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Faire face au front des « anti-viande »

Les « anti-viande » ont été très actifs au cours de l’année écoulée. Leurs actions agacent. Ce sujet a monopolisé une partie des débats lors de la dernière AG du herd-book Limousin.

En 2016, la consommation de viande bovine a été à de multiples reprises accusée de bien des maux. Les vidéos prises dans des abattoirs ont tourné en boucle dans les médias et sur les réseaux sociaux. Elles ont jeté le discrédit sur cet aliment et sur les acteurs de cette filière. « Ces images, le discours anti-viande ambiant et la mise en cause permanente de nos systèmes d’élevage pourtant basés sur l’herbe et le pâturage contribuent à démoraliser les éleveurs que nous sommes », expliquait Jean-Marc Alibert, éleveur en Haute-Vienne et président du herd-book Limousin. À l’occasion de la dernière assemblée générale de cet organisme, il avait invité Bruno Dufayet, éleveur dans le Cantal et président de la commission des enjeux sociétaux d’Interbev, à venir débattre de ces sujets.

« Ces derniers mois, il ne s’est pas passé une journée sans que notre service de presse ne nous fasse écho d’articles ou d’émissions traitant de la viande et de l’élevage de façon négative », précisait ce dernier. Les quelques émissions, articles et interventions plus objectives sur ces sujets en seraient presque passés inaperçus face au flot d’images et de propos visant à nuire aux différents acteurs de la filière viande et tout particulièrement à ceux du secteur bovin. Un travail de veille est réalisé par l’interprofession pour analyser ce qui se dit et s’écrit dans les médias et sur les réseaux sociaux. Il permet de mieux connaître les arguments mis en avant par les détracteurs des produits carnés.

Très présents dans le microcosme médiatique

D’après des enquêtes réalisées l’an dernier, environ 3 % des Français se revendiquent végétariens. Sans que ce soit un raz-de-marée, cette proportion va croissante, en particulier chez les jeunes. « Ils ne sont peut-être que 3 % de la population, mais ils sont particulièrement actifs pour diffuser leurs idées. Ils sont surtout très présents dans la sphère médiatique. À la télévision ou à la radio, de nombreux journalistes et animateurs d’émission ont en permanence une attitude militante sur ces sujets », s’agaçait Marc Gambarotto, directeur de France Limousin Sélection. « Certains n’ont de cesse de faire du prosélytisme végétarien voire même vegan à longueur d’émission. Ce n’est pas simplement pénible, c’est tout bonnement insupportable. »

Comment contrer ce phénomène ? Trouver des leaders d’opinions et des ambassadeurs qui n’hésitent pas à faire la promotion de l’entrecôte n’est pas chose facile. Ce n’est pas très « tendance » dans le contexte actuel où il est de bon ton de s’afficher « vegan » et de faire mine de se délecter de plats à base de protéines végétales. Au moins devant les caméras ! « Oui, c’est un vrai problème », reconnaissait Bruno Dufayet. Qui plus est, ce phénomène tend à déteindre chez certains responsables politiques. Les prochaines échéances électorales vont permettre à l’interprofession de rencontrer les candidats et leurs équipes pour leur demander de clarifier leurs positions sur ces sujets.

« Quelle attitude un éleveur doit avoir face à ce genre de vidéos ? Que peut-il faire dans la mesure où une fois que ses animaux ont quitté son exploitation il ne sait pas forcément toujours où et comment (conventionnel, hallal ou casher) ils seront abattus ? Nous éleveurs, avons l’impression de bien faire notre travail, mais il faudrait aussi faire un peu de ménage chez certains acteurs du secteur de l’abattage. Certaines images diffusées sont quand même répréhensibles », soulignaient des éleveurs présents lors de ce débat.

Et Bruno Dufayet de préciser qu’Interbev vient de réaliser une vidéo à ce sujet. Visible sur le site la-viande.fr, elle explique ce qui se passe derrière les murs des abattoirs et permet de remédier à certaines lacunes. Quand on tape le mot « abattoir » sur un moteur de recherche sur internet ou sur un site de partage de vidéos en ligne ce sont des messages à charge, diffusés par des associations pro-vegan qui sont les plus directement accessibles.

Prendre la parole et expliquer ce que l’on fait

Mais toutes les associations travaillant pour améliorer le bien-être animal et l’environnement sont loin d’être forcément sectaires et fermées au dialogue. « Nous côtoyons régulièrement certaines d’entre elles. Nous leur mettons, entre autres, en avant le modèle alimentaire français et les nombreux services rendus sur l’environnement et le stockage du carbone par les surfaces en herbe et les haies », soulignait Bruno Dufayet.

L’opération Madeinviande sera reconduite en 2017. « C’est un moment important pour recevoir à la fois le grand public et la presse. Elle permet de montrer comment nous travaillons et nous aide à faire passer des messages. Le fait de mettre en avant notre produit et nos pratiques fait partie de nos missions. L’éleveur est le meilleur vecteur pour faire passer des messages auprès du grand public. Parler de ce que l’on fait au quotidien. Expliquer notre travail au fil des saisons… C’est à l’éleveur de prendre la parole », argumentait Bruno Dufayet.

