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Du « bale grazing » sur couverts ou prairies permanentes

Patrick Muller dispose à l’automne des balles d’enrubannage dans les paddocks qui seront parcourus pendant l’hiver. L’avancée dans le circuit s’équilibre entre pâturage de la pousse disponible et couverture des besoins par le fourrage.

À Aubange en Belgique, à deux pas de la frontière française, Patrick Muller fait vêler 130 vaches issues de croisements rotatifs entre les races salers, limousine et angus. Cinq lots d’animaux restent au pâturage durant la période hivernale : un lot de génisses sevrées au mois de novembre, un lot de génisses sevrées au mois d’août, un lot de génisses de 18 mois à la reproduction avec un taureau, un lot de vaches suitées (vêlages en août et septembre) ainsi qu’un lot de jeunes mâles sevrés.

Cette année, ce sont principalement des couverts, composés pour la plupart de sorgho multicoupe (piper) associé à un ou plusieurs trèfles (alexandrie et incarnat), qui sont le support de ce pâturage hivernal. Ils fournissent une pousse variable selon les années mais qui persiste en général jusqu’à fin janvier. Des lots d’animaux peuvent aussi être conduits en hiver sur des repousses de triticale pois dans lesquelles a été semé en direct du RGI, ou bien sur des prairies permanentes.

Depuis dix ans, Patrick Muller pratique le bale grazing pour ne pas avoir à entrer avec le tracteur dans les paddocks pendant l’hiver. « Je dépose des balles carrées de 120/70/200 qui ont été enrubannées par deux dans les parcelles. Je les dispose dressées pour pouvoir facilement enlever les ficelles, espacées d’environ sept mètres dans des couloirs délimités au fil électrique de dix mètres de large, explique l’éleveur. Je ne le fais pas avec des balles rondes car elles se tassent, et enlever les filets est fastidieux. »

Patrick Muller installe les balles fin octobre en général : le plus tard possible pour limiter les dégâts causés par les corbeaux qui déchirent le plastique, et avant la période de pluies plus fréquentes pour ne pas abîmer le sol. « Parfois je profite d’une période de gel en cours d’hiver pour réorganiser la disposition des balles », observe aussi l’éleveur.

Les lots d’animaux sont conduits dans les couloirs au fil avant et fil arrière. Des niveaux de chargement variables sont appliqués car le nombre d’animaux change d’une année à l’autre, et les couverts poussent plus ou moins selon la météo. Mais le chargement est élevé. Par exemple cet hiver, les 44 génisses de 18 mois avec un taureau parcourent 22 hectares. « Il n’est pas possible de prévoir comment les lots vont avancer, mais les animaux préfèrent le vert au fourrage s’ils ont le choix, observe Patrick Muller. Les fils sont déplacés tous les jours ou tous les deux jours. »

De la paille mélassée à disposition

Du fait que le fourrage distribué est de haute valeur alimentaire et le chargement élevé, Patrick Muller cherche à réduire le gaspillage. Pas question de dérouler l’enrubannage au sol. « Je dispose quatre barrières légères, vendues pour chevaux, autour des balles. Elles mesurent 3 mètres sur 1,60 m et pèsent environ 25 kg. Je les déplace à la main », explique-t-il. Il estime qu’il faudrait poser une tôle pleine sur les 50 à 60 centimètres du bas pour arriver à zéro % de gaspillage.

Chaque lot accède aussi en permanence à un râtelier avec de la paille mélassée. Selon sa fréquentation, l’éleveur jauge la situation. Ce râtelier est aussi le moyen de donner de la souplesse à l’organisation du travail : il permet de temps en temps aux animaux de patienter huit heures avant que l’éleveur n’ait le temps de venir les changer de paddock. « Ce râtelier est situé sur une zone 'parking' », explique Patrick Muller.

Pour parer aux possibles longues périodes de pluie, l’éleveur a organisé une zone "parking" pour chaque lot qui est au pré pendant l’hiver. Quand le bale grazing est terminé, les lots y sont nourris à 100 % avec du foin et ou de l’enrubannage le temps qu’il faut. À partir de mi-mars, les animaux consomment moins d’enrubannage et se remettent à pâturer exclusivement.

Une intervention au printemps sur les couverts

Patrick Muller cherche plutôt la sécurité, et ne veut pas de trous ou de retard de pousse dans les couverts. Dans cette optique, il réalise quasi systématiquement au printemps un passage de décompacteur puis de herse rotative et ressème un mélange de sorgho et de fourragères prairiales. « Comme ça, il y a une première coupe normale en volume et à la même date que les autres grâce au sorgho qui est ensilé. Et la prairie a le temps de redémarrer. »

Quand le bale grazing a été conduit sur prairies permanentes, dans certains cas, un passage de herse plate en avril peut suffire. D’autres fois, il faut ressemer entièrement la prairie.

Le "bale grazing" : une technique venue d’Amérique

Le bale grazing - pâturage de balles en anglais - consiste à disposer avant l’hiver des balles de fourrage - presque toujours de l’enrubannage mais aussi du foin - dans les parcelles qui seront parcourues sur cette période par les animaux.

« Cette technique facilite le prolongement au maximum de la durée du pâturage », explique Tom Duperret de la chambre d’agriculture de Bretagne. Elle permet de ne pas entrer au tracteur dans les parcelles durant l’hiver ce qui évite d’abîmer le sol, et surtout de gagner du temps de travail d’astreinte sur cette période. Souvent, cette technique permet aussi de réduire le nombre d’opérations de manutention des balles quand on arrive à bien s’organiser. Certains éleveurs les laissent carrément sur place à la récolte.

Pour certains éleveurs, l’intérêt est autant agronomique. On peut mettre en œuvre le bale grazing en particulier sur des prairies dégradées pour les rebooster par l’apport de matière organique via les déjections des animaux et via le fourrage non consommé qui retourne au sol.

Les balles sont disposées en ligne et les animaux sont conduits au fil avant dans des couloirs. Les balles peuvent être déroulées au sol ou non. Quand on déroule, il y a davantage de fourrage qui reste au sol mais la concurrence entre animaux est plus faible. À noter que cette technique demande une certaine rigueur en termes de suivi de la pousse d’herbe, du dimensionnement des paddocks en fonction de son chargement et de la météo.

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