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Attention à la fertilité des sols en agriculture biologique

Sans apports réguliers, les teneurs en phosphore et en potasse diminuent. Des solutions ont été éprouvées pour corriger ces carences sur la ferme expérimentale des Bordes, dans l’Indre.

La fertilité chimique des sols exploités en agriculture biologique s’amoindrit inévitablement si des apports ne sont pas effectués. Cependant, tous les produits fertilisants autorisés en agriculture biologique n’ont pas les mêmes effets.
La fertilité chimique des sols exploités en agriculture biologique s’amoindrit inévitablement si des apports ne sont pas effectués. Cependant, tous les produits fertilisants autorisés en agriculture biologique n’ont pas les mêmes effets.
© Réussir SA

« La ferme de polyculture élevage n’est pas forcément autonome en intrants ! » C’est le constat fait à la ferme expérimentale des Bordes, sur son système limousin naisseur-engraisseur de bœufs et de génisses lourdes de 36 mois, conduit en agriculture biologique depuis 2001.

« Jusqu’en 2010, on atteignait l’autonomie fourragère une année sur deux, en ne tenant compte que de la production de l’année. Avec les reports de stocks, l’autonomie était finalement couverte tous les ans. Mais depuis 2011, on ne parvient à l’autonomie fourragère qu’une à deux années sur cinq. On arrivait à compléter avec les reports mais la situation devenait critique aussi bien en rendement qu’en qualité (1) », souligne Carole Gigot, ingénieure régionale fourrages à la ferme expérimentale des Bordes pour Arvalis. Et pour cause, les teneurs en phosphore et en potasse ont fortement diminué sur les parcelles de l’élevage.

Un appauvrissement des teneurs en phosphore et potasse

En 1999, avant la conversion, une analyse de terre a été réalisée. « Déjà à l’époque, les résultats montraient que nous vivions sur les réserves de la parcelle. Sur les six parcelles analysées, trois se situaient en dessous du seuil renforcement (2) pour les teneurs en phosphore, deux pour celles en potasse et l’intégralité d’entre elles se trouvait en dessous du seuil d’impasse », commente Carole Gigot.

Attention à la fertilité des sols en agriculture biologique

Dix-sept ans plus tard, les analyses font apparaître une chute des teneurs pour la totalité des surfaces, en phosphore, et pour certaines, en potasse. Et ce, malgré un apport d’effluents produits sur l’exploitation sous forme de compost à raison de 8 tonnes par hectare sur un quart des parcelles. « Ainsi, ces apports ne suffisent pas à éviter un appauvrissement des terres en phosphore et en potasse. » Le phosphore représente le premier facteur limitant pour la croissance des légumineuses, suivi de la potasse.

La fertilité chimique des sols exploités en agriculture biologique s’amoindrit inévitablement si des apports ne sont pas effectués. « Or, tous les produits fertilisants autorisés en agriculture biologique n’ont pas les mêmes effets sur la productivité et la qualité des prairies temporaires ou permanentes », reprend l’experte. D’où la mise en place d’une série d’essais comparatifs en plein champ, en 2017, sur la ferme des Bordes.

Différents fertilisants au banc d’essais

Dix produits fertilisants ou amendements ont été testés et comparés à un témoin sans apport sur prairies permanentes, ainsi que deux stratégies, une fertilisation tous les ans contre une fertilisation uniquement en première année. « Il est difficile de tirer des conclusions sur ces deux stratégies de fertilisation car la partie fertilisée seulement la première année était dans une zone de la parcelle à meilleur potentiel. Par contre, sur la partie fertilisée qu’en première année, on observe un arrière-effet significatif pour les modalités effluents d’élevage de la ferme, en particulier lors d’un apport à l’automne et ce, jusqu’au premier cycle de 2019. » Parmi les éléments testés (phosphate naturel, sulfate de potassium avec sel de magnésium, sulfate de potassium, sulfate de magnésium, soufre élémentaire, bore, phosphate naturel-patenkali-bore, effluent sortie d’hiver, effluent automne et compost de déchets verts), les effluents d’élevages permettent de produire davantage que les autres produits utilisés dès la troisième année d’exploitation.

Sur prairie temporaire semée en fin d’été 2017 (mélange T10 - Dactyle, fétuque élevée, ray-grass anglais, luzerne et trèfle violet), neuf modalités ont été essayées et comparées à un témoin non fertilisé (phosphate naturel, sulfate de potassium avec sel de magnésium, sulfate de potassium, sulfate de magnésium, soufre élémentaire, phosphate naturel-patenkali, effluent sortie hiver, effluent automne, fiente de poules). Là encore, les meilleurs rendements cumulés sur quatre ans sont obtenus avec les effluents d’élevages et la fiente de poules.

Les effluents d’élevages ressortent gagnants

Si les effluents d’élevages permettent de produire davantage que les autres produits testés, ils entraînent une simplification du couvert. Très riches en azote, ils contribuent à diminuer la présence des légumineuses dès la deuxième année au profit des graminées. Parmi les autres produits étudiés, le microthiol (soufre élémentaire) a provoqué une acidification du sol néfaste au développement des légumineuses.

« À la lumière de ces essais, nous avons décidé de changer de stratégie dès 2020 en nous procurant de la fiente de volaille ou du lisier de porc, selon les disponibilités, pour fertiliser davantage de surfaces. Il semblerait que cette stratégie ait eu pour effet d’améliorer les teneurs dans les sols en phosphore et en potasse », conclut Carole Gigot.

(1) Diminution du pourcentage de matière azotée totale des fourrages issus des prairies.
(2) Méthode Comifer du calcul de la fertilisation azotée par culture.

Chiffres clés

64 ha de SAU dont 54 d’herbe et 10 de cultures (méteil : triticale, seigle avoine, féverole, pois fourrager), avec une rotation de 4 ans de prairies, et de 2 ans de méteil grain

1,15 UGB/ha d’herbe

23 vêlages

Trouver le bon compromis

« La fertilisation est un levier non négligeable pour atteindre dans un premier temps l’autonomie fourragère mais aussi l’autonomie protéique. Elle peut également impacter le pH du sol, autre facteur limitant de la croissance des légumineuses », souligne Carole Gigot d’Arvalis. Il faut ainsi réussir à trouver le bon compromis pour valoriser les effluents d’élevages tout en conservant une part de légumineuses satisfaisante. Les produits et les doses sont donc à réfléchir en fonction des objectifs.

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