Trois stratégies d’éleveurs contre les coups de chaleur en élevage de porcs

Il existe un panel de solutions important pour mieux s’adapter au changement climatique.

Le niveau d’investissement est variable et selon les besoins, cela peut venir s’installer à la fois sur du bâtiment neuf ou du bâtiment à rénover. Dans le cadre du projet Fermadapt, cofinancé par la région Bretagne et l’Ademe, l’Ifip et la chambre d’agriculture de Bretagne ont réalisé un bilan sur la sensibilité au changement climatique de deux exploitations porcines bretonnes (régions de Lamballe dans les Côtes d’Armor et de Corps Nuds en Ille et Vilaine). L’objectif était d’identifier les forces et les faiblesses de l’exploitation aux vues de l’évolution du climat à venir puis d’identifier des leviers d’action susceptibles d’améliorer la gestion des coups de chaleur dans les prochaines années. Sur ces deux études de cas, trois principales stratégies d’adaptation ont été identifiées avec les éleveurs.

L’un des deux éleveurs a investi dans un système de cooling. Le principe est de faire passer l’air entrant du bâtiment à travers un maillage alvéolaire (plastique ou cartonné) dans lequel s’écoule de l’eau. L’air au contact du maillage se charge en humidité et sa température en sortie du cooling peut être réduite de 4 à 7 °C. Ce système est d’autant plus efficace que l’air entrant est chaud et sec. Dans le cas contraire, son efficacité est très limitée, voire contre-productive. En effet, en période de forte chaleur, il ne faut pas trop humidifier l’air (seuil maximum conseillé de 80 % d’humidité relative). Au-delà, le risque de neutraliser les mécanismes de thermorégulation des porcs peut conduire à leur mort. En 2017, l’éleveur a installé son cooling sur une chaîne de bâtiments existants. Afin de ne pas altérer les performances de ventilation et permettre un refroidissement important de l’air, il faut prévoir une surface de cooling au moins deux fois supérieure à la surface d’entrée d’air traditionnelle du bâtiment. Si la surface du pignon du bâtiment est réduite, il peut parfois être délicat d’installer la surface de maillage. L’éleveur disposait d’un bâtiment avec un couloir latéral. Il a donc choisi d’installer un cooling à chaque extrémité du bâtiment mais également dans son milieu. Ainsi, l’air froid se répartit convenablement sur toute la longueur du bâtiment et la surface d’entrée d’air est respectée.

Brumisation à haute pression

L’autre éleveur s’intéressait davantage aux dispositifs de brumisation. En 2003, il avait installé des rampes dans le couloir central de son bâtiment pour rafraîchir l’air avant qu’il ne rentre dans les combles des salles. Malheureusement, ce test n’avait pas été satisfaisant. Les buses d’aspersion utilisées ne pulvérisaient pas correctement l’eau qui ruisselait le long des murs de l’élevage. Pour qu’un système de brumisation soit efficace, il faut privilégier les dispositifs à haute pression. Ils pulvérisent l’eau en microgouttelettes qui se dispersent très rapidement dans l’air. Ainsi, il y a moins de risques d’avoir des dépôts d’humidité sur les surfaces. Pour faciliter cette dispersion des gouttelettes, il est préconisé de positionner les rampes de brumisation dans les veines d’air de la salle (au niveau d’un brasseur ou devant un volet motorisé). Si l’eau est pulvérisée avant d’entrer dans les combles, il faudra juste être vigilant si l’entrée d’air dans la salle se fait par un plafond diffuseur à ne pas avoir de dépôt d’humidité sur la laine de verre, ce qui pourrait poser un problème par la suite.

Les deux éleveurs rencontrés ont des densités animales inférieures aux standards de la production porcine en engraissement. L’un dispose d’un contrat en label rouge (soit 1 m² par porc). L’autre systématise la vente de laitons avant l’entrée en engraissement des bandes estivales afin de réduire les risques de coups de chaleur dans les salles.

La réduction des densités animales à plusieurs intérêts en période chaude :

L’un des deux éleveurs est très sensible à l’environnement thermique autour de ses bâtiments d’élevage. Il entretient notamment un couvert végétal toute l’année de 40 cm de haut sur plusieurs mètres de large devant les entrées d’air et autour des bâtiments pour tamponner la hausse des températures en période chaude. Ainsi, la chaleur liée au rayonnement solaire ne s’accumule pas (comme c’est le cas sur une aire bitumée). Elle est dissipée grâce à l’évaporation de l’eau qui consomme cette énergie. Entre un sol nu et un sol herbacé, la température de surface du sol peut être abaissée jusqu’à 10 - 12 °C (Bulletin Herbe & Fourrages – juin 2021 – Chambre d’agriculture du Lot). Cette baisse de température engendre également un refroidissement de l’air et de l’environnement local. La gestion de l’herbe demande un peu d’entretien : si le couvert végétal jaunit ou est coupé trop court, l’efficacité de l’évapotranspiration est réduite.

Dans le même ordre d’idée, l’éleveur envisage de peindre tous ses murs extérieurs en blanc afin de réduire la quantité de calories emmagasinées par la coque du bâtiment. Ces calories sont relarguées à l’intérieur durant la nuit.

Yvonnick Rousselière, yvonnick.rousseliere@ifip.asso.fr