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Quand le bois innove

Deux nouveautés attendaient les visiteurs du Vinitech 2014 en matière de bois. Le Sablier de vinification de Radoux d’une part, et la barrique connectée Vitia-F de R-tech œnologie d’autre part. Voici où en sont ces outils près de trois ans après leur lancement.

Radoux a profité du Vinitech pour présenter son prototype du Sablier de vinification.
Radoux a profité du Vinitech pour présenter son prototype du Sablier de vinification.
© C. de Nadaillac
 

Radoux Un Sablier pour se passer de remontages

Sur le Vinitech 2014, impossible de le louper. Le prototype du Sablier de vinification de Radoux trônait, majestueux, sur le stand du tonnelier. Cette pièce, constituée de deux cuves en bois tronconiques assemblées entre elles par leur partie la plus étroite, via un réducteur en inox, avait été développée pour « favoriser une extraction douce », comme le soulignait Pierre-Guillaume Chiberry, directeur commercial de la tonnellerie. L’ensemble était installé sur un châssis et un axe, permettant à l’utilisateur de faire pivoter le contenant. Ce faisant, le vin devait être brassé et immerger le chapeau de marc, sans aucun remontage ou pigeage. Les pellicules remontaient ensuite lentement à la surface. Elle pouvait également permettre d’ôter les pépins, et en ajoutant une bonde, de brasser les lies en élevage. Le Sablier était élaboré en chêne français, de chauffe légère à moyenne. Un système de thermorégulation, positionné dans les fonds du balancier et dans le réducteur du milieu, complétait l’équipement.

Le Sablier est constitué de deux cuves en bois tronconiques assemblées entre elles par leur partie la plus étroite, via un réducteur en inox.

À l’époque, la tonnellerie annonçait que ce contenant serait disponible en version 10 hl avec renversement manuel, ou en 20 hl, avec renversement automatique. Le modèle 10 hl, d’un encombrement de 2,50 m sur 2 m, était annoncé à 10 000 euros. Mais trois ans plus tard, l’outil est toujours en développement. « Nous sommes en cours de réglages, indique Pierre-Guillaume Chiberry. Le Sablier va être électrifié pour faciliter son retournement. Il devra donc répondre à des normes de sécurité et être certifié. » Radoux prévoit une commercialisation pour les vendanges 2018, en version 20 hl uniquement, à un tarif d’environ 1 000 euros l’hectolitre.

Néanmoins, l’œnologue conseil Stéphane Toutoundji, et le maître de chai du prestataire bordelais Performances Vignobles, Sébastien Xans, ont conjointement comparé ce contenant à une cuve inox et une vinification intégrale sur merlot en 2015 et cabernet franc en 2016. Et ils sont unanimes : le Sablier est un outil intéressant. « Le phénomène de compression/décompression provoqué par le renversement du sablier permet une extraction très douce, débute le premier. Nous obtenons une qualité de tanins que nous n’avons pas avec les pigeages ou avec la vinification intégrale. Ils sont plus enrobés. » Il estime que le toucher en bouche est meilleur ; la couleur plus profonde. Sébastien Xans va même plus loin. « Le lot vinifié dans le Sablier avait une couleur plus éclatante et plus violine que les deux autres, sans toutefois l’aspect toasté et chauffe du bois. Au nez, il y avait davantage de fruit. C’était concentré et frais. En bouche, les tanins étaient soyeux et élégants ; avec une belle longueur et sans agressivité. »

Pour arriver à ce résultat, Sébastien Xans a effectué de nombreux cycles de remuage. Ainsi, lors de la macération carbonique préfermentaire, il a réalisé deux demi-tours par jour. Puis, en début de fermentation alcoolique (FA), il est passé à six demi-tours quotidiens ; et ce, jusqu’à 1040 de densité. Il est ensuite tombé à trois demi-tours et a stoppé toute intervention à partir de 1010 de densité. Il a constaté que la FA est plus longue dans les contenants en bois. En 2015, elle a duré une douzaine de jours dans le Sablier et dans les barriques, contre 9 en cuve inox. Mais leurs jus de presse sont beaucoup plus qualitatifs. Tant et si bien qu’après une petite sédimentation, il les a réintégrés au jus.

