La réglementation doit encourager les pulvérisateurs viticoles plus vertueux
Les autorisations de mise sur le marché devraient favoriser l’achat d’équipements de pulvérisation réduisant la dérive. Ce n’est pas le cas pour toutes les situations.
Les autorisations de mise sur le marché devraient favoriser l’achat d’équipements de pulvérisation réduisant la dérive. Ce n’est pas le cas pour toutes les situations.
Pour l’application de produits phytosanitaires à proximité de zones sensibles, il existe différents types de zones tampons : les ZNT (zones non traitées) aquatiques, depuis 2006, les DSR (distances de sécurité riverains, depuis 2019), les DSPPR (distances de sécurité personnes présentes et résidents), ainsi que les ZNT arthropodes et ZNT plantes non-cibles. Si les ZNT aquatiques et les DSR (dans le cadre de chartes départementales) peuvent être diminuées par l’emploi de techniques de pulvérisation reconnues officiellement comme réduisant la dérive (buses antidérive, panneaux récupérateurs, etc.), il n’en est rien pour les autres types de zones tampons.
Un impact important dans les petites parcelles en zone péri-urbaine
Regroupant vingt-sept membres (issus de l’Inrae, d’instituts techniques, de constructeurs, etc.) au sein de Végéphyl, la Commission interprofessionnelle d’étude des techniques d’application de produits phytosanitaires (Cietap) met en alerte sur l’absence de géométrie variable concernant la réglementation des DSPPR et des ZNT arthropodes et plantes non-cibles. Pour les produits phyto concernés, l’autorisation de mise sur le marché (AMM) définit des distances à respecter à proximité des zones sensibles (riverains). Ces distances ne sont pas modulables, même avec les appareils réduisant de manière importante la dérive. Une distance qui peut être très prégnante en termes de pourcentage de la surface impactée, dans les parcellaires de petite taille et/ou en zone périurbaine.
Une réglementation figée
Alors que le projet Capriv (Concilier application des produits phytopharmaceutiques et protection des riverains), construit en concertation avec l’Anses, et finalisé en 2023, met clairement en évidence la réduction drastique de la dérive permise par certains équipements de pulvérisation utilisés par les agriculteurs, viticulteurs et arboriculteurs, la situation reste figée concernant les réglementations. Pire, à mesure que les AMM se renouvellent, les DSR sont progressivement remplacées par les DSPPR, fixes quelle que soit la technologie
La Cietap s’inquiète de cette situation qui n’incite pas les agriculteurs, viticulteurs et arboriculteurs à investir dans des matériels d’application plus vertueux. C’est d’autant plus vrai que la conjoncture économique se tend dans bon nombre de régions. Le risque est que de nombreux viticulteurs s’interrogent sur la pertinence de s’équiper, par exemple, de pulvérisateurs avec panneaux récupérateurs, moins maniables et plus exposés à la casse, alors qu’ils ne permettent pas de traiter plus près des zones sensibles et sont beaucoup plus chers que les pulvérisateurs les plus simples, aux performances plus discutables.
Par effet domino, si les ventes d’appareils plus vertueux baissent, les constructeurs vont amortir plus difficilement les investissements dans les programmes de recherche et développement initiés depuis de nombreuses années et visant à réduire la dérive, à améliorer les pratiques agroenvironnementales et à limiter l’exposition humaine.
Prendre en compte également les bienfaits des haies
Outre les équipements de pulvérisation, les haies ont aussi des effets bénéfiques sur la dérive et par conséquent sur la protection du voisinage. C’est ce qu’il ressort d’essais réalisés au sein de l’UMT Ecotech (IFV, Inrae) dans le cadre du projet Driftprotect. On constate une réduction de la dérive générée par un pulvérisateur pneumatique de l’ordre de 75 % par la présence d’une haie en lauriers sauce. Cette réduction de dérive importante est également observée avec un pulvérisateur à rampe face-par-face (avec versus sans haie), ainsi que par l’emploi d’une haie artificielle (filet) à la place d’une haie naturelle. Les résultats du projet doivent faire l’objet d’une publication dans les prochains mois.