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« Le semis direct a fait évoluer mes pratiques »

Pâturage tournant, irrigation sur 16 ha, adoption sans réserve du semis direct, recours systématique au méteil et aux dérobées entre deux cultures… Sur l’élevage de Cédric Lareure, l’heure est à une intensification économe du système fourrager.

« Depuis mon installation en 2015 sur l’exploitation familiale, il n’y a qu’en 2016 où je n’ai pas eu à puiser dans les stocks à la belle saison », explique Cédric Lareure, éleveur à Perreux dans la Loire près des rives du fleuve portant le même nom. Sur son exploitation, le niveau de chargement est plus conséquent que ce qui est classiquement pratiqué dans la région. Le troupeau totalise 145 vêlages par an sur 125 ha entièrement consacrés à l’alimentation du troupeau avec finition de toutes les femelles et repousse de tous les mâles. La plupart des primipares vêlent à 2 ans, au plus tard 30 mois.

Irrigation sur 16 hectares

Pour limiter l’incidence des années sèches et sécuriser la constitution des stocks, 2019 a été marquée par une évolution majeure avec mise en place de l’irrigation sur 16 ha parmi les plus fertiles de l’exploitation. L’autre évolution majeure a résidé en 2017 par l’arrivée d’un semoir pour semis direct, une incitation supplémentaire pour ne jamais laisser le sol nu. Il est utilisé pour la mise en place de toutes les cultures, les méteils, les prairies, les dérobées et pour faire du sursemis dans des prairies dégradées. Cette simplification des itinéraires techniques s’est traduite par une économie sur le temps de travail et une plus grande réactivité dans les interventions. « En plus du volet agronomique, les gros avantages sont la rapidité d’intervention et la diminution des frais de mécanisation avec moins de temps passé à la préparation des parcelles et de sérieuses économies côté carburant. Dans mes prairies situées sur les coteaux, les cailloux font que la charrue est de toute façon un outil à oublier. »

Dérobées derrière céréales à paille

En céréales à paille, le rendement moyen est de 55 et 60 quintaux. Jusqu’à 65 les bonnes années. « J’implante systématiquement une dérobée derrière les céréales à paille. Lesquelles occupent en moyenne 23 ha : 15 ha d’orge et 8 ha de blé et/ou triticale l’an dernier. Mon père avait commencé à semer des dérobées à partir de 2009 et depuis on n’a jamais arrêté. Les mélanges utilisés peuvent associer avoine diploïde, moha, millet, trèfle d’Alexandrie, colza fourrager ou phacélie. Il n’y a pas de mélange type et j’aime faire des essais, mais je me méfie du colza fourrager. Il tend à devenir envahissant. J’utilise aussi du sorgho multicoupe. J’en ai fait 8 ha l’an dernier derrière de l’orge. »

La volonté est de semer ces dérobées au plus tôt. La paille est bottelée dans les heures qui suivent la moisson et le semis est généralement terminé trois jours après le passage de la moissonneuse. « Après, c’est un peu la loterie. Si l’été est sec, il ne pousse pas grand-chose. Mais à partir du moment où il y a plus 1,5 tMS/ha, ça vaut le coup. De toute façon, si on ne tente rien on est certain de ne rien avoir ! L’an dernier j’ai eu de la chance. Dans la Loire après un printemps extrêmement sec, nous avons eu quelques averses orageuses en août. Cela m’a permis d’utiliser une partie des surfaces consacrées aux dérobées pour compléter les stocks avec près de 4 tMS/ha pour les 8 ha de sorgho multicoupe. »

D’une année sur l’autre, les dérobées semées derrière les céréales à paille sont récoltées ou pâturées et souvent récoltées puis pâturées. C’est le calendrier et le niveau des stocks qui décide de leur utilisation. « Même si une parcelle de dérobées nourrit un lot seulement une quinzaine de jours, c’est autant de foin que je n’ai pas à sortir de la grange. » Après le dernier passage, le couvert est détruit par le gel ou un passage de glyphosate (à peine 1 l/ha) puis semis de céréales à paille fin octobre, voire mi-novembre en 2019. « Je ne mets pas d’engrais pour les dérobées. Éventuellement un peu d’azote avec le sorgho multicoupe si je suis à peu près certain d’avoir de la pluie. J’ai essayé du fumier après la moisson. Cela retarde le semis et il faut être certain qu’il pleuve entre le semis et la fauche pour ne pas avoir de reliquat au moment de la récolte. »

