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Transmission d'élevage - « On avait envie d’installer des éleveurs sur notre exploitation »

Lionel et Martine Amouriaux ont pris une longueur d’avance avant l’arrêt de leur activité. Leur retraite est prévue en 2026. Grâce à une transmission progressive, ils vont installer deux éleveurs sur deux structures distinctes.

« On a eu la chance de trouver deux personnes dont le profil correspondait à notre exploitation. Quand cette opportunité s’est présentée, on l’a saisie, même si l’heure de la retraite n’avait pas pour moi tout à fait sonné », confie Lionel Amouriaux, en Gaec avec sa femme Martine à Saint-Sulpice, en Ille-et-Vilaine, avant d’ajouter, « Au départ, on avait prévu de constituer un Gaec avec mon neveu », Dylan Bertin. Dans cette optique, il a d’abord travaillé en tant que stagiaire, puis comme apprenti avant d’être salarié, il y a de cela cinq ans et demi. Mais, tout a changé lors de la visite du centre de gestion et d’économie rurale (CER) pour une estimation des bâtiments en vue de monter le Gaec. « À ce moment-là, j’ai pris conscience que ce qui représentait un avantage pour l’un était un inconvénient pour l’autre et vice-versa.

" À 50 ans, il est normal de ne pas avoir les mêmes objectifs qu’un jeune. Je ne voulais pas être un poids pour mon remplaçant voire pire, créer des tensions entre nous. Je me suis donné à fond dans mon exploitation. Toutefois, je me suis toujours dit qu’à 50 ans je lèverai le pied et à 55 j’arrêterai les gros investissements. Et cela, je ne pouvais pas l’imposer à un associé et ce, dix années durant. » Pour autant, il était important pour Martine et Lionel Amouriaux d’installer un éleveur sur l’exploitation qui, naguère, avait appartenu aux parents de l’exploitant. Ils n’envisageaient pas qu’elle parte à l’agrandissement. Le couple a ainsi choisi d’aider leur neveu à s’installer, grâce à une reprise progressive.

Se préparer progressivement à la reprise

Après avoir dit stop à la création du Gaec avec Dylan, il apparaissait important à Lionel et Martine Amouriaux de l’accompagner dans son installation. Certes, lorsqu’il était salarié, les décisions étaient prises en concertation. Il assistait aux remises de bilans, aux négociations pour l’achat de matériel. Par contre, il ne touchait pas à la gestion administrative tenue par Martine Amouriaux. Les cédants sont donc partis sur une reprise progressive pour donner toutes les chances de réussite à leur neveu. Ainsi, depuis avril 2021, Dylan Bertin, 24 ans, fait ses armes sur l’un des cinq sites de la ferme. « Il a repris 55 hectares à huit kilomètres du siège. Cela lui donne la possibilité de se faire la main, de son côté, sur une petite structure, sans surcharge physique ni mentale. C’est une façon de se préparer progressivement avant de reprendre le gros de la structure. Il peut faire ses propres choix. Je reste par contre à sa disposition pour l’aider, pour répondre à ses questions en cas de besoin », souligne Lionel Amouriaux.

Au 1er octobre 2022, Dylan Bertin reprendra un second site de 30 ha avec 30 vaches, à deux kilomètres des 55 premiers hectares. Enfin, le 1er octobre 2026, au départ en retraite de Martine Amouriaux et à la cessation d’activité de son mari, le jeune éleveur récupérera le siège de l’exploitation.

Non pas une, mais deux installations

Autre particularité, les associés du Gaec Amouriaux ne vont pas permettre une, mais deux installations. Reprendre seul, une structure avec 200 vêlages sur 250 ha n’était pas envisageable. Un second porteur de projet, Yoan Blin, 32 ans, reprendra une seconde partie de la ferme. « Je l’ai rencontré en faisant de l’entraide avec mon voisin. Il était alors, son responsable d’exploitation. Sa situation est différente de celle de Dylan par ses dix ans d’expérience en élevages. Seul le côté administratif manque à son curriculum vitæ mais pour y pallier, il disposera du soutien de sa femme. » Ainsi, le 1er octobre 2022, l’exploitation sera divisée en trois. Une partie ira à leur neveu, une à Yoan Blin et la troisième restera aux associés du Gaec Amouriaux. « De cette manière, on pourra lever le pied et aller tranquillement jusqu’au 1er octobre 2026, date de départ en retraite de ma femme et de l’arrêt de l’exploitation pour moi. Mon neveu reprendra alors le siège actuel de l’exploitation », précise Lionel Amouriaux qui gardera 60 ha et 60 vaches les quatre prochaines années.

