Fiscalité de la transmission
Pacte Dutreil : il n'y a pas d’urgence à transmettre les parts des sociétés agricoles
Un récent rapport de la Cour des comptes et les débats parlementaires lors du PLF 2026 sèment des inquiétudes sur l’avenir du Pacte Dutreil. Pourtant l’utilisation du Pacte Dutreil dans les sociétés agricoles n’est pas menacée. Décryptage.
Un récent rapport de la Cour des comptes et les débats parlementaires lors du PLF 2026 sèment des inquiétudes sur l’avenir du Pacte Dutreil. Pourtant l’utilisation du Pacte Dutreil dans les sociétés agricoles n’est pas menacée. Décryptage.
L’avenir des transmissions de parts de sociétés agricoles dans le cadre favorable du Pacte Dutreil est-il menacé ? Ce dispositif permet dans certaines conditions une exonération de 75 % des droits de donations d’une entreprise, et est à ce titre considéré par certains comme une niche fiscale. De quoi le placer dans le viseur de la Cour des comptes et de certains partis politiques à l’occasion du projet de loi de finances 2026 (PLF 2026).
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Toutefois, dans leur très grande majorité, les montages sociétaires des agriculteurs ne sont pas concernés par les modifications proposées visant à rendre plus restrictives les conditions d’application du Pacte Dutreil. L’usage classique de ce dispositif pour transmettre une exploitation familiale, en Gaec, EARL, SCEA n’est donc pas compromis. Le constat vaut aussi pour une société de méthanisation ou photovoltaïque ainsi qu’une holding en SARL ou SAS.
En vue de la modification du Pacte Dutreil dans le PLF 2026, faut-il donner rapidement ses parts sociales ?
Seules deux modifications envisagées pourraient concerner les exploitations agricoles, sans pour autant constituer des contraintes pratiques : l’allongement de la durée de détention des parts sociales, et la condition d’âge du bénéficiaire de la donation. Dès lors, faut-il se dépêcher de donner ses parts sociales à ses descendants avant le vote de la prochaine loi de finances 2026 ?
Quelle conséquence de l’allongement de la durée de détention des parts sociales ?
Après la donation qui a bénéficié de 75 % d’exonération de droits, le donataire doit conserver les parts sociales durant 4 ans, comme pour une dotation nouveau et jeune agriculteur. Il est envisagé d’allonger cette période de 2 ans, soit 6 ans au total. Or, quand un descendant d’agriculteur hérite de parts d’une société familiale, il s’empresse rarement de les revendre dans les années qui suivent. Cet allongement ne devrait donc pas poser de problème à la grande majorité des héritiers d’exploitations agricoles.
Quelle conséquence de la condition d’âge du bénéficiaire de la donation ?
Une condition d’âge pour au moins un des bénéficiaires de la donation pourrait être ajoutée : au moins un des donataires, celui qui assumera l’engagement de la direction de l’entreprise, devrait au jour de la donation avoir plus de 18 ans et moins de 60 ans. En agriculture, on s’installe rarement après 60 ans et on assume encore plus exceptionnellement des fonctions de gérance avant 18 ans.
Par conséquent, il n’y a pas lieu à précipiter une transmission de parts sociales par crainte de modifications législatives qui n’auraient pas d’impact contraignant. Il est préférable de respecter une stratégie patrimoniale globale cohérente avec la carrière des concernés. A noter qu’aujourd’hui seules 5 % des exploitations agricoles sont transmises en utilisant le Pacte Dutreil.
Le Pacte Dutreil, un dispositif très sollicité en dehors de l’agriculture
Si le Pacte Dutreil attire actuellement l’attention des institutions et des parlementaires, c’est qu’il représente un manque à gagner pour les finances publiques estimé entre 2 et 5 milliards selon les années par le rapport de la Cour des comptes publié le 18 novembre dernier. En effet, le mécanisme est activé par tous les types d’entreprises, les PME familiales, comme les exploitations agricoles, autant que les entreprises de taille intermédiaire (ETI). En moyenne l’avantage obtenu grâce au Pacte Dutreil est de 500 000 € par opération.
Les principales pistes évoquées pour durcir les conditions d’application du dispositif portent notamment sur l’exclusion des biens non professionnels (œuvre d’art, yacht, résidence secondaire…), un plafonnement de l’avantage, un allongement de la durée de détention et un âge limite du bénéficiaire de la donation (60 ans) pour qu’il s’implique dans l’entreprise donnée. Le renforcement des conditions d’application de cette exonération vise à limiter les abus d’optimisation fiscale.