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Pourquoi ces vaches démarrent-elles mal leur lactation ?

Depuis trois mois, les vaches fraîches vêlées ne démarrent pas en lait, les chaleurs sont discrètes… Dans le cas de cet élevage de 90 Prim’Holstein, le problème ne vient pas de la ration des vaches en lactation. Voici au travers de cet exemple, la démarche à suivre.

L’optimisation du démarrage en lactation est la clé de réussite d’une bonne lactation. Des vaches qui ne produisent pas après vêlage autant qu’elles devraient, c’est un problème fréquent dans les élevages. Comment l’aborder ? Voici le cas d’un élevage de 90 Prim'Holstein en traite robotisée (deux Lely A3next) disposant d’un contrat de livraison de 800 000 litres de lait par an. Il a été confronté en juin 2019 à cette situation. Au dire des deux associés, depuis trois mois, les vaches fraîches vêlées ne démarrent pas en lait, les mamelles ne sont pas bien remplies, les chaleurs sont peu nombreuses et discrètes. De plus, ils doivent pousser plus de vaches que d’ordinaire au robot. Sur les 9 vêlages du mois de mars, 4 n’ont pas bien délivré. Il y a également eu un déplacement de caillette à gauche. Cela ne leur convient pas. Une visite est donc programmée pour étudier le problème.

Ne pas se lancer tête baissée pour tout changer

Les facteurs de risque peuvent être nombreux. Cela peut évoquer un mauvais démarrage en lactation dû à une mauvaise ration de base. La complémentation au robot n’est peut-être pas adéquate. L’intégration des primipares dans le troupeau n’est peut-être pas optimale. Les paramètres de traite ne sont peut-être pas adaptés, ce qui expliquerait des retards. La période de tarissement est défaillante. L’important est de hiérarchiser pour aller chercher la « chose » la plus évidente et endommageante. On ne se lance pas tête baissée pour tout changer sans poser le problème.

Un fort amaigrissement en début de lactation

Il est important d’aller voir les vaches en début de lactation afin d’établir des notes d’état corporel (NEC). Il existe une grille internationale (Edmonson) qui permet une notation entre 1 et 5 (1 étant très maigre et 5 très gras). La note idéale se situe autour de 3. Lors de la visite, il y a quatre « fraîches vêlées » de moins de 30 jours. Il y a un fort amaigrissement sur le début de lactation. Les animaux sont trop gras au moment du vêlage et perdent trop d’état par la suite.

Des taux de BHB supérieurs au seuil de cétose

Pour confirmer cela, il est indiqué de réaliser des prises de sang pour mesurer le béta-hydroxybutyrate (BHB). Ce métabolite est principalement issu de la mobilisation des réserves graisseuses en cas d’amaigrissement chez la vache. Il permet de caractériser une cétose clinique ou subclinique entre 5 et 50 jours après vêlage : il y a cétose lorsque la valeur de BHB est supérieure à 1,2 mmol/l.

Trois vaches sur quatre ont des valeurs de BHB supérieures au seuil et il y a de l’amaigrissement durant le premier mois de lactation : la cétose est démontrée. Cette maladie entraîne de nombreuses conséquences délétères. Elle augmente le risque de déplacement de caillette, de rétention placentaire, d’endométrite, de mammite clinique. La production laitière est moindre et les paramètres de reproduction sont dégradés (moindre réussite en première insémination et allongement de l’intervalle vêlage-vêlage). Cela correspond aux problèmes énoncés par les éleveurs. Les vaches en lactation diagnostiquées en cétose sont complémentées avec du propylène glycol (500 ml/j pendant trois jours) et des vitamines du groupe B.

Quinze jours de préparation au vêlage

Pour prévenir et surtout limiter la cétose sur le début de lactation, la période de tarissement doit être étudiée. Comment est-elle gérée dans cet élevage ? Les vaches sont mises en pâture le jour du tarissement (qui dure 60 jours), puis sont rentrées à l’étable quinze jours avant la date présumée du terme. Avant vêlage, elles reçoivent la même ration que les vaches en lactation, à volonté. Les génisses pleines rejoignent les vaches taries dans la stabulation quinze jours avant la date du terme. Les vaches et les génisses avant vêlage sont logées dans le petit circuit (au robot) : il arrive donc qu’elles se trouvent avec une vache malade ou à inséminer. Cette façon de procéder n’est pas idéale.

Évaluer le score de remplissage du rumen

Pour limiter le déficit énergétique en début de lactation, il faut maximiser la capacité d’ingestion au tarissement. Pour cela, il ne faut pas engraisser en début de tarissement ni faire maigrir à la fin. De la fibre est incorporée dans la ration ou est disponible à côté. La ration concentrée ne doit pas être à volonté. La capacité d’ingestion des vaches est évaluée par le score de remplissage du rumen. Les rumens doivent être remplis au maximum (score 4/5 voire 5/5). Cela permet d’avoir une capacité d’ingestion maximum après vêlage. Dans le cas présent, les vaches taries avaient des scores de remplissage inférieurs à 3/5. Il n’y a pas de fibre supplémentaire incorporée à la ration ou à disposition.

Le risque de cétose confirmé par les analyses sur les taries

L’analyse des acides gras non estérifiés (AGNE) sur le sang des vaches taries permet de prédire le risque de cétose. La valeur des AGNE doit être inférieure à 0,4 mmol/l. Cette analyse peut se faire soit directement à la ferme, soit à la clinique vétérinaire (analyseur Vetphotometer) ou dans un laboratoire spécialisé. Elle se pratique entre 2 et 14 jours avant vêlage. Les analyses sur les vaches taries présentes lors de la visite variaient entre 0,48 et 0,63 mmol/l. Elles sont donc bien à risque de cétose en post-vêlage.

Les mesures correctives sur la conduite des taries

En pratique, dans cet élevage la phase de préparation vêlage doit être allongée. Elle doit durer au moins 21 jours : c’est la durée minimum pour que le rumen s’adapte à la ration. Le petit circuit ne doit pas servir aux vaches taries, il est utilisé pour les vaches en surveillance (fraîches vêlées, plus fragiles, en traitement…). Les génisses doivent être intégrées plus tôt avec les vaches. Le comportement social de la vache est important : en les habituant aux vaches durant le tarissement, l’intégration dans le troupeau sera meilleure. Il faut éviter de cumuler les stress (nouveaux congénères, robot, logement…).

La ration de préparation est revue. Il sera distribué une quantité limitée de ration des vaches en lactation (20 kg brut) qui sera complémentée avec les concentrés azotés et de production distribués robot. Ainsi, la transition alimentaire sera respectée. De la paille fraîche et accessible est à disposition. Les équilibres alimentaires et minéraux vitaminiques de la ration ont également été revus.

Les démarrages en lactation se passent mieux

Suite aux corrections apportées, les cétoses en début de lactation ont fortement diminué. Les démarrages en lactation se passent mieux car les affections après vêlage sont devenues rares. Face à une telle situation, l’important est de considérer le problème dans son ensemble et surtout d’envisager les différentes hypothèses. Il ne faut pas vouloir, par exemple, changer la ration lactation ou aller tout de suite modifier la complémentation au robot. La période sèche est le moment où se prépare la future lactation.

À savoir

° Quatre enjeux majeurs autour du vêlage :

limiter le déficit énergétique,

limiter les risques d’hypocalcémie,

diminuer l’impact sur la fonction immunitaire,

préserver ou améliorer la santé mammaire.

° Ces quatre mécanismes sont interconnectés.

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