Au final, Sébastien Xans juge que cet outil a un intérêt technique indéniable. Néanmoins, il souligne qu’il nécessite de disposer de pas mal d’espace dans le chai. De même, il implique de nombreuses manutentions, qui sont compliquées tant que le sablier ne contient que des baies et pas de jus, le transfert des masses se faisant difficilement. Mais cet inconvénient devrait disparaître avec l’automatisation et la programmation en cours. Par ailleurs, il estime qu’il faut trouver la manière et les équipements adéquats pour décuver. « En 2015, ça a été plutôt compliqué car nous n’avions que du matériel adapté aux portes hautes, explique Sébastien Xans. Mais en 2016, cela s’est mieux déroulé. Nous avons disposé un bassin dessous, en semi-rotation. » Il juge le nettoyage simple, les fonds s’ôtant tous les deux et étant en inox. « C’est comme pour une barrique ou un foudre, indique-t-il. Je passe la canne Moog et je mèche. » Enfin, il souligne que cet outil, très agréable à travailler, attise la curiosité des touristes, et est un véritable attrait pour la communication et l’œnotourisme…

R-tech œnologie Une barrique connectée

De son côté, la société bourguignonne R-tech œnologie profitait du Vinitech 2014 pour présenter une barrique high-tech. La Vitia-F exposée était composée de deux couches de bois, la première servant de coque extérieure, la seconde, en chêne français, accueillant le vin. Entre les deux, le vigneron pouvait, en option, faire installer un système de thermorégulation, avec une pompe à chaleur. De même, il pouvait bénéficier d’un système de micro-oxygénation, d’un brasseur, d’une vis sans fin pour extraire facilement les lies, ou encore de capteurs mesurant le pH du vin, le taux d’oxygène, de dioxyde de carbone ou de soufre dissous, le taux de SO2 libre ou encore le niveau d’éthanal. Le fût possédait en outre un contrôle automatique de la température et de la pression et pouvait être piloté à distance. Il était commercialisé aux alentours de 1 100 à 1 200 euros.

Depuis, la Vitia-F a bien évolué. Il s’agit non plus d’une barrique en tant que telle, mais d’un boîtier, à apposer sur n’importe quel fût. Il permet de mesurer de nombreux paramètres en temps réel : densité, volume et hauteur de vin, volume du ciel gazeux, cinétique fermentaire, oxygène dissous, pH, oxydo-réduction (potentiel redox), température, titre alcoolique instantané et potentiel, taux de sucre, pression, ou encore vitesse d’évaporation ; de chauffer ou de refroidir le vin, ou encore de programmer certaines opérations comme un brassage. Ce module se branche sur du 220 volts et envoie les informations sur ordinateur ou smartphone par wifi, après une connexion par flashcode. Et comme une évolution n’arrive jamais seule, ce boîtier se décline aussi sur cuves, avec le Vitia-C, une colonne de mesures se raccordant sur la vanne de tirage au clair. Les fonctionnalités proposées sont similaires aux fûts. Côté budget, ces systèmes ont bien évidemment un coût. À titre d’exemple, pour équiper cinq barriques ou cuves avec des capteurs de température et de densité, il faut compter 8 400 euros.

Frédérick Buisson, du domaine Henri & Gilles Buisson à Saint Romain, s’est équipé d’une Vitia-F en 2015. Et il ne regrette pas son achat. « Au départ, il a fallu faire quelques réglages et l’étalonner comme on le ferait pour des analyseurs de laboratoire, signale-t-il. Mais à présent, il marche bien. » Il s’en sert comme d’un témoin au sein de son chai d’élevage, afin de suivre l’évolution de divers paramètres, tels que la température ou le potentiel redox. « Cela me permet de comprendre ce qui se passe à l’intérieur des tonneaux, poursuit-il, de me conforter dans ce que je pense. C’est un fût intelligent qui donne des informations de manière instantanée, sans avoir besoin d’aller au laboratoire. Et toutes les données sont transférées sur ordinateur. C’est pratique pour le suivi. » Il apprécie tout particulièrement la visualisation sous forme de courbes.

D’un point de vue pratique, il rapporte qu’il est nécessaire de démonter l’appareil pour bien le laver. « Mais tant qu’il n’y a que quelques tonneaux équipés de la sorte, ce n’est pas gênant, cela ne prend pas beaucoup de temps en plus », nuance Frédérick Buisson. Anne Parent, du domaine éponyme à Pommard, a pour sa part réalisé des essais tant sur le Vitia-F en 2015, que sur le Vitia-C en 2016. Elle estime qu’il s’agit d’un système novateur, permettant de suivre ses fûts à distance et de disposer de nombreux paramètres analytiques. Néanmoins, les essais n’ont pas été totalement concluants : « l’entreprise avait quelques mises au point à faire, et tant la barrique que la cuve sont reparties chez eux, explique-t-elle. Mais j’aimerais refaire des essais. »

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