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Agroforesterie et eau : « La présence d’arbres favorise l’infiltration dans les nappes profondes »

Éric Cirou, chargé de mission agroforesterie à la chambre d’agriculture Charente-Maritime Deux-Sèvres, livre ce que l’on sait de l’incidence de cette pratique sur la ressource en eau. Les connaissances en la matière restent à affiner.

alignement d'arbres en agroforesterie dans une parcelle de grandes cultures
© M.-.C. Bidault

C’est en Charente-Maritime que se trouve la plus ancienne parcelle française d’agroforesterie associant des alignements d’arbres et des céréales (début des années 1970) et sur laquelle les chercheurs ont mis en place de nombreux suivis.

Éric Cirou, chargé de mission agroforesterie à la chambre d’agriculture Charente-Maritime Deux-Sèvres, dresse quelques enseignements concernant l’incidence de l’agroforesterie sur la ressource en eau.

Que sait-on du lien entre arbre et eau du sol ?

E.C. - Si l’intérêt des arbres en termes de vie du sol, biodiversité ou qualité paysagère ne fait plus aucun doute, celui relatif à l’eau est plus difficile à appréhender. Sur l’aspect protection de la ressource, les retours de différentes régions montrent que des alignements d’arbres bien positionnés avec des bandes enherbées en bout de parcelle permettent de casser les dynamiques de ruissellement superficiel, de lessivage et donc d’érosion des sols. Le phénomène est tout simplement mécanique. Autre point qui est assez évident, la présence d’arbres crée un microclimat sur la parcelle, en raison de l’augmentation de l’humidité de l’air, du bruissement des feuilles, de l’ombrage. Les céréales supportent normalement mieux les coups de chaud.

Qu’en est-il sur le volet infiltration de l’eau et rechargement des nappes ?

E.C. - C’est plus compliqué. Les travaux sur les haies classiques montrent une meilleure infiltration via les systèmes racinaires et une amélioration du complexe argilo-humique. Sur des alignements d’arbres intraparcellaires, il y a ce même effet mécanique, avec une rétention d’eau en amont des arbres et une infiltration dans le sol. Mais est-ce le fait de la matière organique ou du type de sol permettant un enracinement des arbres plus ou moins profond, difficile à dire. Un autre effet potentiel des arbres est celui sur la capacité de stockage en eau des sols à l’automne. L’arbre va s’approvisionner sur une nappe plus profonde que les céréales (si on est en sol profond) et faire baisser celle-ci en fin d’été.

Résultat, le sol se comporte comme une éponge bien essorée, ce qui favorise une meilleure absorption des pluies automnales, une meilleure infiltration dans les nappes profondes et moins de perte par ruissellement. Mais là encore, ce n’est pas simple à prouver. Enfin, un élément plus contesté, pour lequel les chercheurs sont incertains, est celui de l’effet pompe à eau. Le fait, supposé, que l’arbre prélève de l’eau en profondeur pour la rendre disponible en surface pour les céréales et améliore ainsi la réserve utile du sol n’a pas été formellement démontré. Il y a beaucoup d’interactions et on ne sait pas vraiment quelle est la zone d’influence de l’arbre.

Y a-t-il des principes à respecter pour favoriser l’effet de l’arbre ?

E.C. - Il est difficile de reproduire un modèle donné, il y a juste quelques conseils à adapter à chaque situation. Un point important est notamment de choisir un arbre à racine pivotante plutôt que traçante, éviter les sols compacts, adapter l’espacement des arbres, ne pas dépasser trente à quarante arbres par hectare. Au moment de la plantation, il est conseillé de réaliser un cernage du plant (opération consistant à sectionner le pivot et les racines de jeunes plants en vue de favoriser le développement du chevelu) pour favoriser un enracinement vertical et implanter dans une culture d’hiver déjà installée, plutôt qu’une culture de printemps à venir. On cherche à avoir une occupation du sol par la culture avant le développement de l’arbre pour l’obliger à aller chercher en profondeur.

Il faut aussi peut-être semer des variétés de céréales plus rustiques qui supporteront mieux la concurrence et l’ombrage. Enfin, les agriculteurs ont tendance à vouloir faire de l’agroforesterie sur des parcelles à faible potentiel agronomique pour les valoriser. C’est l’inverse qui est préconisé pour un bon développement des arbres et des céréales. Cela veut dire qu’on ne va pas faire de l’agroforesterie sur toutes ses parcelles.

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