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Le Mas des agriculteurs, une vitrine pour les vignerons du Gard

Depuis le 26 juin 2019, un magasin installé à Nîmes joue la carte de la vente directe et de la promotion de l’agriculture locale. Il est géré par des agriculteurs, dont des viticulteurs qui y voient la possibilité de toucher une nouvelle clientèle.

Installé à Nîmes, le Mas des agriculteurs fête son premier anniversaire. Dans ce vaste espace de vente de 980 m2, on ne trouve que des produits issus du Gard ou presque : des légumes, des fruits, de la viande, du fromage, des conserves, des biscuits… et du vin. Des produits locaux vendus en direct car ce sont des agriculteurs qui gèrent le lieu à travers une SAS. Ils sont locataires de la chambre d’agriculture qui a construit le bâtiment. « Un bail au prix du marché », précise Patrick Viala, le président de la SAS. Un appel à souscription a été lancé auprès des agriculteurs du Gard. Le capital reste ouvert. Les parts sont de 500 à 1000 €. Aujourd’hui 3 000 agriculteurs sont impliqués, à travers 200 structures individuelles, coopératives ou syndicats de producteurs.

Un concept bien dans l’air du temps

Ce projet d’envergure est né il y a plus de cinq ans, porté par Dominique Granier alors président de la chambre d’agriculture. « Il a fallu convaincre les différents acteurs », raconte Patrick Viala. Une petite vingtaine d’agriculteurs s’est longuement mobilisée pour mettre au point tous les nombreux aspects avec parfois de longues discussions pour se mettre d’accord.

En principe, un actionnaire a le droit de présenter jusqu’à 8 produits mais ce n’est pas non plus un droit. Dès le début, le principe a été « de déconnecter le capital de l’approvisionnement. Ceux qui ont souscrit sont prioritaires mais s’ils répondent au marché », expose Patrick Viala. « On est beaucoup plus sévères sur la sélection », remarque Christophe Aguilar du domaine de la Patience. Pour les vins, les cavistes ont leur mot à dire.

En défendant l’agriculture locale et la vente directe, le Mas des Agriculteurs se retrouve au cœur d’une attente forte amplifiée par le Coronavirus. « Les circonstances font que c’est arrivé au bon moment, commente Patrick Viala, le citoyen est en train de changer ». Malgré le succès fulgurant du drive lancé quelques semaines avant le confinement, la fréquentation a toutefois diminué durant le confinement. Mais pour Patrick Viala, « l’équilibre financier est atteint ». Les acheteurs dépassent la seule agglomération de Nîmes et affluent même de départements voisins. La position du magasin à la sortie d’autoroute Nîmes-centre est un atout fort.

Une espace de communication et de pédagogie pour le vin

Vendre est bien l’objectif premier du Mas des agriculteurs. Le directeur du magasin a fait ses armes en grande distribution. Il est à la tête d’une équipe d’une quinzaine de personnes dont 2 cavistes. Quelque 5 000 produits sont référencés, dont 550 vins. L’objectif est de monter à 600. Le rayon vin comprend un espace de dégustation. Des vignerons viennent y présenter leurs vins le samedi. Mi-juillet, il devrait accueillir une campagne de promotion des IGP gardoises réalisée avec le CIVL et ponctuée d'animations.

Pour Patrick Viala, les visiteurs doivent pouvoir « identifier des visages et des territoires ». Sur les murs du magasin s’affichent les photos d’une centaine de producteurs et productrices prises à différents moments de la saison. Le Mas a un rôle pédagogique. Toutes les appellations du département sont représentées, complétée par d’autres appellations d’Occitanie. Les concessions au principe local sont rares. Il y a du châteauneuf-du-pape, et beaucoup plus lointain, du champagne présent au moment des fêtes. Cela a d’ailleurs fait débat.

La politique de prix au cœur du concept

Autre principe fort et intangible, vendre les vins au prix propriété. Certains n’ont pas voulu suivre. « Nous voulons proposer le juste prix. On s’efforce qu’il soit raisonnable pour le consommateur et rémunérateur pour le producteur », avance Patrick Viala. « Un même coefficient de 10 % est appliqué sur tous les vins. On ne prend pas des grosses marges pour avoir des prix abordables », renchérit Bruno François, l’un des vignerons présents dans le conseil d’administration. Il n’y a pas de produits issus du négoce.

Un outil au service du développement local

Le Mas des agriculteurs poursuit d’autres projets. L’ouverture d’un restaurant attenant est prévue pour septembre. Le Covid-19 risque toutefois retarder le planning. Le magasin vitrine de la production locale veut aussi devenir un « référentiel pour les touristes de l’été ».

