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EARL Le Bois Laplace dans l’Aisne
Un système équilibré entre Salers en croisement Charolais et cultures

Arnaud Woimant élève 140 Salers en croisement Charolais. Son système est en cours d’évolution suite aux nouvelles règles de la PAC en redonnant un peu plus de place aux cultures.

À Iviers, en Thiérache, Arnaud Woimant s’est installé en 1999 sur l’exploitation familiale. Le troupeau Salers avait été créé par son père au début des années 90, à partir d’une vingtaine de génisses pleines et d’un taureau inscrits achetés dans le Cantal pour atteindre 90 vaches au moment de l’arrivée d’Arnaud. L’exploitation a évolué au rythme des optimisations par rapport aux réformes de la PAC et s’est consolidée avec la reprise de deux fois cinquante hectares. Elle s’est alors orientée vers un système plutôt herbager avec alimentation sèche (foin, enrubannage et pulpes sèches). L’effectif est monté jusqu’à 150 vêlages. Depuis 2015, l’éleveur s’est engagé dans un rééquilibrage du système entre élevage et cultures. « Auparavant, je faisais primer beaucoup de génisses. Avec les nouvelles règles, la perte pour mon élevage représente 15 000 euros », explique Arnaud Woimant. En même temps, l’éleveur cherche à améliorer l’autonomie alimentaire (et en paille) du système pour faire face au changement climatique. En effet, en 2016, les très fortes pluies de juin l’ont obligé à rentrer les animaux pendant un mois, et la qualité du foin était catastrophique. Cette année, la sécheresse de printemps a réduit de 30 % environ le rendement des prairies, même si l’herbe était de très belle qualité. Arnaud Woimant a donc saisi l’opportunité de labourer quelques hectares de prairies, et a réduit d’une trentaine le nombre de vêlages pour arriver à 120. « Ce sera aussi plus facile pour le suivi du troupeau et gérer la répartition des charges de travail avec mon collaborateur. » À terme, il ne sera plus nécessaire d’hiverner à cinq kilomètres les génisses de deux ans. Pour sécuriser la qualité et la quantité des stocks, Arnaud Woimant a aussi choisi de passer à l’alimentation humide, basée sur 20 à 25 hectares d’ensilage d’herbe qui sera récolté précocement (avant le 10 mai). Arnaud Woimant a ainsi fait construire un silo. « Il faut savoir investir même en mauvaise année. » À moyen terme, l’éleveur envisage également de récolter en complément quelques hectares de maïs ensilage. "Je faisais jusqu’à présent du maïs grain. Passer à l’ensilage m’intéresserait dans le contexte de la baisse du prix du maïs grain et pour libérer les parcelles un mois plus tôt avant le semis d’un blé."

Passage en alimentation humide

En attendant le calage agronomique, la ration humide des vaches vêlées passera dès l’année prochaine à 12 kg d’ensilage d’herbe, 5 kilos de pulpes surpressées, 4 kilos de foin et si besoin selon la qualité de l’ensilage, de 0 à 0,5 kg de tourteau de colza. Les vaches de réforme recevront 12 kilos d’ensilage d’herbe, 20 kilos de pulpes surpressées et de la paille mélassée. Les génisses et les broutards resteront à l’alimentation sèche par souci de simplicité (accessibilité des bâtiments) car il y a beaucoup de lots à gérer.

Le troupeau est aussi en phase de recalage concernant la période de vêlage. Le schéma de croisement terminal ne permet pas à l’éleveur de réformer les vaches sur le seul critère de la date de vêlage. Dès lors, le moindre évènement comme la faible fertilité d’un taureau, a pour conséquence des dates de vêlage qui s’étalent décalées. L’objectif est que les vêlages se déroulent du 20 août au 20 décembre. Cette année, du 1er septembre au 10 novembre, 110 vêlages étaient faits. Quatre-vingt-dix pourcents des vêlages se passent dans le pré attenant les bâtiments. « Nous n’intervenons que si deux heures après l’expulsion de la deuxième poche le veau n’est toujours pas là." Les vaches suitées repartent dans les autres prairies en bétaillère trois à quatre jours plus tard. Sur dix ans, les résultats de reproduction chez Arnaud Woinant montrent un IVV moyen entre le 1er et le 2e vêlage identique à l’IVV moyen du troupeau, à 380 jours. Cet IVV s’est notamment allongé suite au passage récent du coronavirus qui a obligé l’éleveur à réformer des vaches sans veau et à garder quelques vaches qui décalent.

Le troupeau est conduit à 100 % en monte naturelle. Six taureaux sont présents : deux Salers et quatre Charolais. Arnaud Woimant achète les taureaux Salers dans les toutes bonnes maisons du Cantal, en recherchant de la taille, du lait et la qualité des bassins. Les taureaux Charolais sont achetés en stations d’évaluation à Migennes (Yonne) ou à Sommepy (Marne). Arnaud Woimant recherche des taureaux qui expriment croissance et muscles, tout en n’étant pas trop petits, et pour ceci il s’appuie sur le génotypage et le modèle.

