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Strongles digestifs des bovins : limiter le recours aux traitements vermifuges

La gestion des strongles digestifs en élevage bovins viande semble banale, mais il est toujours constructif d’en parler avec son vétérinaire. Des enjeux sanitaires et environnementaux sont engagés avec le recours aux anthelminthiques.

Une prairie est considérée faiblement contaminée après un hiver. Les parcelles où seuls des bovins adultes ont pâturé sont aussi à faible risque.
Une prairie est considérée faiblement contaminée après un hiver. Les parcelles où seuls des bovins adultes ont pâturé sont aussi à faible risque.
© S. Bourgeois/Archives

« La prévention contre les strongles digestifs ne devrait plus reposer aujourd’hui uniquement sur l’utilisation de traitements vermifuges. L’objectif est d’en utiliser le moins possible, mais au bon moment et selon un protocole approprié, en actionnant des leviers complémentaires de prévention », résume Hélène Commeil, vétérinaire conseil pour Innoval.

Bien qu’il n’y ait pas d’obligation réglementaire, il est important d’avoir conscience qu’une utilisation excessive et non appropriée des anthelminthiques peut avoir des répercussions d’une part, sur les insectes coprophages type bousiers - et en conséquence, la qualité des sols - et d’autre part, sur l’efficacité future des traitements vermifuges, en sélectionnant des populations de vers résistants.

Rappelons que certaines catégories d’animaux sont plus à risque de subir l’impact des strongles digestifs. « Les animaux les plus jeunes sont les plus sensibles car leur immunité n’est pas encore efficace. Les veaux sous la mère nés à l’automne et les veaux sevrés en première année de pâture sont les catégories les plus exposées au moment de la mise à l’herbe, car l’herbe constitue déjà la majorité de leur ration », explique Hélène Commeil. Les animaux nés en fin d’hiver et au printemps présentent en comparaison un risque de contamination faible car ils ingèrent très peu d’herbe avant l’âge de 4 mois.

La période à risque commence en milieu ou en fin d’été, selon la météo de l’année et le mode de conduite du pâturage. Elle correspond à la présence de la troisième génération de larves infestantes sur les pâtures. Le parasite aime la chaleur et l’humidité. Si les températures restent sous les 20 °C, le cycle du parasite dure six semaines environ. Au-dessus de 20 °C, le cycle peut être bouclé en quatre semaines. Au-delà de 30 °C sur plusieurs jours, beaucoup de larves infestantes ne résistent pas.

Huit mois de contact effectif pour atteindre l’immunité

L’immunité contre les strongles digestifs est efficace à partir de huit mois de contact effectif avec le parasite. Le temps de contact se calcule à partir de la durée de présence en pâture auquel on soustrait le temps d’action d’un traitement vermifuge, s’il a lieu, et éventuellement une période de sécheresse (où l’affouragement représente la source principale de nourriture). « Ces huit mois de temps de contact s’obtiennent généralement sur les deux premières saisons de pâturage. Une fois l’immunité acquise, les bovins sont normalement en capacité de gérer les strongles digestifs. Leur contamination n’a pas d’impact potentiel sur la santé ni sur la croissance », rappelle Hélène Commeil.

La conduite du pâturage peut majorer le risque vis-à-vis des strongles digestifs, notamment le surpâturage. Comme les larves de strongles se trouvent au ras du sol, il est conseillé de changer de parcelle si la hauteur d’herbe est inférieure à 5 centimètres. Auquel cas, les bovins sont en situation d’en ingérer davantage. Par ailleurs, quand un traitement est appliqué en cours de saison de pâture, un changement de parcelle est à réaliser au plus tôt une semaine après son application. Cette pratique vise à prévenir la sélection de parasites résistants au traitement.

Une parcelle est considérée faiblement contaminée après un hiver. Les parcelles où seuls des bovins adultes ont pâturé sont aussi à faible risque : a priori immunisés, les adultes peuvent ingérer des quantités de larves de strongles, mais n’excrètent pas ou très peu d’œufs (ce sont des aspirateurs à strongles). Les repousses sur parcelles uniquement fauchées sont également saines. « Si la parcelle a été déprimée en préalable à la fauche, c’est en général avec un faible chargement et/ou un passage assez rapide des bovins, et les risques parasitaires sont considérablement réduits. » Les règles de gestion du pâturage ne sont pas les mêmes concernant les strongles respiratoires.

La bonne dose au bon moment pour chaque animal

Chaque vermifuge a un protocole d’application. « Pour prévenir l’apparition de résistance, il faut appliquer la bonne dose selon les bonnes modalités à chaque animal », renseigne Hélène Commeil. Les traitements qui se mélangent à l’alimentation ne permettent pas de garantir que le bovin a avalé la bonne dose. Les traitements pour on doivent être appliqués à un lot entier, à cause du risque de léchage entre animaux. Cela peut en effet constituer pour les congénères un sous-dosage, source potentielle de sous-efficacité et de développement de résistance. Attention aussi aux vermifuges hyperrémanents, qui ne sont pas adaptés aux animaux pour lesquels on souhaite développer une immunité durable. Les bonnes techniques de traitement ne vont donc pas toujours de pair avec l’aspect pratique pour les éleveurs. S’agissant des solutions à base d’extraits de plantes ou d’huiles essentielles, il faut vérifier qu’elles ne soient pas classées en additifs, et que la réglementation soit respectée par rapport à l’obligation de prescription vétérinaire.

« Le traitement ou non des animaux à la rentrée en bâtiment devrait se décider selon le résultat d’un dosage du pepsinogène. C’est une analyse encore trop peu réalisée » constate la spécialiste. Elle est peu coûteuse, mais nécessite de faire passer le vétérinaire pour une prise de sang sur au moins cinq animaux par lot. L’occasion de réfléchir, en fonction des résultats, à d’éventuelles modifications de pratiques au pâturage à mettre en place pour l’année suivante.

Un diagnostic à la rentrée à l’étable est également nécessaire pour connaître le statut des animaux vis-à-vis de la douve (sur prise de sang) et des paramphistomes (sur coprologie) « Ce n’est pas parce qu’il n’y a jamais de douves signalées par l’abattoir que le troupeau est indemne. Et les zones humides des prairies ne sont pas forcément habitées par des douves », rappelle Hélène Commeil.

 

 

 

 

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