Et ce qui aurait pu être vu comme un inconvénient s’est révélé être un avantage. En effet, l’exploitation divisée en cinq sites, éloignés de deux à huit kilomètres du siège, avec des animaux présents sur chacun d’entre eux pour éviter le transport du fourrage, a permis de partager facilement la structure, en trois élevages bien distincts. Les terres et les bâtiments resteront en location. Sur les 250 hectares de départ, 210 sont en propriété. Le prix des animaux a été évalué avant la hausse des cours. Mais pour les cédants, l’important était de transmettre leur outil de travail à des éleveurs.

Chacun sur son exploitation

Yoan Blin découvre l’exploitation depuis dix mois. Il travaille un week-end sur deux sur les deux sites qu’il reprendra le 1er octobre. Dylan Bertin s’occupe quant à lui, du siège de l’exploitation, également un week-end sur deux. De cette manière, les deux associés du Gaec Amouriaux peuvent bénéficier d’un week-end de libre sur deux.

Même si chaque éleveur gérera sa structure comme il le souhaite, « je reste encore là pour quatre ans. Donc si Dylan et Yoan ont des interrogations, je me ferai un plaisir d’y répondre. Par contre, je me refuse à être celui qui sera toujours dans leur dos pour leur dire comment faire les choses », observe le futur cédant.

Lionel et Martine Amouriaux ont réussi le pari de la transmission en favorisant deux installations à partir de leur structure économiquement viable. Grâce à cette transmission progressive, les dossiers d’installations ont été acceptés à la banque sans difficulté. « En 2026, seule ma femme aura acquis ses droits à la retraite. Je devrais encore travailler quelques années. J’ai préféré saisir ma chance avec deux jeunes motivés qui aiment l’élevage et transmettre au bon moment. Pour moi, il ne faut pas attendre la dernière minute », insiste Lionel Amouriaux.

Chiffres clés

Gaec Amouriaux

190 vêlages, système naisseur-engraisseur de femelles
30,3 % taux de renouvellement
374 jours d’IVV
2 associés et 1 apprenti
203 ha dont 191 d’herbe et 12 de méteil grain

Des bâtiments performants

Les repreneurs loueront un outil performant dans lequel les cédants ont récemment investi. Il y a cinq ans, un bâtiment pour les vêlages a été construit. Le dernier bâtiment, date d’un an. Des panneaux photovoltaïques ont également été mis en fonctionnement sur les toitures (550 kWh). « Pour la fin de notre carrière, on a investi pour notre confort de travail. Dylan et Yoan vont pouvoir en profiter dès le début de leur carrière en tant que jeunes éleveurs », précise Lionel Amouriaux. Les bâtiments seront loués par les nouveaux installés. Le tarif de la location a été déterminé selon le barème de la chambre d’agriculture. Le tarif le plus bas a été retenu, une manière pour les cédants de favoriser la reprise.

Une banque de travail pour le matériel

Pour le matériel, une banque de travail a été constituée entre Dylan Bertin et les associés du Gaec Amouriaux. « Au début, mon neveu venait faire des heures sur l’élevage et bénéficiait du matériel en contrepartie. Puis, j’ai repris un apprenti. Pour être plus autonome, il a décidé d’acquérir du vieux matériel. » Yoan Blin, le second porteur de projet fait pour sa part appel à une Cuma. « À notre départ, s’ils veulent acheter le matériel, ils le pourront. Sinon, ce ne sera pas un problème de le vendre. »

Vers de nouvelles aventures

Lorsque Martine Amouriaux partira en retraite, ce ne sera pas encore le cas pour son mari qui a de nouveaux projets pour ses dernières années d’actif.

Si en octobre 2026, Martine Amouriaux atteindra l’âge de la retraite, Lionel Amouriaux devra encore travailler quelques années. « On a construit une maison sur la côte atlantique. L’objectif est de s’y installer à la cessation d’activité. Au départ, j’envisageais de trouver un travail une fois là-bas, puis en réfléchissant, je me suis dit que je ne voulais plus de contrainte horaire et ce que j’aimais avant tout, ce sont les vaches et le milieu agricole. Aussi, je me suis inscrit au répertoire à l’installation dans les départements du Morbihan et de Loire-Atlantique », explique Lionel Amouriaux qui souhaite à plus petite échelle reconstruire une ferme économiquement viable et autonome, en produisant sa propre énergie. « L’autonomie sur mon exploitation a été mon moteur ces dernières années. »

L’idée pour l’éleveur est de chercher une petite structure d’une trentaine d’hectares où il pourra monter une serre où se côtoieront poules, moutons et vaches.

Transmettre sa passion

« Par ailleurs, j’adore transmettre, alors pourquoi ne pas aller vers une ferme pédagogique. Pourquoi ne pas dispenser des formations à des gens sans lien réel avec la terre et leur en expliquer les bases. » Cette envie pourrait se transformer en projet familial. Car, si aujourd’hui, les enfants de Lionel et Martine Amouriaux ne sont pas intéressés par l’exploitation de leurs parents, cette idée de structure les séduits.

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