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Cryptosporidiose du veau : associer des mesures hygiéniques et médicales

Le contrôle de la cryptosporidiose du veau est difficile. Docteur Christophe Chartier d’Oniris explique qu’il faut privilégier une approche résolument préventive s'appuyant sur le nettoyage et la désinfection des bâtiments et sur un volet médical.

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Retarder l’exposition des veaux aux ookystes est possible en les logeant en cases ou en parcs très propres pendant leurs deux ou trois premières semaines de vie.
© S.Bourgeois

La cryptosporidiose se transmet très rapidement entre veaux, les ookystes résistent dans l’environnement, et l’efficacité des traitements curatifs est imparfaite. C’est pourquoi l’approche préventive est la démarche à privilégier. « Des mesures d’hygiène et de bonne gestion du colostrum sont à associer à des mesures médicales avec traitement préventif et/ou vaccination», explique Dr Christophe Chartier.

Du côté des traitements, actuellement, deux molécules disposent d’une autorisation de mise sur le marché en France : la lactate d’halofuginone dans une indication préventive ou curative, et depuis 2022, le sulfate de paromomycine dans une indication uniquement curative.

Le lactate d’halofuginone présente une activité antiprotozoaires en particulier sur le parasite Cryptosporidium. Ce médicament est contre-indiqué sur les veaux dont la caillette est vide, en diarrhée depuis plus de 24 heures, ou dans un état de faiblesse. « Quinze études ont montré son effet significatif en prévention sur l’excrétion d’ookystes, mais aucune conclusion n’est faite sur l'efficacité d'une utilisation curative », indique Christophe Chartier. Il est à noter qu’une excrétion retardée d’ookystes est observée dans les lots traités.

Le sulfate de paromomycine est un antibiotique de la famille des aminoglycosides qui présente une activité antiprotozoaire. Son utilisation est strictement curative au travers d'une réduction d'excrétion d'ookystes sur les animaux traités. Comme tout antibiotique administré par voie orale, une analyse bénéfice/risques doit être faite par le vétérinaire concernant la sélection de bactéries résistantes dans la flore digestive. « Cette molécule ne peut pas s’utiliser en prophylaxie ou métaphylaxie », cadre Christophe Chartier.

Un vaccin qui réduit les signes cliniques

Depuis novembre 2023, la vaccination des génisses et des vaches gestantes contre Cryptosporidium parvum destiné à l’immunisation passive des veaux par le colostrum et lait de transition est autorisée dans l’UE. L’indication est la réduction des signes cliniques dus à Cryptosporidium parvum chez les veaux nouveau-nés, l’immunité passive débutant avec la prise de colostrum et se poursuivant jusqu’à l’âge de 2 semaines si le colostrum a bien été ingéré en quantité (au moins 3 litres avant 6 heures de vie puis 5 jours le lait de transition. « Les résultats expérimentaux chez le veau montrent une réduction de la diarrhée et plus généralement un meilleur score de santé (état général, appétit et pli de peau) du 4e au 11e jour post-infection. »

Il existe un aliment complémentaire que l'on peut donner aux veaux à base de charbon végétal et de zinc, qui a prouvé des résultats intéressants chez le chevreau en préventif. Les éleveurs donnent aussi des compléments alimentaires de prévention à base d'extraits végétaux, mais leur effet n'est pas validé par des publications scientifiques.

L’approche sanitaire est primordiale : elle consiste à sécuriser la prise de colostrum des veaux, et à mettre en place des mesures d’hygiène relativement rigoureuses pour abaisser la pression parasitaire environnementale.

Retarder les contacts avec les cryptosporidies

Pour limiter les contacts des plus jeunes animaux avec les parasites, entre chaque période de vêlages, les bâtiments doivent être curés, nettoyés à chaud (plus de 60 °C pendant 5 à 10 minutes) à haute pression puis désinfectés avant respect d’un vide sanitaire.