Le taux moyen de renouvellement est de 18 %. Seulement une ou deux Salers pures sont vendues laitonnes, et toutes les autres vêlent à trois ans. Pour leurs deux premiers veaux, elles sont toutes conduites en race pure. "Le vêlage étant ainsi plus facile, cela leur permet de terminer leur croissance et d’exprimer leur potentiel génétique. C’est pour le troisième veau que les meilleures restent en race pure et les autres passent en croisement Charolais", explique Arnaud Woimant. La mortalité des veaux tourne autour de 2 à 3 % sauf accident sanitaire comme un épisode de BVD, ou la FCO en 2008. L’éleveur a opté pour une conduite sanitaire de prévention. La vaccination contre les diarrhées néonatales et les maladies respiratoires est pratiquée depuis presque vingt ans. L’âge moyen de réforme des vaches est d’un peu plus de neuf ans, ce qui signifie que certaines sont réformées à 15 ans. Le motif de réforme est si possible d’abord de recaler les dates de vêlages, puis la production laitière et l’âge. Les mâles purs Salers sont repoussés pendant un mois, et pratiquement tous les autres lots de broutards mâles et femelles sont sevrés le jour de leur vente. Tous les animaux sont vendus à l’organisation de producteurs commerciale EMC2, dont Arnaud Woimant est d’ailleurs administrateur.

De bons résultats sur les cultures

Les 88 hectares de prairie naturelle, dont une petite partie sont engagés en MAE, ont un rendement moyen de 7,5 à 8 t MS/ha. Les 15 hectares de RGA et TB donnent 10,5 t MS/ha avec trois à quatre coupes par an. Les parcelles pâturées reçoivent en moyenne 55 unités d’azote et les fauchées 60 unités par cycle. Le rendement du foin est de 4 à 4,5 t MS/ha, et celui de l’enrubannage de 3,2 à 3,5 t MS/ha. Le pâturage est tournant avec un retour au printemps en trois semaines à un mois (chargement 35 ares au printemps). Les veaux ne sont pas complémentés au pré. Le fumier est épandu sur les prairies de fauche avec retour tous les deux ou trois ans, et sur les parcelles avant colza.

Pour l’élevage, le matériel se résume à un godet désileur, une pailleuse attelée à un vieux petit tracteur et un tracteur d’élevage avec la fourche. Arnaud Woimant bénéfice de l’entraide de plusieurs voisins notamment pour les chantiers de paille, et parfois de foin. Il est également président d’une petite Cuma. Les résultats des cultures sont bons avec régulièrement des blés à 90 q et des colzas à 40 q. Cette année, derrière un blé, du RGA et TB a été enrubanné en octobre et le sera à nouveau en avril avant un maïs, pour valoriser autant que possible la complémentarité entre élevage et cultures.

Garder des vêlages groupés avec un taux de renouvellement de 18 % seulement

Chiffres clé

195 ha de SAU dont 88 ha de prairies naturelles, 15 ha de RGA et TB, 92 ha de cultures (colza, maïs, blé, escourgeon)
140 vêlages de Salers
1,77 UGB/ha SFP de chargement technique
2 UMO dont 1 salarié
Avis d’expert

Une marge brute de 545 euros/ha SFP

"La production brute de viande vive est de 321 kg/UGB et la marge brute de l’atelier viande bovine de 380 euros/UGB ou encore de 545 euros/ha SFP. Le passage en alimentation humide permettra de réduire les coûts alimentaires dans le contexte économique actuel et de limiter les besoins en concentrés (1370 kg/UGB pour l’instant). La productivité numérique est de 95 % en 2017.
Dans ce type de système mixte polyculture-élevage, ces dernières années, on se situe en moyenne entre 20 et 25 % d’EBE/produit brut contre 30 à 35 % il y a dix ans. Les charges de structure (hors amortissement) ont grignoté le résultat."
Étienne Falentin Chambre d’agriculture de l’Aisne

Avantage au croisement Charolais

Le croisement Salers X Charolais permet d’améliorer la valeur commerciale des broutards et de bénéficier d’un meilleur potentiel de croissance et d’une meilleure efficacité alimentaire. "En moyenne sur les dix dernières années, les mâles croisés sont présents un demi-mois de moins et pèsent en moyenne 42 kilos de plus que les Salers purs. Le bilan est plus que favorable aux mâles croisés avec environ 170 euros de produit en plus par animal", explique Étienne Falentin de la Chambre d’agriculture de l’Aisne. Sur les femelles, il est difficile de conclure pour cet élevage car l’effectif de Salers pures vendues broutardes est très réduit, mais le bilan est là aussi plutôt favorable aux croisées. Elles sont bien valorisées avec des poids-âge type comparables aux Charolaises pures. "Les vêlages de veaux croisés sont certes un peu plus difficiles qu’en race pure, mais pas autant qu’on le dit. On constate un taux de mortalité supérieur de 1 % ici pour les croisés."
Dans ce système, il est par contre difficile de maintenir les vêlages groupés du fait du taux de renouvellement réduit. Il y a aussi davantage de lots à constituer, différentes périodes de sevrage, ce qui complique le travail et la surveillance des animaux. Le choix du croisement est plus propice dans les troupeaux de grande taille.

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