« Tout au long de l’été, je rencontre régulièrement des randonneurs sur les estives utilisées par mes vaches. C’est l’occasion de discuter avec eux. Ils sont d’ailleurs souvent friands d’informations pour savoir comment sont élevés mes animaux. Je leur parle du métier très simplement et après le bon sens fait le reste », expliquait à ce sujet Alain Rivière, éleveur dans l’Ariège. La vente directe est aussi une excellente façon de communiquer. « Quand les clients viennent sur l’exploitation pour chercher leur colis de viande, cela permet de faire passer des messages », ajoutait l’un des participants. « J’aimerais que dans l’enseignement agricole, un module spécifique sur ce volet communication avec le grand public puisse être mis en place, quitte à passer un peu moins de temps sur certaines matières », ajoutait Bruno Dufayet.

L’effet boule de neige des réseaux sociaux

Le recours aux différents réseaux sociaux peut ensuite avoir un effet « boule de neige » pour faire passer des messages. « Entre l’amont et l’aval de la filière, il y a en France quelque 700 000 personnes dont l’activité professionnelle est liée à la viande ou à l’élevage. À Interbev, nous avons calculé que si seulement 10 % d’entre elles émettaient au moins une fois par mois un tweet ou un message sur Facebook en faveur de l’élevage et de la viande, nous serions plus nombreux que les promoteurs des régimes vegan et végétariens qui sont pourtant très actifs sur les réseaux sociaux. » Reste à trouver le bon angle afin que ces messages ne se traduisent pas non plus par l’inverse de l’effet escompté.

Pas d’usurpation du vocabulaire

Un steak est une tranche de viande issue d’un muscle de bovin et non un ersatz de protéines végétales ! Le fait de voir le vocabulaire de la boucherie régulièrement détourné par les promoteurs des protéines végétales a le don d’agacer les professionnels de la viande bovine. « C’est d’ailleurs tout le paradoxe des promoteurs des régimes végétariens ! Ils sont amenés à utiliser le vocabulaire jusque-là utilisé par les professionnels de la boucherie pour mettre en avant leurs produits », soulignait Bruno Dufayet. Et de préciser qu’un travail est actuellement réalisé par l’interprofession pour contrer ce phénomène en vue de protéger l’emploi de ces termes sur le plan juridique pour les réserver aux seules viande de boucherie.

« Blessé et humilié par vos propos »

Éleveur de Charolaises dans la Loire, François Garrivier a récemment réagi à des propos mensongers proférés sur la viande et l’élevage par Nagui, animateur d’une émission (1) diffusée sur une chaîne du service public. Il lui a écrit une lettre ouverte, accessible sur sa page Facebook. Un message largement partagé et commenté sur les réseaux sociaux tout au long du mois de décembre. En voici quelques extraits. « Depuis quelques jours, le téléspectateur fidèle que je suis est blessé et humilié par les propos que vous avez tenus. Ils jettent le discrédit sur mon métier. À deux reprises, lors des diffusions du 4 décembre puis du 10 décembre, vous avez tenu des propos mensongers et violents à l’encontre de nos méthodes d’élevage. Lors de la diffusion du 04 décembre, vos propos insinuent que les veaux sont enlevés à leurs mères, pour être conduits à l’abattoir, et qu’ensuite, lorsque l’on vous propose dans un bon restaurant parisien de « la viande de veau sous la mère », c’est une insulte que l’on vous adresse. Lors de la diffusion du 10 décembre, vous revenez sur le sujet, en disant que l’on consomme de la viande d’animaux qui n’ont que 30 jours. Vous dites ensuite que vous ne consommez quasiment plus de viande depuis que vous avez visionné les images de L214. Pire, dans la phrase suivante, vous dites « ne pas faire de prosélytisme pour la cause animale »… C’est pourtant ce que vous avez fait deux fois en moins de huit jours. […] Cher monsieur, mesurez-vous l’impact de tels propos ? […] Derrière la consommation de viande il y a des hommes et des femmes qui travaillent et s’efforcent de fournir à l’ensemble des consommateurs des produits d’une qualité irréprochable d’un point de vue gustatif, sanitaire et nutritif. […] Mais il est plus facile pour vous d’être le porte-parole de la bien-pensance parisienne, sans vérifier les informations, et de ne pas vous préoccuper du devenir des éleveurs, pourtant piliers de la vie rurale et de la beauté de notre territoire français. […] La cause animale, dans notre société moderne, doit être prise en compte. Je partage ce point de vue. Cette prise en compte se traduit par une réglementation très encadrée et par des directives européennes depuis plus de trente ans. Elle ne doit pas se faire de manière caricaturale et extrémiste. […] Vous donnez l’impression, d’être un animateur sérieux, travailleur, et non pourfendeur de sujets polémiques. Cette réputation m’apparaît fausse depuis vos récents propos… »

Et François Garrivier poursuit en lui demandant de pouvoir participer à ce jeu télévisé afin qu’il puisse par la même occasion rétablir certaines vérités. Et il invite ensuite Nagui à venir visiter son élevage… Puis à partager un moment de convivialité autour d’une entrecôte !

(1) Tout le monde veut prendre sa place

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