Baisse du cheptel bovin laitier : quelles sont les recommandations du CGAAER pour l’enrayer ?
Dans un rapport sur la baisse du cheptel bovin laitier datant de mai 2025 et qui vient d’être rendu public, le CGAAER revient sur les causes et les conséquences de ce phénomène sur l'aval et avance plusieurs recommandations pour y remédier.
Dans un rapport sur la baisse du cheptel bovin laitier datant de mai 2025 et qui vient d’être rendu public, le CGAAER revient sur les causes et les conséquences de ce phénomène sur l'aval et avance plusieurs recommandations pour y remédier.
Dans un rapport intitulé « Baisse du cheptel bovin laitier et ses incidences sur les outils économiques aval des filières » remontant à mai 2025 et qui vient d’être publié, le CGAAER rappelle que le cheptel bovin laitier est passé de 3,586 à 3,645 millions de vaches (+ 1,6 %) entre la fin 2012 et l’été 2014 à la faveur d’un marché mondial porteur et la fin du régime des quotas laitiers.
Mais une hausse de la production dans les trois bassins exportateurs (Union européenne, Etats-Unis et Nouvelle-Zélande) et le recul de la demande asiatique a conduit à une crise majeure des filières laitières européennes. Cette période a marqué le début d’une décapitalisation sans interruption du cheptel laitier français qui s’est accélérée à partir de 2018.
Entre 2018 et 2024, les effectifs de vaches laitières ont diminué en moyenne de 2,2 % par an, pour atteindre 3,1 millions de têtes. En parallèle, la collecte a été relativement préservée grâce à une forte hausse du rendement laitier par vache, souligne le CGAAER.
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Eleveurs âgés non remplacés et déficit d’attractivité de la profession
Même si les causes de cette décapitalisation sont multiples, le rapport explique qu’elle « résulte avant tout de l’arrêt d’un grand nombre d’exploitations laitières suite au départ massif des éleveurs âgés ces cinq dernières années et à un taux de remplacement de 40 %, insuffisant et faible comparé à l’ensemble de l’agriculture ».
Selon lui, le déficit d’attractivité s’explique en particulier par le niveau de rémunération, « modeste par rapport au temps travaillé et au capital investi », aux astreintes spécifiques à cet élevage et à l’image du métier dans la société.
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Développer le salariat pour alléger les contraintes du métier d’éleveur
Le rapport estime qu’« une attention particulière devra être portée, lors de la programmation de la prochaine PAC, au maintien des aides pour les exploitations de bovins laitiers afin de consolider les revenus des éleveurs, en particulier dans les zones de montagne et de polyculture élevage ». Il affirme par ailleurs que le développement du salariat dans ces exploitations est souhaitable pour « alléger les contraintes spécifiques et pour faire connaître le métier » et ajoute : « Quand elle se passe dans de bonnes conditions, une expérience préalable facilite les installations futures ».
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Mieux faire connaître le métier de producteur de lait
En matière de compétences, le rapport suggère de renforcer la maîtrise des connaissances fondamentales à la conduite d’une exploitation laitière pour les futurs exploitants et les salariés, lors des formations initiales et continues, et d’inciter les chefs d’exploitation qui accueillent des stagiaires ou de la main-d’œuvre à se former au management et au droit du travail.
Il insiste sur l’importance de généraliser les stages à l’étranger afin de développer l’esprit d’ouverture des jeunes. Le rapport souline qu’alors que l’élevage de bovins laitiers ne bénéficie pas d’une image attrayante dans la société, les éleveurs parlent de leur profession avec passion. Pour enrayer ce paradoxe, selon le CGAAER, les représentants des éleveurs et les interprofessions nationales et régionales doivent mieux faire connaître le métier de producteur de lait et plus globalement les atouts de la filière laitière : emploi, aménagement du territoire, environnement, etc.
Aider les laiteries à reconquérir des marchés
Afin de soutenir la compétitivité des laiteries pour leur permettre de reconquérir les marchés de la 2e transformation et de la RHD et d’investir dans les produits innovants, le rapport préconise de renforcer les dispositifs de soutiens financiers aux entreprises (État, BPI, conseils régionaux), quelle que soit leur taille. Il préconise par ailleurs d’analyser les sources de complexité administrative et normative à l’instar de ce qui a été fait pour l’amont agricole.
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Soutenir les projets de création ou de restructuration d’abattoirs
Le rapport rappelle que depuis quelques mois, les abattoirs et les ateliers de fabrication de steak haché font face à un déficit d’approvisionnement alors que la demande continue de croître (56 % de la consommation des ménages en 2023). Selon lui, il en résulte « une surcapacité en équipements d’abattage, non compensée par les fermetures d’établissements, ainsi qu’une concurrence exacerbée sur les approvisionnements et sur un territoire de plus en plus grand ». Le CGAAER en conclut que « le soutien à des projets de création ou de restructuration importante d’abattoirs mérite d’être analysé sous l’angle de la viabilité des outils ».
« Réfléchir à l’avenir de l’élevage laitier en tenant compte de l’ensembles des débouchés et des acteurs économiques »
Le CGAAER recommande que « ces dossiers soient soumis à l’avis non contraignant d’une commission indépendante constituée de personnes qualifiées ». Selon lui, la production contractualisée de jeunes animaux correspondant aux besoins techniques et économiques de l’abattage et de la transformation se développe sous l’impulsion des industriels de la viande. Il constate que les ateliers de veaux souffrent d’une pénurie saisonnière d’animaux et n’attirent plus d’éleveurs. Le rapport estime qu’ « il serait donc souhaitable de structurer une réflexion approfondie et commune aux deux interprofessions sur l’avenir de l’élevage laitier qui tienne compte de l’ensemble des débouchés et des acteurs économiques ».
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Soutenir l’investissement dans les industries agroalimentaires des secteurs lait et viande
Le CGAAER qui estime que la France a des atouts pour accroître sa production laitière souligne « la nécessité d’une approche partagée des enjeux entre l’amont et l’aval de la filière (stratégies industrielles et commerciales) ». Selon lui, un soutien à l’investissement dans les industries agroalimentaires des secteurs lait et viande est nécessaire pour maintenir leur niveau de compétitivité et d’innovation et ainsi « endiguer la croissance des importations et le repli des exportations sur les marchés européen et international ». Toujours selon lui, les conseils régionaux et les interprofessions CNIEL et Interbev (lait et viande bovine) régionales, avec l’appui des services de l’État, « pourraient être les catalyseurs d’une réflexion commune sur l’élevage laitier et ses débouchés ».
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