose de la deuxième ressource en eau en Europe après la Norvège, elle accuse un retard sur l’efficacité de la gestion de cette ressource », peut-on lire dans le rapport de la mission d’information.
     
  16. Soutenir la bio (en pérennisant par exemple le soutien accru au fonds avenir bio au-delà du plan de relance) et la HVE après révision de ses critères à la hausse
     
  17. Encourager le déploiement des projets alimentaires territoriaux (PAT)
     
  18. Faire mieux connaître les leviers de la commande publique pour favoriser la consommation de produits locaux tout en restant dans le cadre du droit européen
     
  19. Modifier le droit européen de la commande publique pour sécuriser les personnes publiques et leur permettre de favoriser les produits locaux dans leurs achats
     
  20. Encourager le développement des circuits de proximité et de la production locale ou encore encourager le développement de l’agriculture urbaine

La dépendance aux importations a doublé en 20 ans

La mission rappelle dans son rapport que la France demeure de loin le premier producteur agricole de l’Union européenne avec 75,5 milliards d’euros de produits agricoles (soit 18% de la production agricole européenne). Le secteur agricole et agroalimentaire occupe le troisième rang des secteurs excédentaires de notre la balance commerciale française, après le secteur aéronautique et spatial et l’industrie des produits chimiques de la parfumerie et des cosmétiques mais cet excédent baisse à 6,3 milliards d’euros en 2020 contre 7,9 milliards d’euros en 2019.

La mission rappelle aussi que la France importe environ 20% de sa consommation alimentaire, selon un rapport de France Stratégie, une dépendance qui a doublé en 20 ans, avec un taux de dépendance pouvant dépasser les 50% selon les filières.


Des causes multiples

Pour expliquer cette situation, les rapporteurs pointent le déficit de compétitivité particulièrement marqué vis-à-vis de nos partenaires européens. Et ce du fait : des différences entre les normes environnementales et sociales, du coût du travail élevé en France, du coût des consommations intermédiaires, de la fiscalité sur la production mais aussi « d’une structuration insuffisante » de certaines filières. S’ajoutent à cela, la faiblesse de l’investissement par rapport aux concurrents, la perte de compétitivité des ports français ou encore la complexité administrative, selon un rapport de FranceAgriMer cité par les parlementaires.


L’enjeu de la présidence française de l’Union européenne

Les rapporteurs espèrent que la présidence française de l’Union européenne qui débutera le 1er janvier permettra de faire avancer ce dossier et notamment la question de la distorsion de la concurrence entre la France et les autres pays européens. Emmanuel Macron doit justement s’exprimer ce jeudi 9 décembre à 16h sur les priorités de la France pendant cette présidence.

Retrouvez l’ensemble du rapport de la mission d’information :

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