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RGI semé en été, pâturé en automne

À La Neuville-en-Beine dans l’Aisne, Thierry Crepin sème des RGI après avoir moissonné ses blés. Ses Limousines les pâturent une bonne partie de l’automne.

À une quarantaine de kilomètres au nord de Soissons, en bordure de la riche région naturelle du Santerre, l’exploitation de Thierry Crepin s’étend dans un paysage vallonné où alternent parcelles boisées, pâturées et surtout labourées. Sur son exploitation à dominante céréalière, il élève 60 vaches limousines et la suite. Un cheptel inscrit, avec finition de tous les animaux non vendus pour la reproduction. Les bovins valorisent une cinquantaine d’hectares de pâtures. Souvent de petite dimension, ces dernières occupent les surfaces ne pouvant être mises en culture (parcelles pentues, bordures de bois et de fossés, abords de maisons…) ou celles sur lesquelles les rendements sont jugés trop médiocres.

Les parcelles en culture sont pour la plupart limono-sableuses. L’assolement se répartit entre blé, betterave à sucre, colza et pomme de terre. Soucieux d’entretenir le taux de matière organique de ses parcelles, Thierry Crepin souligne sur ce volet la complémentarité entre polyculture et élevage bovin et reconnaît volontiers être devenu « accro » à la sélection de son cheptel. « Plutôt que de faire de la moutarde et la broyer, je trouve plus cohérent de semer derrière mes céréales du ray-grass italien à même d’être valorisé par mes Limousines à une période ou la disponibilité en herbe de mes prairies permanente diminue. » Des bovins également analysés comme autant de « broyeurs-épandeurs » qui, en plus de valoriser ces couverts, produisent de la viande et permettent une précieuse production de fumier. Les dérobées utilisées pour le pâturage automnal sont uniquement composées de RGI et certaines années, ces surfaces sont pour partie fauchées puis enrubannées de façon à conforter les stocks. Mais ce n’est pas le principal objectif. La volonté est davantage de prolonger la saison de pâturage avant d’attaquer les rations hivernales qui, pour les bêtes d’élevages, sont d’abord basées sur le foin et l’enrubannage, complétées selon les opportunités d’achat par des racines d’endives et des écarts de tri de pommes de terre.

De 20 à 45 hectares de RGI en dérobées

« Je sème du RGI en dérobées depuis de nombreuses années sur des surfaces oscillant entre 20 et 45 hectares. 45 cette année. Certaines de mes parcelles se prêtent mieux que d’autres à cette pratique. » Celles retenues sont adossées à une prairie permanente déjà existante. Cela permet d’avoir une clôture déjà installée sur la moitié de la périphérie de ces surfaces. De septembre à novembre, ces dérobées doublent pratiquement les surfaces en herbe de l’exploitation. Si l’automne est beau, ce qui est souvent le cas ces dernières années, cela permet de retarder d’autant la rentrée en stabulation.

La moisson a lieu autour du 25 juillet avec un rendement avoisinant classiquement 90 qt/ha. Les pailles sont récoltées au plus tôt. « J’essaye dans la mesure du possible de faire un apport de matières organiques (10 à 15 t de fumier composté/ha ou écumes de sucreries…). » Après un léger déchaumage à 7-8 cm de façon à ne pas ameublir en profondeur la structure du sol, le semis a lieu dans la première quinzaine d’août avec un classique semoir à céréales suivi d’un passage de rouleau. « Je fais un semis soigné à 20 kg/ha avec la semence la moins chère possible. Il faut surtout ne pas perdre de temps entre la moisson et le semis si on veut une belle pousse. Chaque semaine compte ! » Il faut chercher à profiter de la fraîcheur résiduelle du sol mais aussi avoir un peu de chance pour qu’un peu d’eau tombe au bon moment. La semence représente un budget avoisinant 35 euros/ha auquel vient se greffer le semis à proprement parler : 55 euros/ha. « J’ai essayé de mettre des légumineuses. Cela renchérit l’opération et ne présente guère d’intérêt. »

Le RGI pâturé en fin d’automne est riche en eau

Les animaux ont classiquement accès à ces parcelles à partir de fin septembre, quand le couvert végétal est suffisamment développé. La plupart des lots le font depuis une prairie permanente contiguë à celle en dérobées sur laquelle est positionné un râtelier de fourrage grossier avec également une auge de façon pouvoir leur faire consommer de la magnésie sous forme d’oxyde de magnésie distribué avec une toute petite ration de céréales. Le RGI pâturé en fin d’automne est un couvert végétal riche en eau. Il tend à créer des déséquilibres d’assimilation, surtout quand il fait froid et humide.

Les parcelles de dérobées sont closes avec une clôture électrique à un fil, mais pas question de faire du pâturage rationné à une saison où l’emploi du temps est chargé et donne priorité à la récolte des pommes de terre, des betteraves et aux semis de blé. Le chargement est modeste. « Par exemple sur une prairie permanente de 6 hectares utilisée pour le pâturage et contiguë à une parcelle de 4 hectares semée en RGA, je vais mettre une douzaine de vaches suitées. »

Le RGI pousse en général jusqu’à la Toussaint. La quantité de matière sèche obtenue est difficile à évaluer dans la mesure où cette dérobée est presque exclusivement pâturée et non récoltée. « Cela doit avoisiner 2 TMS/ha mais la pousse n’est pas parfaitement homogène sur l’ensemble des parcelles : effet des bordures de bois et des fourrières. »

Les vaches suitées rentrent mi-novembre, date correspondant aux premières inséminations. Avec ces dernières années de belles fins d’automne, le pâturage se prolonge parfois jusqu’à mi-décembre pour des lots de génisses, avec alors un faible chargement. « J’estime à +/-1,5 €/jour le coût d’une bête d’élevage en stabulation. Si la campagne de pâturage peut être prolongée sans dégrader la surface des parcelles, c’est autant d’économisé ! » Toutes les surfaces en RGI sont labourées en début d’hiver et occupées l’année suivante par des pommes de terre ou des betteraves.

L’atout matière organique

Avec des sols limono-sableux et une pente non négligeable dans certaines parcelles en cultures, le fait de laisser des sols nus après le déchaumage pourrait présenter un risque de ravinement lors d’épisodes de pluies intenses. Avec les dérobées de RGI, les sols avec précédent céréales sont couverts tout l’automne et une partie de l’hiver. Cela limite l’érosion et constitue une donnée favorable pour entretenir le taux de matière organique. Associées aux épandages réguliers de fumiers, les déjections des bovins sur les dérobées donnent également un coup de fouet à la vie microbienne du sol des parcelles en culture.

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