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L’efficacité digestive des porcs en croissance est un caractère héritable permettant de sélectionner sur ce critère

Une sélection sur l’aptitude des porcs à digérer permettrait de produire des animaux qui valorisent mieux les rations et qui s’adaptent à une forte diversité des matières premières.

Pour sélectionner les animaux sur l'efficacité digestive, les organismes de sélection utilisent des alimentateurs individuels (comme ici à la station Axiom d'Azay sur Indre). © D. Poilvet
Pour sélectionner les animaux sur l'efficacité digestive, les organismes de sélection utilisent des alimentateurs individuels (comme ici à la station Axiom d'Azay sur Indre).
© D. Poilvet

En conditions normales d’élevage, un porc absorbe entre 75 et 85 % des nutriments et de l’énergie contenus dans les aliments. Ce chiffre souligne, à l’inverse, que 15 à 25 % des nutriments sont excrétés par l’animal et ne sont donc pas utilisés pour sa croissance. Ceci constitue à la fois une perte économique mais aussi un rejet néfaste pour l‘environnement.

L’absorption par l’intestin des nutriments contenus dans les aliments, appelée digestibilité, est bien connue des nutritionnistes pour formuler les aliments. Elle varie fortement entre aliments selon leur composition physico-chimique. En particulier, une forte teneur en fibres tend à diminuer la digestibilité d’une matière première. La capacité à digérer dépend aussi pour partie de l’individu. La sélection sur l’efficacité digestive apparaît donc comme un levier pertinent pour améliorer l’efficacité alimentaire de la production porcine et sa durabilité.

Jusqu’à présent, l’efficacité digestive a été peu étudiée sous l’angle génétique parce qu’il n’existait pas de méthodes de mesure applicables à grande échelle. La digestibilité est évaluée par le biais du coefficient d’utilisation digestive (ou CUD), qui représente la proportion de l’énergie ou des nutriments absorbés par l’intestin. Son évaluation suppose de connaître les quantités d’aliments, et donc de nutriments, ingérées, et les quantités de nutriments excrétés par une collecte et une analyse chimique des fèces. Ces mesures contraignantes sont généralement effectuées sur un faible nombre de porcs isolés en loge individuelle. Les travaux scientifiques se sont donc limités à des comparaisons de races ou de lignées sur des effectifs limités. Ceux-ci font ressortir par exemple que les porcs piétrain absorbent plus efficacement les protéines que les porcs duroc ou large white, et que les races asiatiques digèrent plus efficacement les fibres que les races européennes.

De nouvelles technologies au service du phénotypage

Dans le projet Feed a Gene, financé par l’Union européenne, une nouvelle technologie d’analyse des fèces a été développée pour permettre une mesure en conditions d’élevage sur un grand nombre d’animaux. Cette méthode a été appliquée pour mesurer l’efficacité digestive de deux lots d’environ 800 animaux Large White nourris avec soit un aliment conventionnel, soit un aliment à teneur élevée en fibres. Les données collectées ont révélé que l’efficacité digestive est un caractère héritable : certaines familles digèrent mieux les aliments que les autres. Cette variabilité d’origine génétique est exacerbée avec l’aliment riche en fibres qui est plus difficile à digérer. Toutefois, la teneur en fibre d’un aliment conventionnel suffit à mettre en évidence les familles efficaces des familles les moins efficaces.

Un critère de sélection intéressant

Sur le plan génétique, les animaux digérant le plus efficacement les aliments en consomment également moins par jour et ont de meilleurs indices de consommation. Ils présentent toutefois des vitesses de croissance légèrement plus lentes. Les mécanismes à l’origine de ces différences d’aptitude à digérer les aliments ne sont pas connus et restent à élucider. Une digestion plus efficace peut en effet provenir de différences liées à l’anatomie de l’appareil digestif, à la vitesse du transit intestinal ou à la flore intestinale.

L’efficacité digestive est aussi héritable que la vitesse de croissance ou l’indice de consommation. Ce nouveau caractère pourrait donc être sélectionné dans les schémas de sélection pour poursuivre l’amélioration de l’efficacité alimentaire des populations en sélection en focalisant davantage les choix de reproducteurs sur cette aptitude à digérer les aliments. Bien que prometteuse, cette mesure nécessite encore des étapes de préparation des échantillons de fèces en laboratoire qui limitent une utilisation à très large échelle en élevage. Des travaux sont en cours pour faciliter la mesure sur le terrain, mais aussi mieux caractériser la variabilité de l’efficacité digestive d’autres races sélectionnées (Landrace, Piétrain). Tous ces travaux permettront de sélectionner in fine des animaux qui valorisent efficacement des aliments variés, notamment plus fibreux.

L’efficacité digestive est-elle un caractère intéressant pour améliorer l’efficacité alimentaire chez le porc ? JRP 2020, p. 13-18

Une mesure basée sur l’analyse des féces

La mesure de digestibilité repose sur l’analyse de fèces collectées directement lors de la défécation des animaux. Ces échantillons sont d’abord lyophilisés et broyés pour être ensuite analysés à l’aide d’un spectrophotomètre. Cet appareil est utilisé pour déterminer la composition chimique des fèces par exposition de la matière à une source de lumière infrarouge. Le spectre d’absorbance de la lumière infrarouge enregistré par le spectrophotomètre est utilisé pour prédire un coefficient de digestibilité de l’énergie, de l’azote et de la matière organique pour chaque animal. La prédiction s’appuie sur une base de données de référence, constituée au préalable par l’Inrae, contenant des fèces de porcs dont la composition a été déterminée à la fois par spectrophotométrie et par analyse chimique.

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