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La production de jeunes bovins se spécialise et se professionnalise

Face à des évolutions pas seulement conjoncturelles, la production de jeunes bovins est en train de se spécialiser. Même si les naisseurs engraisseurs produisent encore une grande part des volumes.

Après une année 2016 difficile, la conjoncture 2017 du jeune bovin est plus favorable, malgré une forte baisse des exportations, compensée par une production également en recul.
© F. d'Alteroche

Après une année 2016 chaotique, avec des prix au plus bas, la conjoncture 2017 du jeune bovin se présente sous de meilleurs auspices. Les prix sont restés stables au premier trimestre. « Malgré la hausse des abattages en avril, la baisse saisonnière des cours des jeunes bovins de type viande reste peu marquée. Les prix des JB laitiers poursuivent leur hausse, analyse l’Institut de l’élevage (GEB), dans sa publication Tendances de mai. [...] Entre début avril et début mai, les cotations des JB U et R n’ont perdu que 2 centimes, ce qui leur permet d’être à présent supérieures à leurs niveaux des deux années précédentes (+5% par rapport à 2016 et +1 % par rapport à 2015), à 3,92 et 3,74 €/kg de carcasse. » « Les prix ne devraient pas baisser énormément », pronostiquait Caroline Monniot, du GEB, pour les semaines à venir. Pourtant, les exportations de viande de JB sont à la baisse (-5 % sur les deux premiers mois). Tous les marchés extérieurs sont affectés : le recul se poursuit en Italie (-3 % après -8 % l’année passée) ; en Grèce, la reprise de fin 2016 ne s’est pas confirmée ; l’Allemagne flanche également (-12 %) ; les expéditions vers les pays tiers restent poussives. Les exportations en vif sont également en diminution (-6 %).

Recul durable de la production

Mais, parallèlement, la production recule. C’est sans doute une des raisons du maintien des prix. « La demande n’est pas formidable, mais l’offre n’est pas énorme », explique Olivier Paillon, directeur du groupement Bovineo en Vendée. En 2016, la production a baissé de 4 % par rapport à 2015. Les abattages de JB laitiers s’effondrent (-10 %) (voir ci-contre) quand le JB de race à viande recule plus modérément (-2 %). L’Idele prévoit un nouveau fléchissement de 1 % en 2017. Au premier trimestre 2017, les abattages de JB type viande avaient reculé de 3,7 % dans les Pays de la Loire. L’aide à l’allègement des jeunes bovins, prolongée jusqu’à fin mai, pourrait également expliquer la fluidité du marché, malgré les difficultés techniques pour produire des animaux plus légers, selon l’Idele. Mais l’impact restait difficile à chiffrer.

Les opérateurs confirment plus ou moins la baisse des mises en place. « Nous observons un tassement de la production de JB de races à viande lié à un phénomène de spécialisation, indique Christophe Maudet, responsable de la filière bovins viande de Ter’elevage. Des éleveurs naisseurs engraisseurs, surtout parmi les cheptels de Blonde d’Aquitaine, vendent de plus en plus leurs animaux en broutards. C’est moins marqué en race Charolaise. Mais, dans le même temps, quelques gros ateliers d’engraissement se montent. C’est un phénomène assez marqué mais récent. Nous allons peut-être vers une spécialisation de la production de viande bovine, avec d’un côté des naisseurs, de l’autre des engraisseurs ou des naisseurs engraisseurs avec achats. »

Agrandissement, spécialisation et professionnalisation sont les mots qui reviennent le plus souvent chez nos interlocuteurs. La performance technique et la maîtrise des coûts sont plus que jamais les clés de la rentabilité et les groupements ne ménagent pas leurs efforts pour accompagner les producteurs.

Rentabilité, non pas de l’animal, mais de l’atelier

« Les projets sont souvent liés à de la méthanisation ou du photovoltaïque, indique Raphaël Colas, responsable commercial de l’union de coopérative Feder. Le photovoltaïque peut ramener 50 euros par place et par an. Ce qui nous va bien, ce sont des ateliers de 400 places associés à un projet de production d’énergie. »

« Les engraisseurs qui achètent du maigre ont des unités de production de plus en plus conséquentes afin d’optimiser les moyens de production, décrit le directeur de Bovineo. Nous avons plusieurs exemples d’éleveurs qui sont passés de 100 à 200 - 250 JB par an. Ils se professionnalisent et rentrent des broutards toute l’année. Le système de production n’est pas basé exclusivement sur la spéculation. Ce qui est important, c’est la rentabilité, non pas de l’animal en tant que tel, mais de l’atelier. Si l’unité de production reste vide durant plusieurs mois pour des raisons conjoncturelles, c’est catastrophique économiquement. C’est ce qui explique que les remises en place se sont maintenues en 2016 au sein de notre groupement. Mais, en 2017, la production devrait se tasser un petit peu, conséquence de restructurations d’exploitations chez des naisseurs engraisseurs. » Ces derniers représentent encore une part importante de la production, mais « les Pays de la Loire sont désormais exportateurs nets de broutards, ce qui n’était pas le cas, il cinq ou six ans », précise Olivier Paillon.

