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Analyse pétiolaire des vignes : comment et pourquoi se lancer ?

Assez facile à réaliser, l’analyse pétiolaire livre un instantané de la nutrition de la vigne. Un outil relativement bien calé, qui permet d’affiner la fertilisation et d’éviter les carences.

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L'analyse du pétiole vise à vérifier l'état de nutrition de la vigne à un instant T.
© IFV

À quoi sert une analyse pétiolaire ?

Savoir comment la vigne assimile – ou non – des éléments présents dans la solution du sol à un instant donné : c’est la promesse de l’analyse de pétioles. « C’est un indicateur reconnu mais qui n’est pas toujours très utilisé, explique Jean-Yves Cahurel, ingénieur IFV et animateur du groupe de travail national fertilisation de la vigne. Il est pourtant intéressant d’en réaliser régulièrement, tous les quatre ans par exemple, pour ne pas attendre une carence et mieux s’affranchir de l’effet millésime. »

L’analyse chiffre les teneurs en macro-éléments (N, P, K, Ca, Mg) et en oligoéléments (Fe, Mn, B, Zn) des pétioles et les positionne par rapport à des références. « C’est un peu comme une analyse de sang, compare Emmaunel Beauquesne, référent technique agronomique d’Aurea agrosciences. Elle montre comment l’organe a valorisé le potentiel du terroir, déterminé auparavant par l’analyse de sol. » Le laboratoire réalise plusieurs milliers d’analyses pétiolaires par an. « L’intérêt est de disposer d’un diagnostic normé et répétable pour faire un suivi périodique préventif ou répondre à un problème. Cette analyse va permettre de détecter des subcarences qu’on ne voit pas », complète l’agronome.

Autre intérêt : « Nous avons voulu moderniser le référentiel pour avoir une lecture dynamique du millésime », indique Matthieu Chazalon, directeur-adjoint de SRDV, filiale du laboratoire Dubernet. Ce dernier réalise 5 000 analyses de pétioles par an et dispose d’une base de 30 000 analyses. « L’idée est d’arriver aux vendanges avec déjà une idée du millésime », complète-t-il.

Quels enseignements en tire-t-on ?

En consolidant les résultats de ses analyses depuis une dizaine d’années, SRDV a remarqué une tendance forte à l’augmentation des teneurs en potassium, en lien avec la hausse des températures. Tandis que les niveaux d’azote diminuent à cause de la sécheresse ou des économies de fertilisation. Le laboratoire constate aussi une diminution des teneurs pétiolaires en manganèse et en zinc. Cette baisse est attribuée à l’arrêt du mancozèbe et du métirame de zinc, deux fongicides qui devaient corriger des carences de façon inaperçue.

Combien coûte une analyse ?

Compter 50 à 80 euros HT en fonction des laboratoires et des éléments analysés. Pour un budget limité, mieux vaut choisir une parcelle représentative de son parcellaire et faire un suivi régulièrement, plutôt que de réaliser des analyses ponctuellement sans suivi. Sauf en cas de problème avéré sur une parcelle. Dans ce cas, il est possible de faire une comparaison entre la zone à problème et une zone non touchée.

Quand faut-il prélever les pétioles ?

L’analyse pétiolaire se réalise généralement à véraison, mais elle peut aussi être effectuée à floraison ou à nouaison. Une analyse précoce donne une information opérationnelle, qui peut être utilisée pour adapter la fertilisation de l’année et réagir si nécessaire, par exemple avec un apport d’engrais foliaire ou en fertirrigation. À véraison, l’analyse va aider à faire le lien avec la vinification et les équilibres des vins. Elle va aussi donner des indications pour préparer la fertilisation de l’année suivante et potentiellement, anticiper les achats d’engrais.

Comment prélever les échantillons ?

Pour un résultat fiable, il est nécessaire de suivre le protocole indiqué par son laboratoire. En général, il s’agit de prélever au moins 50 pétioles, à raison d’un pétiole par cep, celui d’une feuille adulte en bas du pied, en face d’une grappe.

Quelles sont les limites de cette analyse ?