Les désinfectants usuels sont peu efficaces aux doses usuelles contre Cryptosporidium parvum. « Toutefois, un certain nombre de spécialités à base de peroxyde d’hydrogène, de chloro-méthylphénol, de chlorocrésol ou d’amines ont été validées pour leur efficacité vis-à-vis de Cryptosporidium (réduction significative de la viabilité et de l’infectivité des ookystes). »

En plus, il faut retarder l’exposition des veaux en les logeant en cases ou en parcs très propres pendant leurs deux ou trois premières semaines de vie. « Il est aussi souhaitable de ne pas avoir de classes d’âge différentes dans un lot, et s'il y a des malades, de ne pas placer les nouveau-nés dans les mêmes locaux qu’eux. » Il faut d’ailleurs attendre une semaine après l’arrêt de la diarrhée pour ramener les malades avec les autres veaux en raison d’une excrétion persistante élevée d’ookystes. 

La  « marche en avant » évite la transmission de la maladie par l’éleveur ou le matériel : les soins aux animaux malades ou en convalescence sont à faire en dernier avant de quitter les bâtiments. Vêtements, bottes et matériel d’élevage sont aussi à nettoyer et à désinfecter.  

Le compostage du fumier à plus de 60 °C et éventuellement leur méthanisation participent aussi à baisser la pression parasitaire.

« Les ookystes résistent à l'hiver dans une prairie. Le risque d'infection des veaux dans les prairies où vêlent chaque année des vaches, souvent autour des bâtiments, existe. Il dépend de leur concentration, qui est moins importante à l'extérieur qu'en bâtiment.»  

Un diagnostic en laboratoire ou avec un kit rapide

La cryptosporidiose du veau est une diarrhée due au parasite Cryptosporidium parvum, de la famille des coccidies. Les signes cliniques apparaissent entre l’âge de 5 et 18 jours. Les veaux sont moins réceptifs ou sensibles au-delà de leur troisième semaine. 

L’aspect de la diarrhée ne permet pas d’orienter le diagnostic vers la cryptosporidiose. Les co-infections avec d’autres agents infectieux (colibacilles, mais surtout rotavirus ou coronavirus) sont fréquentes. « Le diagnostic de laboratoire sur les matières fécales de veau malade doit se faire toujours de façon différentielle. On considère un niveau d’excrétion de 100 000 opg (œuf par gramme) comme compatible avec des signes cliniques », note Christophe Chartier. Un diagnostic semi-quantitatif est ainsi nécessaire soit par frottis de fèces avec comptage des ookystes en laboratoire, soit par kit de diagnostic rapide (tigettes). « Les tigettes de diagnostic rapide ont une sensibilité acceptable pour détecter des niveaux d’excrétion d’ookystes associés à des signes cliniques. »

Le veau est abattu, ne mange pas et a des douleurs abdominales. Quand il guérit, la restauration des fonctions intestinales prend plusieurs semaines. « Après leur rétablissement, la réinfection des veaux est possible, mais demeure limitée. »

A noter

La cryptosporidiose est une zoonose. Cryptosporidium parvum comprend des sous-types communs aux animaux (veaux, chevreaux, agneaux, rongeurs, cervidés, etc) et à l'homme. Elle atteint principalement les enfants et les personnes immunodéprimées.

Des facteurs de risque encore mal connus

Les épisodes de cryptosporidiose clinique ne touchent que certains troupeaux et seulement certaines années, alors que le parasite est probablement présent dans 100 % des élevages. Les facteurs de risque sont liés à l’hygiène des locaux et à la conduite d’élevage, mais ils ne sont pas toujours faciles à identifier précisément.

« L’excrétion de Cryptosporidium parvum par les vaches adultes a été mise en évidence en élevage laitier comme allaitant, mais l’intensité d’excrétion est extrêmement faible. Ainsi, le rôle de réservoir des ruminants adultes est incontestable, mais son importance dans le développement de la cryptosporidiose clinique chez les veaux est probablement limitée », explique Christophe Chartier.

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