Des contrats qui apportent de la visibilité

Si les groupements arrivent à maintenir plus ou moins le niveau de production, malgré des tendances structurelles défavorables, c’est aussi parce qu’ils soutiennent les investissements dans la production et ont multiplié les formules de sécurisation, dans lesquelles ils assument une part du risque conjoncturel. « Quelle que soit la production de l’éleveur, nous avons un contrat à lui proposer, adapté à ses objectifs et à ses moyens de production. À Ter'elevage, un tiers des jeunes bovins sont contractualisés », précise Christophe Maudet. Même proportion de JB sous contrats chez Bovinéo. Les contrats marge garantie sont réservés aux jeunes agriculteurs (y compris naisseurs engraisseurs) et aux nouveaux investisseurs, avec un engagement de 5 à 10 ans. « Ces contrats apportent de la visibilité et les garanties nécessaires aux producteurs qui veulent investir et à leur environnement bancaire, affirme Olivier Paillon. De plus, nous participons au financement des animaux. La coopérative a engagé 9 millions d’euros sur ses fonds propres pour accompagner les producteurs. Et elle est caution pour des éleveurs qui ont investi auprès des banques à hauteur de 5 millions d’euros. »

Un engagement de l’outil d’abattage

Feder finance également la création de places (aide, prêt à taux zéro) et propose plusieurs formules pour garantir un coût de production (8 millions d’euros engagés). « En gros, nous rajoutons de 70 à 100 euros, selon les périodes, en plus des conditions normales de commercialisation, précise Raphaël Colas. Sans ces aides, l’engraissement ne serait pas possible, sauf dans certaines situations d’élevage avec des bâtiments amortis ou des rations peu chères (sous-produits). Nous pouvons le faire parce que, derrière, il y a un engagement de l’outil d’abattage. » Cette contractualisation de la production est toujours adossée à des contrats, en aval, avec des abatteurs ou des distributeurs, pour approvisionner des marchés ciblés : plus jeunes que la moyenne (16-18 mois), viande de couleur plus claire, gamme de poids donnée, race (Charolais, Montbéliards, Blonds d’Aquitaine lourds et bien conformés...). « Plus du tiers de nos jeunes bovins sont destinés au marché de l’abattage rituel, qui est en fort développement, indique Raphaël Colas. Nous avons lancé également quelques opérations ciblées avec des naisseurs engraisseurs pour des mâles très jeunes (moins de 16 mois) abattus d’octobre à janvier quand il y a moins de sorties d’animaux jeunes. » L’avenir de la production de jeunes bovins passe aussi par la segmentation : « les bons animaux au bon endroit au bon moment », résume Christophe Maudet.

Effondrement du jeune bovin laitier

La fin des quotas laitiers aura-t-elle raison des jeunes bovins de type laitier ? Ils sont produits majoritairement par des exploitations laitières. Beaucoup se spécialisent dans la production de lait en abandonnant l’atelier de jeunes bovins qu’elles avaient mis en place en période de quotas. « En trois ans, nous avons perdu 25 % de la production au sein de Bovineo, explique Olivier Paillon. Heureusement que nous avons la filière McKey/McDonald’s, qui est structurante, sinon, ce serait bien pire. » Pour Christophe Maudet, ces évolutions de la production laitière ont un « retentissement sur l’ensemble de la filière bovine. Jusqu’à présent, en France, un jeune bovin sur deux était issu d’une exploitation qui avait une activité laitière. C’était une production complémentaire du lait. Les évolutions du marché laitier sont en train de bouleverser profondément ces équilibres avec un phénomène très marqué, depuis quelques mois, de spécialisation des productions de ruminants. Nous entrons dans un nouveau cycle en terme de systèmes de production ».

Déconnection des prix du broutard et du JB ?

En 2016, la mauvaise conjoncture du jeune bovin s’est conjuguée avec un prix du maigre soutenu, lors des mises en place, en 2015, lorsque le marché turc battait son plein. « Une double peine pour les engraisseurs spécialisés, estime Olivier Paillon. Globalement, sur une période longue, il y avait une corrélation entre le prix du broutard, qui était destiné majoritairement à l’export sur des  marchés européens, et le prix du jeune bovin en Europe. En 2015-2016, cette corrélation a été rompue parce que ce sont les marchés des pays tiers qui ont fait le prix du broutard mâle. Si cette déconnection devenait structurelle, l’engraissement n’aurait  plus de raison d’être économiquement. Pour structurer durablement la production, en préservant à la fois le naissage et l’engraissement, une reprise des prix du JB est indispensable. L’engraissement devra néanmoins s’adapter en se spécialisant fortement pour réduire les coûts de production. » « La production de viande bovine ne doit pas s'ajuster sur les équilibres commerciaux entre naisseurs et engraisseurs, affirme Christophe Maudet. La question est de savoir comment dégager de la valeur ajoutée avec les cheptels viande bovine, toutes catégories confondues. Lorsque beaucoup d’animaux vivants sont sortis de la zone européenne, le prix de la viande bovine en France a augmenté. Tant mieux si le naisseur peut vendre cher son broutard. Il faut que l’ensemble des équilibres permette également à l’engraisseur de vivre de son métier. »

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