La pertinence des analyses pétiolaires dépend en grande partie du référentiel qui leur est associé. Cet outil n’est pas utilisable pour le fer et le cuivre par exemple. La période de prélèvement, entre la fin des traitements et les vendanges, n’est pas toujours celle où les vignerons sont disponibles.

Isabel Gassier, vigneronne au Château de Nages, à Caissargues, dans le Gard

« L’analyse pétiolaire permet de ne pas piloter à l’aveugle »

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Isabel Gassier, vigneronne au Château de Nages, à Caissargues, dans le Gard, estime que « l’analyse pétiolaire permet de ne pas piloter à l’aveugle ». © DR
« Depuis 2022, je réalise un suivi de trois analyses pétiolaires par an sur une bonne dizaine de parcelles pour différentes raisons : soit un manque de vigueur, avec pour objectif de rebooster la parcelle, soit pour des problèmes de manque d’acidité ou de goûts phénolés dans les vins, soit à cause de symptômes difficiles à expliquer, comme un dessèchement de la rafle sur une jeune parcelle de marselan, soit pour accompagner notre transition vers une viticulture régénérative. Nous en sommes en bio depuis 2007 et nous avons débuté une conduite en non-travail du sol, avec des couverts couchés au rolofaca en 2021, aussi nous suivons attentivement la nutrition, pour réagir à l’automne suivant si nécessaire. Ce qui n’a pas été le cas jusqu’à présent.

Les trois analyses sont faites aux stades boutons floraux séparés, petit pois et fin véraison. C’est un budget, mais il faut aussi prendre en compte les bénéfices : la parcelle de marselan semblait avoir une carence en potassium, mais l’apport au sol ne fonctionnait pas. Nous avons réussi à rétablir la situation par un apport foliaire et évité de perdre la moitié de la récolte. À l’inverse, nous avons fait des impasses sur d’autres parcelles où le potassium était en excès et nous avons vu un meilleur résultat sur l’acidité des vins. L’analyse pétiolaire permet de ne pas piloter à l’aveugle. »

Richard Vanrenterghem, consultant chez RVS consultants viticoles

« Nous avons amélioré les équilibres dans 85 % des parcelles »

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Richard Vanrenterghem, consultant chez RVS consultants viticoles a amélioré les équilibres dans 85 % des parcelles qu'il suit grâce aux analyses pétiolaires. © RVS
« J’utilise l’analyse pétiolaire en routine depuis trente ans, soit un volume de 300 à 400 analyses par an actuellement. Pour moi, c’est un outil très pertinent pour raisonner la fertilisation de la vigne au regard des éléments majeurs K, P, Mg, Ca et des principaux oligoéléments. Par exemple, c’est le seul moyen pour confirmer une carence en bore, qui ne peut qu’être soupçonnée à l’œil et qui reste très rare. En plus, c’est un outil qui va quantifier si cette carence est sévère ou bénigne. Et ce n’est pas très onéreux, ramené à l’hectare.

Pour chaque nouveau client, après une première visite sur toutes les parcelles à nouaison pour repérer les carences potentielles, nous ciblons les interventions les plus urgentes et les pétioles sont prélevés début véraison. L’hiver, avec les résultats, une analyse de sol récente et la traçabilité des derniers apports, nous prévoyons la fertilisation pour l’année suivante. Puis nous programmons un plan d’analyses et un budget pour les parcelles moins urgentes. En quatre à cinq ans, nous avons ainsi une vision complète du vignoble en lissant l’éventuel effet millésime. Puis, nous recommençons une rotation des analyses sur les cinq à six ans suivants.

En réalisant des statistiques sur toutes nos données, nous avons constaté que nous avons amélioré les équilibres dans 85 % des parcelles. Mais attention, la vigne, ce n’est pas du one shot, il faut envisager des actions à trois ou quatre ans minimum. Et toujours replacer les résultats des analyses de pétioles par rapport à ce que l’on connaît du sol et par rapport au millésime. Un millésime avec un excès d’eau va favoriser les carences en magnésium, tandis qu’un millésime sec favorise une carence en potassium qui reste la plus préjudiciable. Dans les millésimes très stressants comme 2022, nous préférons différer les analyses à l’année suivante. »

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