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Deux dérobées dans le même silo

À Chenevières en Meurthe-et-Moselle, Francis Georges est à la tête d’un système naisseur-engraisseur avec achat où les dérobées sont devenues nécessaires pour permettre l’autonomie fourragère.

« J’ai commencé les dérobées en 2009 sur 8 hectares pour faire face à des stocks nettement insuffisants. Mi-juillet, j’avais semé un mélange trèfle d’Alexandrie + moha avec un combiné derrière des céréales après un travail du sol superficiel. À l’automne, il y avait peu de moha et beaucoup de trèfle mais globalement le rendement était correct. C’est ce qui m’a incité à persévérer les années suivantes », se souvient Francis Georges, éleveur à Chenevières, à une quarantaine de kilomètres au sud-est de Nancy. Sur son exploitation, il associe 80 vêlages, principalement charolais avec des mises bas du 15 août au 15 décembre pour un pic en septembre et un atelier d’engraissement de 200 places.

En 2010, ce même mélange moha + trèfle a été réutilisé, mais avec des résultats décevants suite à des dégâts de limace. Ce rendement trop modeste ramené au coût de la semence a surtout incité Francis Georges à changer son fusil d’épaule pour adopter l’année suivante le mélange avoine + pois + vesce, lequel demeure d’actualité avec quelques évolutions dans la proportion des trois espèces. Mais surtout le recours à une dérobée n’est plus analysé comme un simple bonus. « J’en ai besoin dans mon système fourrager actuel compte tenu du niveau de chargement, surtout avec des années comme 2017 où le printemps sec s’est traduit par des rendements en recul de 30% sur les premières coupes d’ensilage et de foin. »

Deux catégories de dérobées sont utilisées

L’exploitation totalise 90 hectares de surfaces cultivables avec un potentiel moyen de 65 qt/ha en céréales. Surfaces complétées par pratiquement autant de parcelles en herbe essentiellement situées en bordure de rivière. Les dérobées concernent trente hectares chaque année, semés derrière blé ou triticale avec 20 hectares d’un mélange avoine pois vesce auquel fait suite un maïs l’année suivante et 10 hectares d’une association RGI + trèfle suivie d’un sorgho fourrager.

Le mélange avoine-pois-vesce est semé en respectant à quelque chose près toujours les mêmes proportions. À savoir 100 kg d’avoine noire de printemps cultivée sur place, 80 kg de pois et 15 kg de vesce. Les semences sont brassées dans la mélangeuse puis mises en terre en semis direct au plus tôt après la moisson sans fertilisation ni herbicide une fois les pailles récoltées avec juste un coup de rouleau pour rappuyer le lit de semence. « En semis direct il faut semer un peu épais si on veut un sol bien couvert." Le prix de revient de la semence avoisine 70 €/ha. Pas de fertilisation. Les reliquats après récolte sont jugés suffisants et l’azote non absorbé par la céréale et celui issu de la minéralisation des matières organiques est bien valorisé. Ce fut tout particulièrement le cas cette année où les pluies estivales ont permis un beau redémarrage de la végétation après un printemps très sec. Dans le contexte de l’exploitation, ce mélange est considéré comme le meilleur compromis. Supprimer la vesce serait une éventualité mais sa présence permet de diversifier les légumineuses utilisées.

Le mélange RGI + trèfle est lui semé avec un combiné après un passage de cover-crop. Il est lui aussi suivi d'un coup de rouleau. Ces deux dérobées sont récoltées fin septembre. Les années précédentes, le mélange avoine-pois-vesce était enrubanné pour un rendement avoisinant en moyenne 2,5 TMS/ha. « On récolte un produit intéressant avec de bonnes valeurs nutritives. Cette année, cette dérobée a permis de pallier au déficit de récolte sur l’ensilage d’herbe du printemps. Il a été ensilé le 29 septembre, un jour et demi après avoir été fauché."

Cette année, les deux mélanges avoine-pois-vesce et RGI-trèfle ont été mis dans le même silo avec un rendement de 3,5 TMS/ha pour le premier et un petit 2 TMS/ha pour le second. Les pois étaient au stade fin floraison et l’avoine venait d’épier. Ils ont été associés à 30 hectares de seconde coupe de prairie naturelle ensilé la même semaine. Le silo a été réalisé en trois couches de façon à avoir une composition relativement homogène au moment de sa reprise. Il sera destiné aux femelles suitées à raison le matin d’une ration mélangée qui devrait se composer pour une vache de 20 à 25 kilos brut de cet ensilage, 1 kg de foin et 500 g de paille, soit 7 à 8 kg de MS/tête. Puis un repas de foin l’après-midi pour une quantité de matière sèche équivalente. Les primipares auront en plus 1,5 kg/tête de céréales et les multipares, quelques centaines de grammes, quantité symbolique visant surtout à les attirer au cornadis.

Comme les années précédentes les 20 hectares occupés par le mélange avoine-pois-vesce seront labourés en avril puis semés en maïs ensilage. Les 10 hectares occupés par le RGI-trèfle, seront fertilisés en fin d’hiver avec 60 unités d’azote puis ensilés début mai. Les années précédentes, cette coupe de printemps permettait d’obtenir 6 à 7 TMS/ha d’un ensilage classiquement utilisé pour les taurillons en cours d’été en complément d'autres fourrages. Comme les années précédentes, la parcelle sera ensuite labourée dans les jours qui suivent l’ensilage puis semée vers le 25 mai avec un sorgho fourrager récolté fin septembre (un peu plus de 11 TMS/ha cette année) puis suivie d’un blé ou d’un triticale.

Avec une exploitation un peu chargée, Francis Georges s’interroge aussi actuellement pour savoir s’il n’aurait pas intérêt à diminuer d’une dizaine le nombre de ses vêlages de façon à gagner en autonomie fourragère en ayant moins recours aux dérobées lesquelles ne donnent pas systématiquement chaque année de bons résultats.

Pas de dérobées pâturées

Le parcellaire de l’exploitation est traversé par plusieurs routes et une voie de chemin de fer longe les différentes parcelles labourables utilisées pour les dérobées. Il n’est donc pas envisageable de les faire pâturer. Derrière l’ensilage du mélange avoine-pois-vesce, il ne repousse de toute façon quasiment rien. Pas question non plus de prendre le risque de faire défoncer la surface de prairie RGI-trèfle pour faire pâturer en fin d’automne tout au plus 500 kg de MS/ha avec en plus la nécessité de poser une clôture.

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