« On a eu des pressions pour élargir le référencement mais on va rester sur du local », indique David Baron qui au sein du conseil d’administration porte la voix des coopératives. Pas question de se mettre à vendre des tongs ou des gadgets même rémunérateurs. Le lieu veut se distinguer par la qualité de la sélection et sa mise en valeur dans un lieu moderne et esthétique.

Si dans cette phase de lancement ce sont les fruits et légumes qui impulsent le chiffre d’affaires, les vignerons sont confiants pour l’avenir. « Nous avons ici la plus belle présentation des vins locaux », concluent en chœur ceux que nous avons interrogés.

Témoignage : Bruno François, vigneron indépendant en Costières-de-Nîmes.

Le but c’est de rémunérer les agriculteurs

« Je gère avec Luc Baudet plusieurs domaines en Costières-de-Nîmes dont le Clos des Américains et le Clos des centenaires et je fais partie de la Fédération des vignerons indépendants du Gard. J’ai entendu parler du projet alors que j’étais en déplacement professionnel en Belgique. J’ai répondu dans la journée. Pour moi, il y avait aussi l’intérêt humain de voir comment nous allions pouvoir lancer ça. Personne n’avait l’expérience de la création d’une grande surface. Aujourd’hui, ça me prend une demi-journée par mois. C’est du temps donné à la collectivité mais c’est aussi une façon de se tenir informé. C’est une structure de supermarché mais sans être un supermarché. Le but c’est de rémunérer les agriculteurs. J’ai plusieurs cuvées en rayon mais il faut de la place pour tout le monde, des gens qui ont une reconnaissance et des inconnus à faire découvrir ».

Témoignage : David Baron, vice-président de la coopératives des Collines du Bourdic, lui-même vigneron sur 18 ha.

Nous avons ainsi une belle vitrine sur Nîmes

"Je participe au conseil d’administration du Mas des agriculteurs par délégation du président de la cave des Collines du Bourdic. Nous avons deux caveaux de vente à côté d’Uzès mais nous cherchions à toucher une clientèle qui se déplace moins. Nous avons ainsi une belle vitrine pour faire découvrir aux Nîmois qu’il n’y a pas que le costières-de-nîmes dans le département ! J’ai apporté l’expérience de la cave du Bourdic pour ce qui est de la gestion du magasin et de la vente directe. Tout le monde n’est pas d’accord mais dans une cave coopérative, on a l’habitude. On a des retours positifs de la part des producteurs. Au caveau, on vend plutôt par cartons de 6. Au Mas ce sont des achats à la bouteille, mais pour nous ce n’est pas un point de vente marginal. On a proposé des vins que l’on vend bien chez nous. On verra avec un an de recul pour la sélection mais pour l’instant, pas de soucis, car les gens aiment la découverte. L’intérêt du lieu c’est aussi la proximité que l’on peut installer avec le consommateur ».

Témoignage : Christophe Aguilar, vigneron du Domaine de la Patience

Le Mas est devenu à la mode

"Je suis à la fois vigneron indépendant et représentant des IGP au sein du CIVL. En tant que représentant d’un syndicat, je me dis que si l’on reçoit des acheteurs étrangers, c’est l’endroit où aller pour leur montrer la production. C’est un beau lieu, très professionnel, plus qualitatif que nos caveaux. Ce qui m’a motivé c’est que ce genre de lieu n’existait pas. On n’avait pas de lieu à nous. Au départ personne n’y croyait. C’était un gros challenge. Le bilan est très positif. Des gens veulent prendre exemple sur nous. Les légumes et les fruits sont très bien placés en rapport qualité-prix par rapport à la concurrence et attirent du monde. Le Mas est devenu à la mode. Les gens cherchent des bons produits. Ça permet de se faire connaître et de vendre des produits à des prix intéressants. Il n’y a pas la pression du référencement que l’on peut connaître chez un caviste."

Repères

Le budget pour la construction du lieu de 2 000 m2 au total a été de 5 M€ . Il a été financé par la chambre d’agriculture avec le soutien de la région et du département qui ont investi chacun 800 000 €.

Les agriculteurs sont présents au capital de 430 000 € sous différentes structures. Bienvenue à la ferme du Gard en fait partie via une EURL à hauteur de 20 %. La chambre d’agriculture du Gard possède 10 % du capital. Le conseil d’administration comprend une petite quinzaine de personnes dont 4 représentants du CIVL, IGP d’OC, des Vignerons indépendants du Gard et des coopératives gardoises.

Appellations : AOP costières-de-nîmes, duché d’uzès, côtes-du-rhône, tavel, lirac, terrasses-du-larzac, côtes-du-rhône, pic saint-loup… ; IGP cévennes, coteaux du pont-du-gard, pays d’Oc, sables de camargue…

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