Laiteries
Terra Lacta retrouve un nouveau souffle avec Bongrain
L’assemblée générale de Terra Lacta a approuvé l’alliance avec Bongrain. La coopérative sera réorganisée en profondeur et devrait tirer parti de la force commerciale du groupe fromager privé.
L’assemblée générale de Terra Lacta qui s’est tenu le 25 juin dernier à Melle a donné l’accord à son président Alain Lebret de signer vendredi 28 juin un accord définitif avec Bongrain, le deuxième groupe fromager français. Cette alliance, largement décrite lors des assemblées de section, a été approuvée par 88 des 96 délégués (deux délégués ont voté contre et six se sont abstenus).
En se liant avec Bongrain, la structure de Terra Lacta sera complètement réorganisée. Concrètement, l’accord prévoit la création d’une société commune nommée « Les fromageries Lescure » codétenue par Bongrain (à 51 %) et par Terra Lacta. Cette filiale régionale regroupera les laiteries de Saint-Loup-sur-Thouet (79), Saint-Michel-en-Herm (85) et Caussade (82) qui fabriqueront 18 000 tonnes de fromages de chèvre et 5 000 tonnes de fromages de vache à partir de 130 millions de litres de lait de chèvres et 50 à 60 millions de litres de lait de vaches. Les fromageries Lescure devraient donc commercialiser les marques Lescure, Platane, Saint-Loup (fromage de chèvre affiné) et Mottin Charentais (fromage au lait de vache). La nouvelle entité, dont le siège sera à Poitiers, devrait aussi reprendre la commercialisation du Chavroux (fromages de chèvre frais) ainsi que les bougon-boites, fabriqués à Bougon (79) par Poitouchèvre (détenu à 49 % par Terra Lacta).
Pour les activités beurre, crème, caséine et poudre, Terra Lacta intégrera la Compagnie laitière européenne (CLE) en prenant environ 5 % des actions de la CLE. L’activité beurre - 20 000 tonnes dans les sites de Surgères (17) et Claix (16) – sera intégré dans la nouvelle société des beurres des régions d’Europe. La fabrication de poudre (40 000 tonnes) et caséines (5 000 tonnes) à Surgères et Champdeniers (79) sera incorporée dans Armor Protéines. Les pâtes molles type camemberts et coulommiers resteront fabriquées à Saint-Saviol (86) mais l’activité devrait intégrer à terme la Compagnie des fromages détenue par Sodiaal et Bongrain. L’activité lait UHT sera restructurée avec la fermeture du site de Mareuil-sur-Lay (85) et la création d’une filiale 100 % Terra Lacta qui conditionnera environ 300 millions de litres qui seront vendus via Orlait. Les activités régionales de distribution de la Sica-Poitou-Charentes seront recentré à Surgères (17) et pourraient être à l’avenir cédées à un tiers.
Avec cet accord, Terra Lacta s’engage à fournir environ 700 millions de litres de lait de vache et 130 millions de litres de lait de chèvre pour une durée de vingt ans. « Nous assurons un débouché à long terme à nos producteurs avec un prix rémunérateur » décrit Alain Lebret qui rappelle que Bongrain est l’un des opérateurs qui rémunère le mieux ses producteurs. « Cet accord permet aussi de maintenir les outils de transformation dans la région » poursuit le président qui sait bien que « s’il n’y a plus de laiteries dans la région, avec la hausse du coût des transport, il n’y aura plus de collecte laitière demain ». Dans la nouvelle organisation, les producteurs restent liés à leurs coopératives. Ce qui offre une assurance de collecte même pour ceux situés en zones difficiles ou éloignés et qui pouvaient craindre que Bongrain ne se sépare des producteurs trop couteux à collecter.
Malgré la fermeture de certains sites et la suppression envisagée de 237 postes sur environ 1 300 salariés, les usines seront globalement renforcées. Bongrain y prévoit des investissements qui se chiffrent « en dizaines de millions d’euros ». « On a mis dix ans à faire les investissements qu’ils prévoient de réaliser en deux ans » apprécie Patrick Charpentier, vice-président de Terra Lacta.
Autre satisfaction pour les dirigeants, la coopérative garde un vrai pouvoir de décision. « Nous ne sommes pas que des vendeurs de lait » affirme Alain Lebret en expliquant qu’un pacte d’actionnaire empêche par exemple toute décision importante sans l’accord des deux parties.
Quant à Bongrain, intéressé au départ par l’image de la région, le beurre AOP et le lait de chèvre, il mettra à disposition sa force commerciale. « Bongrain connait les consommateurs français et il sait qu’ils sont attachés au territoire et à l’origine des produits » estime Patrick Charpentier. Les fromages sous marque Chavroux, actuellement fabriqué majoritairement à partir de lait d’importation, seront ainsi sans doute fabriqués demain avec du lait français issu de Terra Lacta.
« Avec le réseaux commercial de Bongrain, nos produits seront potentiellement présents dans 150 pays » apprécie Patrick Charpentier. « En France, le marché est proche de la saturation et nous avons des relations commerciales difficiles avec la grande distribution. Le vrai relai de croissance se situe à l’export, autant en terme de valeur ajoutée que de volumes produits ».
Mais pour vendre à l’international, il faut des produits irréprochables et constants. Les équipes de recherche et développement de Bongrain seraient ainsi déjà à pied d’œuvre pour améliorer la qualité et la régularité des produits. C’est aussi pour cette raison que la coopérative a récemment revu sa grille des prix du lait de chèvre en incitant les producteurs à livrer d’avantage de lait d’automne et d’hiver et ainsi limiter l’utilisation de caillé congelé.
Après la signature d’un accord vendredi 28 juin et l’examen du dossier par les autorités de la concurrence, la nouvelle organisation devrait être opérationnel à partir du 1er octobre.
La médiation permet + 100 euros à l’automne
Avec la nouvelle grille de prix du lait qui favorise le lait d’automne et les hausses permises par la médiation, Terra Lacta devrait payer le lait de chèvre d’octobre 2013 cent euros de plus au mille litres qu’en octobre 2012. La hausse serait de + 60 euros en juillet et août. Forte de l’accord trouvé par le médiateur des relations commerciales, la coopérative se dite prête à suspendre la livraison aux grandes surfaces qui n’accepteraient pas les hausses tarifaires au 1er juillet 2013.