En Loire-Atlantique : « Le déracage de la vigne permet de recourir à du personnel non qualifié »
Le viticulteur ligérien Damien Grandjouan pratique une prétaille manuelle sur ses vignes conduites en guyot simple alterné. Cela lui permet d’avoir recours à de la main-d’œuvre non qualifiée pour simplifier le travail des tailleurs derrière.
Le viticulteur ligérien Damien Grandjouan pratique une prétaille manuelle sur ses vignes conduites en guyot simple alterné. Cela lui permet d’avoir recours à de la main-d’œuvre non qualifiée pour simplifier le travail des tailleurs derrière.
« Prétaille de la vigne, déracage (H/F). Domaine viticole sur Saint-Mars-de-Coutais, recherche une personne motivée pour la prétaille de la vigne, dès que possible pour une durée de trois mois environ. Expérience en travail extérieur souhaitée. CDD 35 heures par semaine. Tarif horaire en fonction du niveau de maîtrise de la taille. Sécateur électrique fourni. » C’est par ces quelques lignes d’annonce que Damien Grandjouan, viticulteur au Domaine Grandjouan, à Saint-Mars-de-Coutais, en Loire-Atlantique, recrute ses saisonniers qui effectueront le déracage sur son domaine, une pratique historique du vignoble nantais, qui permet de gagner du temps à la taille.
Quatre convocations pour un saisonnier effectivement embauché
« Je publie cette annonce sur France Travail et sur Leboncoin, confirme Damien Grandjouan. Le déracage est une opération pouvant être réalisée par tous, même des personnes non expérimentées. » Cette année, il a convoqué quatre personnes par ce biais. « Seules deux sont venues, regrette le viticulteur. On a beau leur envoyer un SMS avec toutes les informations nécessaires, les personnes disent oui, oui, mais elles ne viennent pas, sans prévenir. » Au bilan l’une des deux personnes a estimé que le domaine était trop loin de chez elle, ayant eu une proposition d’un autre exploitant viticole situé plus près de son domicile. Et l’autre a été embauchée pour déraquer dès début novembre. « J’ai aussi une autre personne qui a postulé, mais qui est expérimentée, et qui fera de la taille », observe-t-il. Damien Grandjouan continue néanmoins à regarder les CV au cas où cela ne se passerait pas bien avec le saisonnier embauché.
Une opération qui s’étale sur environ deux mois
Au Domaine Grandjouan, le déracage dure environ deux mois à une personne, à raison d’environ trois jours par hectare. L’opération va plus ou moins vite selon les cépages. « Le chardonnay fait beaucoup de bois, son déracage est donc plus long, illustre le vigneron. À l’inverse, le grolleau va beaucoup plus vite, il est moins enroulé, car nous dédoublons derrière : quand la baguette fructifère pousse, nous ne laissons qu’un brin par œil ; c’est comme un ébourgeonnage de la tête. Du coup cela limite la quantité de bois au déracage. » Derrière cette prétaille manuelle, une équipe passe pour tailler puis plier, ou tailler et plier simultanément, selon les cépages.
Attention à ne pas tout enlever et à ne pas couper de fils
Avant que le saisonnier ne commence le déracage, Damien Grandjouan édicte les consignes. « Nous sommes en vignes non palissées, il y a juste un fil porteur, contextualise-t-il. Nous demandons à ce que le saisonnier ôte la baguette fructifère de l’année, qui est enroulée autour du fil. C’est un genre de tirage des bois à l’envers ou de prétaillage manuel, qui serait impossible à faire avec une machine. »
Pour faciliter l’opération et diminuer le risque d’erreur, le vigneron forme sommairement le saisonnier. « On lui fait d’abord identifier les bois d’un an, de deux ans, afin de bien visualiser où se situe la baguette, décrit-il. Ce n’est pas toujours évident car nous avons des marcottages, etc. » Ensuite, le vigneron donne des repères visuels par rapport au fil porteur ou au bras. « Il est possible de se tromper, témoigne-t-il. Certains saisonniers enlèvent tout. On insiste donc sur le fait qu’il faut laisser un ou deux sarments minimum, mais qu’il faut juger en fonction de la hauteur. S’il y a des erreurs, cela ne prête pas forcément à conséquence, puisqu’on reprend les trois quarts lors de la taille derrière. »
Les bois à enlever étant gros, Damien Grandjouan équipe le saisonnier d’un sécateur électrique, tout en précisant bien qu’il faut éviter de couper le fil porteur. « Mais la première semaine, le déraqueur coupe au moins deux ou trois fils, ensuite un ou deux dans la saison, note-t-il. Le premier jour, tout va bien. Mais derrière, dès que le saisonnier commence à avoir le rythme, c’est là qu’il coupe des fils. »
Les déraqueurs, de la main-d’œuvre souvent payée au Smic
Pour le vigneron, l’intérêt de cette technique ancestrale est de pouvoir avoir recours à de la main-d’œuvre non qualifiée, les bons tailleurs étant rares. « Souvent, les tailleurs, on les voit durant un an ou deux, puis ils bougent, rapporte-t-il. C’est le principe des saisonniers, ils aiment changer d’endroit. » Autre avantage, les déraqueurs sont payés moins cher que des tailleurs confirmés. « Je les paie au Smic, détaille Damien Grandjouan. Et je rajoute s’ils trouvent un bon rythme, cohérent, et sont motivés. » Cela lui permet de consacrer le salarié du domaine à la taille à proprement parler, au pliage et au marcottage. « À part cette année où nous avons vendangé très tôt, notre salarié n’effectue pas de déracage », insiste-t-il. En revanche, il estime que ce double passage pour tailler est plus chronophage qu’une taille classique, le déracage ne supprimant qu’à peu près un tiers du temps de taille du salarié.
repères
Domaine Grandjouan, à Saint-Mars-de-Coutais, en Loire-Atlantique
SUPERFICIE 17 ha
ENCÉPAGEMENT chardonnay, sauvignon, grolleau gris, grolleau rosé, gamay, cabernet franc, folle blanche, melon de Bourgogne
DENOMINATIONS IGP val de loire, AOC muscadet et gros plant
DENSITÉ DE PLANTATION 6 950 pieds/ha
TAILLE guyot simple alterné
PRODUCTION ANNUELLE environ 1 600 à 1 700 hectolitres
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