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Christophe Tichadou, expert-comptable : « La maîtrise des coûts viti-vinicoles passe par leur connaissance »

Pour Christophe Tichadou, expert-comptable membre du réseau AgirAgri, une réévaluation globale des prix devrait s’opérer. Connaître son coût de revient est essentiel pour se repositionner.

Christophe Tichadou, expert-comptable, gère le groupe Alliance Expert, membre du réseau AgirAgri.
Christophe Tichadou, expert-comptable, gère le groupe Alliance Expert, membre du réseau AgirAgri.
© AgirAgri

Quel est le premier réflexe à avoir face à l’augmentation des coûts de production ?

Bien entendu, il est bon de regarder les postes où l’on peut faire des économies : GNR, intrants, etc. Mais je pense qu’il faut aussi se poser et réfléchir. Dans un premier temps, il faut calculer ses coûts de revient. Trop peu de gens, que ce soient des viticulteurs, des vignerons ou même des coopératives, le font. Alors que c’est le seul moyen de savoir si l’on gagne encore de l’argent ou non. Quand on fait le calcul avec eux, beaucoup disent « je ne pensais pas que cela me coûtait autant à produire ». Ensuite, il s’agit de définir une stratégie de vente, en fonction. Avec son expert-comptable par exemple. Connaître ses coûts de production permet de savoir à combien je dois vendre pour ne pas travailler à perte, et c’est vrai en vrac comme en bouteille.

Une fois que c’est fait, il faut répercuter la hausse actuelle sur les prix de vente. Beaucoup de domaines pratiquent des prix empiriques puis font des augmentations de 2 %. Ce n’est pas un bon fonctionnement. Si je suis coopérateur et que je n’ai pas la main sur la commercialisation, je peux réfléchir à changer de cave, choisir celle qui me fera vivre. Je peux aussi aller faire partie des commissions pour faire bouger les choses : il faut être partie prenante.

Cela veut dire que la hausse des prix de vente est un passage obligé ?

Oui. L’inflation due à la pandémie était conjoncturelle, nous espérions un retour à la normale à moyen terme. Auquel cas, il aurait mieux valu rogner les marges, pour ne pas empirer la situation. Mais le conflit en Ukraine, et l’incertitude qui l’accompagne, nous fait basculer dans quelque chose de beaucoup plus structurel. Les schémas inflationnistes sont bien connus, le dernier en date est celui du passage à l’euro. Cela se résout par une réévaluation globale des prix et, souvent en dernier lieu, des salaires. Nous aurions intérêt à ce que tout le monde le fasse rapidement pour que la transition soit la plus rapide possible et que tout le monde y gagne.

Comment calculer ses coûts ?

Il existe plusieurs méthodes. Il n’y en a pas de meilleure, l’important est de garder la même pour étudier les variations de manière cohérente. La plus simple est celle des « coûts complets » : on prend tous les frais de l’exploitation que l’on divise par les hectos produits. C’est bête et méchant mais si tout le monde faisait cela, ce serait déjà fantastique. Autrement, il y a la méthode ABC, « activity-based costing ». C’est plus complexe, car on segmente les dépenses pour savoir combien coûte à produire le kilo de raisin, la vinification, l’élevage, la commercialisation… mais c’est plus précis.

Chez Alliance Expert nous avons développé une méthode simplifiée appliquée à la filière, qui donne le coût de revient en fonction du canal de commercialisation. Ainsi, je connais mon prix plancher si je vends en vrac, en bib ou en bouteille. Quoi qu’il en soit, il faut absolument bannir l’utilisation du calcul des stocks forfaitaires du réel simplifié. On mélange une règle fiscale avec de la gestion, c’est une aberration car on se déconnecte de la réalité. Si la mercuriale est à 100, cela me donne un coût de production à 70. Donc j’ai l’impression qu’en vendant à 95 je fais encore du bénéfice. Mais peut-être que j’ai produit à 102 et que je vends à perte !

Comment faire dans l’immédiat si la trésorerie est mise à mal par l’augmentation des charges ?

On ne peut pas faire d’emprunt pour se donner de l’air, les banques ne financent pas les charges d'exploitation. Mais elles peuvent refinancer les investissements que l’on a faits jusqu’à six mois en arrière. Un broyeur que l’on a acheté cash, par exemple, ou tout autre matériel qui semble insignifiant. Cela permet de réinjecter parfois 3 000, 5 000 euros ou plus dans la trésorerie, ce qui suffit souvent pour passer un cap compliqué. L’emprunt est l’allié des entreprises, à plus forte raison aujourd’hui car il permet de lutter contre l’inflation ; il bloque le cours de l’argent.

Et plus la durée sera longue, plus cela va écraser les coûts de production. Une vigne, ça se finance sur vingt-cinq ans, pas sur dix ! Si j'ai un investissement de prévu pour cette année, comme une plantation, il est primordial de recalculer le coût prévisionnel et de voir si la rentabilité est toujours au rendez-vous. Si ce n’est pas le cas, soit je prévois de relever mes prix, soit j’attends en me disant que ce n’est pas pertinent.

Découvrez tout le dossier coûts de production ici : 

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