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Une ration avec 15 à 20 % d’ensilage de sorgho

Dans la Drôme, Sébastien Milhoud cultive du sorgho en dérobé derrière un méteil. Une fois ensilé, il est pour partie incorporé à la ration d’engraissement.

Le climat dans la Drôme subit clairement les influences méditerranéennes. Pour conforter leurs stocks fourragers sur les parcelles non irrigables, certains éleveurs misent sur le sorgho monocoupe cultivé en dérobé. Une plante bien armée pour affronter les étés drômois, de plus en plus similaires aux étés provençaux. C’est l’option retenue par Sébastien Milhoud sur son exploitation située à Monchenu, à 20 km au nord-est de Romans. Depuis 2013, il sème 9 à 10 hectares de sorgho BMR (variété mâle stérile) derrière du méteil. Une fois ensilé, il utilise ce fourrage pour ses vaches suitées en vêlage d’automne et ses taurillons.

D’abord développer le rumen

Nés pour la plupart en septembre-octobre, ses veaux sont mis à l’herbe fin mars avec leur mère et ne sont pas complémentés. Ils sont sevrés début juillet à un poids moyen de 370 kilos cette année, puis allotés dans le bâtiment d’engraissement. Dans un premier temps, ils bénéficient d’une ration "post-sevrage" largement basée sur les fourrages grossiers. Elle se compose de 2,4 kgMS d’enrubannage de trèfle violet, 2,2 kgMS d’enrubannage de luzerne de seconde coupe, 2,6 kgMS de blé aplati, 400 gMS de tourteau de colza et 120 g de CMV. Cette ration présente l’avantage d’éviter d’avoir à ouvrir un silo en pleine chaleur. Elle est aussi suffisamment fibreuse pour bien faire fonctionner le rumen et développer la panse. Distribuée tous les deux jours avec un bol mélangeur, elle a permis l’an dernier un GMQ moyen de 1 150 g entre le 22 juillet et le 22 septembre, oscillant selon les animaux entre 1 330 et 850 g pour les meilleurs et moins bons résultats.

Leur alimentation évolue ensuite vers la ration dite de « pré-engraissement » après ouverture d’un premier silo d’ensilage de maïs. Les babys pèsent alors une moyenne de 460 kg et cette ration associe 3,8 kgMS d’ensilage de maïs, 2,5 kgMS d’enrubannage de trèfle, 2,2 kgMS de céréale aplatie et 700 gMS de tourteau de colza. Ce régime reste d’actualité jusqu’à fin octobre. Cette date correspond aussi à l’ouverture du silo d’ensilage de sorgho, récolté trois semaines plus tôt. Les taurillons pèsent alors en moyenne un peu plus de 500 kg et passent progressivement à la ration « engraissement ». Elle n’évoluera plus jusqu’à leur départ pour l’abattoir et se compose de 2,2 kgMS d’ensilage de sorgho, 2,6 kgMS d’ensilage de maïs, 2,5 kgMS d’enrubannage de luzerne, 1,5 kgMS de foin de luzerne, 3 kgMS de maïs grain humide stocké en boudins, 400 gMS de tourteau de colza et 100 g d’urée.

Pour les lots de l’hiver dernier, ce régime a permis d’atteindre des croissances avoisinant deux kilos par jour, avec des extrêmes compris entre 1 840 g et 2 110 g. « Ces performances sont aussi liées à un cheptel conduit avec 100% d’IA depuis 31 ans », souligne Jean-Pierre Chevalier, ingénieur bovins viande à la chambre d’agriculture de la Drôme. « Outre son aptitude à pousser là où le maïs ne permettrait pas d’obtenir de bons résultats, en confortant ainsi les stocks disponibles, l’ensilage de sorgho permet de diversifier les fourrages utilisés. » Mais c’est un accélérateur du transit intestinal. Il ne doit donc pas constituer une part trop importante de la ration, sous peine de s’exposer à des déconvenues. « Pour des JB, je déconseille d’aller au-delà de 3 kgMS par tête, même en finition sur des animaux de plus de 500 kg. Pour des génisses d’élevage ou des vaches suitées, il ne faut pas aller au-delà de 25 % du total de la quantité de matière sèche ingérée. »

Accélérateur de transit similaire à la betterave

Cette accélération du transit favorise une légère augmentation du niveau d’ingestion. « Fin décembre, pour des JB d’un poids vif moyen de 600 kg, les niveaux d’ingestion se situaient à 13 kgMS par tête par jour, soit un kilo de matière sèche supplémentaire, comparativement à des rations sans sorgho », précise Jean-Pierre Chevalier, lequel regrette certaines confusions parfois entendues sur les sorghos monocoupe. « Il ne faut surtout pas les confondre avec les multicoupe (type Sudan), lesquels sont plus proches des graminées. »

Pour les monocoupes, il y a cinq types différents, dont trois pour les variétés BMR : les BMR grain (les plus précoces), les BMR mâles stériles (riches en sucre) et les BMR photopériodique sensitive (PPS). Les types mâles stériles n’apportent pas d’amidon s’ils ne sont pas fécondés, et les PPS sont des variétés avec un potentiel de rendement plus élevé mais avec des taux de matière sèche compris entre 20 et 24 %, et donc forcément des pertes de jus au silo. « Je préconise l’utilisation de variétés 'mâles stériles' ou un mélange de semence associant (en poids de semence) 70 % de mâles stériles pour 30 % de sorgho 'grain'. Pour la récolte, il ne faut pas utiliser d’éclateur pour ne pas faire de la bouillien et reculer le contre-couteau de façon à avoir des brins de 4 cm de long. Sinon, on favorise l’acidose », avertit Jean-Pierre Chevalier. « C’est un fourrage qui a souvent été mal présenté. Il est encore parfois comparé à du maïs, et utilisé comme tel avec alors forcément d’importantes déconvenues à la clé. D’ailleurs, sur le plan de la digestibilité et des caractéristiques nutritionnelles, il a davantage de similitudes avec la pulpe de betterave surpressée."

