Aller au contenu principal

"Peut-être que certaines appellations ne servent à rien"

Jean-Marie Cardebat est professeur à l’université de Bordeaux, fondateur et coordinateur du groupe de recherche Bordeaux Wine Economics. Il a récemment co-signé The Palgrave Handbook of Wine Industry Economics (Palgrave Macmillan). Ses recherches l’ont amené à s’interroger sur l’impact économique de la multiplicité des AOP. Explications.

Jean-Marie Cardebat est professeur à l’université de Bordeaux, fondateur et coordinateur du groupe de recherche Bordeaux Wine Economics. © J.-M. Cardebat
Jean-Marie Cardebat est professeur à l’université de Bordeaux, fondateur et coordinateur du groupe de recherche Bordeaux Wine Economics.
© J.-M. Cardebat

Dans un article scientifique, vous avez conclu que, dans le cas du vignoble bordelais, avoir un trop grand nombre d’AOP était contre-productif. Pourquoi ?

Pour étudier la question du nombre d’AOP d’un point de vue scientifique, on s’est demandé sur quels critères le consommateur pourrait les considérer comme substituables ou non. Le critère purement sémantique est très nettement ressorti, bien devant les notions de terroir et de prix. Le phénomène de substitution est très fort pour des appellations qui ont en partie le même nom, par exemple bordeaux, bordeaux supérieur, côtes-de-bordeaux… ou lussac-saint-émilion, montagne-saint-émilion, saint-georges-saint-emilion, saint-émilion…. On s’est alors dit que peut-être certaines appellations ne servaient à rien.

Est-ce à dire qu’il faut réduire le nombre d’appellations ?

Évitons tout manichéisme. Les appellations font le lien avec la géographie, et ça c’est moderne. Les consommateurs y sont de plus en plus sensibles. Les États-Unis avec leur American Viticultural Area (AVA) et l’Australie qui veut valoriser la Barossa Valley, l’ont bien compris. Ils le font mais sans se mettre des contraintes trop fortes, sans aller dans le même niveau de détail. En France, c’est le cas du champagne, dont on peut considérer qu’il est une grande marque régionale. Ou encore en Italie, du prosecco, qui a plutôt la stratégie d’étendre sa zone d’appellation que de la fractionner. Il faut étudier au cas par cas. Le nombre de bouteilles produites par le vignoble chaque année est un critère essentiel. Certaines appellations fonctionnent très bien, d’autres sont neutres, d’autres sont associées à une mauvaise image ce qui impose aux producteurs un prix plafond même s’ils font un vin de grande qualité.

Sur quelle base fusionner ou faire disparaître des AOP ?

Lorsqu’il y a une substitution de fait par le consommateur, il faut être pragmatique et fusionner en fonction de ce qui marche. Je me suis toujours interrogé par exemple pour bordeaux et bordeaux supérieur, quel signal on envoie au consommateur ? Posons-nous la question de ce qui est complexe, contradictoire, redondant… Avoir à la fois bordeaux et côtes-de-bordeaux ? Je suis sceptique ! C’est là-dessus que j’aimerais que la profession réfléchisse. Je n’ai pas la solution. Il faut évaluer. La crise est sévère aujourd’hui. Si on ne se pose pas les questions qui dérangent aujourd’hui, on ne va pas trouver de solutions. Si on est en crise, c’est que le modèle ne fonctionne pas.

A lire aussi : La commercialisation des rouges sous pression

Les plus lus

Le Biogel d’AquaGreen Protect est pulvérisé sur la vigne sous forme de mousse. En séchant, cette dernière protégerait la vigne du gel.
Lutte contre le gel de la vigne : deux nouveaux produits un peu givrés

Deux firmes viennent de lancer des produits visant à lutter contre le gel de la vigne via la création d’une gangue protectrice…

Le poudrage est souvent réservé à la période sensible.
Soufre poudre ou mouillable : les critères de choix en vigne
Bien que le soufre mouillable ait de nombreux avantages en termes d’emploi, la forme en poudre n’est pas à négliger. Elle permet…
Le Dyna-Drive est un outil de travail du sol auto-animé réalisant un mulchage en superficie.
« Le Bomford Dyna-Drive est un outil interrang entre le rolofaca et le rotavator »

Jérôme O’Kelly utilise depuis quatre ans un outil de travail du sol auto-animé.

Fabien Marie, viticulteur en Charente-Maritime : « La rogneuse traînée est incomparable en termes de maniabilité dans les tournières. »
« Je gagne en débit de chantier avec ma rogneuse traînée »

Viticulteurs et entrepreneurs en Charente-Maritime, Laurent et Fabien Marie sont équipés de deux rogneuses traînées. Un…

René Becker, consultant et formateur indépendant, spécialiste de la biodynamie.
« En 100 ans, la viticulture en biodynamie n’a jamais été aussi actuelle »

René Becker, consultant et formateur en biodynamie, dresse un bilan et des perspectives pour la biodynamie à l’occasion du…

Certains constructeurs combinent une tondeuse à une rogneuse.
Les rogneuses traînées, synonymes de productivité

Les rogneuses traînées sont des machines offrant de bons débits de chantier, adaptées à des surfaces minimales de 30 à 40…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 100€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Vigne
Consultez les revues Réussir Vigne au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters des filières viticole et vinicole