Du méteil entre deux maïs

Du méteil est systématiquement semé en octobre entre deux maïs sur les surfaces irriguées. Ensilé, ce fourrage assure une part conséquente des stocks utilisés pour les génisses et vaches suitées. « C’est un produit entre 0,7 et 0,75 UF. Il occupe chaque année les 16 ha entre deux maïs et quelques parcelles complémentaires. » Pour la récolte 2019, la semence se composait d’un mélange de 100 kg de triticale, 50 d’avoine et 50 de pois en semences fermières. « Une année, j’ai essayé de rajouter de la féverole mais sans résultat probant. Sur ce méteil, la seule fertilisation est un apport de 50 unités d’azote en février. Je décide la date selon les sommes de température, avec apport à partir de 200 °C." Le méteil est ensilé mi-mai. En 2019, le rendement a été de 4 tMS/ha. « C’est généralement meilleur. Jusqu’à 6 tonnes quand la météo est favorable. » Le maïs est semé dans la foulée en strip-till. Le fait d’être irrigué a permis d’atteindre pratiquement 15 tMS/ha en 2019 pour les surfaces ensilées plante entière soit pratiquement 20 tMS/ha en cumulant méteil et maïs. « L’irrigation est une vraie soupape de sécurité pour mon système fourrager. » Alors que le maïs a longtemps été systématiquement ensilé plante entière, l’an dernier 4 ha l’ont été en épis pour les broutards en repousse et les femelles à l’engrais.

« Je consulte beaucoup internet et différents groupes de discussion. Cette année j’ai fait du sursemis avec du RGI sur des prairies très dégradées par la sécheresse. Je les ensilerai au printemps. En semis direct et sur des surfaces modestes, les essais sont peu onéreux. Cela vaut le coup de les tenter. Comme j’ai de bons résultats côté GMQ avec l’ensilage de maïs épis, j’en ferai davantage cette année. Pour réduire le coût d’implantation du maïs, j’envisage les semences hybrides pour les seules surfaces ensilées en épis et du maïs population sur l’essentiel des surfaces ensilées plante entière. Je vais également tester une réduction de l’écartement entre les lignes en passant de 75 à 32 cm de façon à mieux couvrir le sol avec la volonté de réduire les frais pour le désherbage. »

Adoption du pâturage tournant

Sept lots de vaches ou de génisses sont conduits en pâturage tournant au printemps en restant de deux à cinq jours sur le même paddock. Redécouper le parcellaire avec des fils lisses et mettre en place les points d’eau a été le point de départ. L’objectif était que les animaux n’aient pas plus de 300 mètres à parcourir pour aller boire. « Les faire tourner n’est pas compliqué. Ça se fait pendant la tournée de surveillance. Je suis un convaincu de ce mode de gestion de l’herbe compte tenu des performances obtenues. »

Rations basées sur l’ensilage

Le stock de fourrages se compose d’ensilage de méteil et d’herbe, d’enrubannage de dérobées, d’ensilage de maïs épis et de maïs plante entière et de foin.

La part consacrée à l’enrubannage est peu à peu réduite au profit de l’ensilage. « Le foin c’est une douzaine d’hectares par an, principalement pour complémenter les vaches en été. » Calculée pour une vache suitée en vêlage de fin d’été, la ration hivernale se compose en quantité brute de 1 kg de paille (blé ou triticale) 10 kg de maïs ensilage plante entière, 5 kg d’ensilage d’herbe, 5 kg d’ensilage de méteil, 5 kg d’enrubannage et des minéraux.

Il y a une seule ration pour les animaux en repousse et les femelles à l’engrais dans un objectif de simplification. Elle repose pour 60 % sur une association de céréales (ensilage de maïs épis et orge) additionné de 35 % de tourteau complété par de la paille. Les veaux issus du lot en vêlage de fin d’hiver sont souvent sevrés de bonne heure et relativement légers (250 kg) dans la mesure où, quand l’herbe fait défaut, Cédric Lareure juge moins coûteux de complémenter des broutards une fois rentrés en stabulation que des lots de vaches suitées. De plus, une fois taries, des vaches en vêlage de fin d’hiver s’entretiennent facilement. Elles sont bien adaptées pour finir toutes les repousses sur prairies en prolongeant le plus longtemps possible la saison de pâturage avec au besoin un râtelier de foin.

Cheptel métissé avec deux périodes de vêlage

Une forte proportion des vaches sont des croisées avec une dominante de métis Piémontais/Limousine.

Ce croisement donne de bons résultats pour apporter conformation et finesse d’os, mais présente vite l’inconvénient inhérent au gène culard si on le poursuit sur plusieurs générations. « Et ce que l’on gagne sur le rendement carcasse, on le perd en rusticité et facilité de conduite. » La volonté est donc de s’orienter vers la Limousine en restant ouvert à toute nouvelle éventualité qui pourrait faciliter la conduite d’élevage ou mieux répondre aux attentes du marché.
Le troupeau est scindé en deux pour les dates de mise bas avec 90 vêlages de juin à septembre et 55 en mars et avril. Les dates de mises à la reproduction sont strictement définies avec réforme précoce de toute vache à problème ou qui n’a pas rempli dans les bons délais. À raison d’une cinquantaine par an, les meilleures d’entre elles et quelques génisses sont commercialisées auprès de deux bouchers dans le cadre d’un circuit de proximité.

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