Chez Sébastien Milhoud, les premiers animaux sont vendus à compter de fin février, puis les départs s’échelonnent jusqu’en juin, en particulier pour les taurillons nés en fin d’automne. Les animaux sont abattus très lourds, avec cette année un poids moyen de carcasse de 478,6 kg sur 47 animaux. Un poids qui n’est pas un handicap, dans la mesure où la plupart d’entre eux sont destinés à approvisionner les nombreuses boucheries hallal du département.

Un semis fin mai derrière un méteil

Comme dans la plupart des exploitations drômoises situées en zone de plaine, chez Sébastien Milhoud la pousse de l’herbe est saisonnière. Une partie du cheptel reproducteur est d’ailleurs chaque année nourri comme en plein hiver dès le milieu de l’été, d’où la nécessité de constituer des stocks conséquents. Toutes les parcelles mécanisables suffisamment fertiles sont mises à contribution, avec un fréquent recours aux cultures dérobées. « Dans la Drôme, semer un maïs sur des parcelles non irriguées, c’est risqué. C’est même l’échec assuré quand ce maïs vient en dérobé derrière une temporaire ou un méteil ensilé. En revanche, implanté dans de bonnes conditions, le sorgho donne généralement de bons résultats, précise Jean-Pierre Chevalier. Mais dès qu’il y a possibilité d’irriguer, il faut donner priorité au maïs et laisser tomber le sorgho. »

Pas au-delà de 450 m d'altitude

Pour Jean-Pierre Chevalier, le sorgho monocoupe s’accorde très bien avec le méteil, en permettant deux récoltes paran sur la même parcelle. L’itinéraire technique idéal fait se succéder un méteil semé mi-octobre et ensilé mi-mai puis un sorgho. Comme de nombreuses plantes d’origine tropicale, il n’est pas conseillé de l’utiliser au-delà de 450 mètres d’altitude. « Le sorgho donne en revanche de bons résultats dans la vallée du Rhône, une partie du Sud-Ouest, et peut remonter jusqu’aux Pays de la Loire. » À l’image de ce qui est pratiqué chez Sébastien Mihoud, dans la Drôme la récolte a lieu 120 jours après semis, soit fin septembre pour un semis du 25 mai, avec pour objectif  un fourrage compris entre 28 et 31 % de matière sèche et un rendement oscillant entre 7 et 11 tMS selon les conditions climatiques de l’été. Pour obtenir ce résultat, les variétés grain BMR et mâle stérile sont plus adaptées que les variétés PPS, plus tardives. « Le principe à bien intégrer est que cette culture n’est pas du maïs et ne doit surtout pas s’utiliser comme tel. C’est en revanche un atout supplémentaire pour obtenir un fourrage de qualité, sécurisant l’autonomie alimentaire. »

Les résultats de Jalogny

À la ferme expérimentale de Jalogny, différents essais ont été menés sur l’utilisation d’ensilage de sorgho de type BMR pour l’engraissement de taurillons charolais à partir de broutards d’un poids moyen de 300 kg au sevrage. L’un d’entre eux portait sur une association ensilage de maïs et ensilage de sorgho à part égale dans la ration avec un plan de rationnement synthétisé dans le tableau ci-joint. Après 4 semaines de transition alimentaire, puis une moyenne de 10 mois d’engraissement, les animaux ont permis d’obtenir des carcasses d’un poids compris entre 420 et 450 kilos. Dans ces essais, l’association « maïs + sorgho » a surtout donné des résultats zootechniques proches des régimes témoins basés sur le seul ensilage de maïs. « Le remplacement d’une partie du maïs par du sorgho est intéressant, dès lors que son rendement en tonnes de matière sèche par hectare dépasse celui du maïs. Des essais ont montré des écarts de rendement de 10 à 20 % en faveur du sorgho en petites terres », précise le compte-rendu de l’expérimentation. Et de souligner également que la date de récolte a un effet sur le taux de matière sèche et le rendement, mais pas sur la valeur énergétique de ce fourrage. Cette dernière est déjà élevée au stade « plante verte », grâce à la très bonne digestibilité des variétés de type BMR.

Bien connaître le taux de matière sèche de l’ensilage de sorgho fait partie des principales recommandations pratiques formulées à la suite de cet essai. « Il faut porter une attention particulière à la teneur en matière sèche de façon à ne pas commettre d’erreur dans les quantités distribuées. Le risque est de ne pas apporter suffisamment de sorgho en raison de sa plus faible densité. Un mètre cube d’ensilage de sorgho contient généralement entre 150 et 180 kgMS, soit un tiers de matière sèche en moins comparativement à un ensilage de maïs. » Le recours à une mélangeuse n’est pas jugé indispensable.

Le saviez-vous

Caractéristiques des fourrages

Ensilage de sorgho de type BMR présentant une bonne digestibilité, mais tardif avec une teneur en MS autour de 25 à 30 %. Valeur alimentaire par kgMS : 0,75 UFV, 40 g PDIN, 60 g PDIE et 1,0 UEB
Ensilage de maïs à 35% de MS récolté en conditions de végétation « normales » avec 30 % d’amidon. Valeur alimentaire par kgMS : 0,81 UFV, 42 g PDIN, 67 g PDIE et 1,05 UEB

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