Aller au contenu principal

Les marchés aux ovins à l’heure du cadran

Les 11 marchés aux bestiaux spécialisés en ovins ont vu le nombre d’opérateurs remonter suite à leur passage au cadran. Tour d’horizon des marchés d’ovins vifs.

Aux premières lueurs de l’aube, les camions et bétaillères s’activent autour de l’imposant bâtiment. Les éleveurs se succèdent pour livrer les lots d’agneaux ou de brebis de réforme qui seront vendus durant la matinée. Cette image d’Épinal pourrait correspondre à n’importe quel marché aux bestiaux parmi les 11 structures spécialisées en ovins en France. Répartis sur l’ensemble du territoire métropolitain, ces 11 marchés ont permis la vente de 229 000 ovins en 2019. En 2020, avec le fonctionnement au ralenti des marchés juste avant la période de Pâques, les ventes ont baissé de 7,6 %. En cumul, les marchés ovins ont enregistré 21 semaines de fermeture.

Le cadran, plus rassurant pour le vendeur

Pourtant la dynamique est là, boostée par l’arrivée du cadran. Tous les marchés ovins sont désormais passés aux enchères électroniques, à l’exception de celui du Monastier-sur-Gazeille, en Haute-Loire. « Ce fonctionnement est plus rassurant pour l’éleveur qui n’a plus la pression de la négociation avec l’acheteur », souligne Marion Donars, animatrice de la Fédération française des marchés de bétail vif (FMBV). Le système du cadran, ou de la criée, succède aux ventes de gré à gré, qui se passaient directement entre l’éleveur et l’acheteur, généralement un négociant, parfois un abatteur ou un boucher. « L’éleveur n’est même plus obligé de rester le temps de la vente, poursuit l’animatrice de la FMBV. Il peut fixer avec le chef des ventes le prix minimal en dessous duquel il refuse la transaction. » Le cadran permet donc une transaction sans conflit, par écran interposé. À Saugues, en Haute-Loire, les vendeurs peuvent suivre la progression des enchères depuis une salle commune qui dispose de deux écrans : sur l’un, la caméra qui couvre les lots d’animaux, sur l’autre l’évolution des offres faites par les acheteurs. Lorsque les enchères sont figées, l’éleveur est appelé par le contrôleur de la vente et donne son accord ou non pour conclure la transaction.

Le chef des ventes connaît les éleveurs et les besoins des acheteurs

Le marché au cadran est un circuit de commercialisation qui libère l’éleveur de toute obligation de vente régulière. « L’éleveur peut choisir de vendre des agneaux une semaine et celle d’après se tourner vers un autre canal de vente », pointe Marion Donars.

L’éleveur peut en outre choisir de vendre tout ou partie de sa production au marché au cadran. « L’avantage pour l’éleveur est l’assurance d’être payé rapidement, dans les 24 à 48 heures maximum après la vente, explique Clément Boubal, vice-président de la FMBV. C’est également intéressant de pouvoir aller jusqu’au bout de la commercialisation tout en pouvant s’appuyer sur l’expertise du chef des ventes. » En effet, celui-ci connaît d’une part les éleveurs et leurs troupeaux et d’autre part, les attentes et les besoins des acheteurs. Il pourra alors aiguiller les vendeurs sur le type d’agneaux recherchés, l’âge, le poids et la conformation. L’éleveur définit avec le chef des ventes la taille des lots mis sur le marché. Les prix sont fixés selon la cotation de la semaine précédente. « Les enchères se font anonymement, par palier d’un euro du kilo vif », détaille Clément Boubal, par ailleurs président du marché ovin de Sancoins, dans le Cher. Le marché, lui, rémunère son fonctionnement en prenant une commission sur chaque vente. Pour la plupart des marchés ovins, la fréquence des ventes est hebdomadaire, seuls deux d’entre eux ne font qu’une vente par quinzaine.

Les marchés participent aux démarches qualité de la viande ovine

« Les marchés ont un rôle à jouer dans les cotations de la viande ovine, ils sont le reflet direct de l’état de la filière », met en avant Clément Boubal. Les ventes au marché de vif permettent de faire une cartographie des tarifs d’un cheptel. Ainsi, un éleveur aura une idée du prix de ses brebis de réforme si elles sont maigres ou en état, de ses agneaux lourds, de ses agnelets… Certains marchés sont devenus des références sur un produit en particulier : Réquista (Aveyron) est spécialisé sur la brebis laitière et l’agnelet, Parthenay (Deux-Sèvres) est spécialisé dans l’agneau boucher tandis que Sancoins (Cher) fait référence pour les brebis de réforme. « Seuls les marchés permettent d’établir des cotations sur les brebis de réforme, cela ne se fait pas dans les abattoirs », appuie Clément Boubal. Pour le bio, il va falloir attendre encore un peu, car si des marchés ont sauté le pas à l’instar de celui de Réquista, l’offre est encore trop faible. « Les brebis bio sont aujourd’hui vendues quasiment au même prix que les conventionnelles », affirme Clément Boubal.

Avec le passage au cadran en 2019 du marché de Saugues en Haute-Loire, un gros travail s’achève pour la FMBV, satisfaite du tournant pris par les marchés ovins. D’autres projets sont en cours. Les marchés s’inscrivent notamment dans les démarches qualité mises en place par les abatteurs et les filières industrielles en régions. Enfin, la FMBV travaille à la création de règles nationales dans la gestion des litiges qui peuvent survenir après une vente. « Ce sont des écueils inévitables mais qui prennent beaucoup de temps à régler et avoir un protocole à suivre pourrait aider l’administration des marchés », conclut Marion Donars.

Claude Alvernhe, éleveur ovin et président de l’association des utilisateurs du marché ovin de Réquista (Aveyron)

« Le marché aux ovins de Réquista, champion des ventes »

« Nous avons sauvé le marché de Réquista en 2015, date de création de l’association. Le marché dépend de la municipalité et nous sommes arrivés aujourd’hui à être le premier marché ovin de France, c’est une vraie satisfaction pour nous et nos apporteurs. Avec 16 400 brebis, 10 100 agneaux et 16 600 agnelets, nous avons vendu quasiment 43 700 animaux en 2020, malgré trois lundis de fermeture et un fonctionnement au ralenti pendant trois autres semaines. Le passage à la criée en 2018 a vraiment dynamisé les ventes. Chaque mois, nous accueillons trois ou quatre nouveaux apporteurs et, rien qu’en 2019, nos apports ont augmenté de 20 %. Ces nouveaux venus sont souvent des jeunes et des femmes, qui pouvaient être auparavant rebutés par les ventes de gré à gré. Les habitués vendent aussi de plus en plus de leur production. L’un d’entre eux m’a assuré qu’il gagnait 15 à 20 euros de plus par agneau sur le marché que par son groupement. Les ventes d’agnelets ont beaucoup augmenté ces derniers temps, avec des valorisations rarement vues. Nous avions à cœur de faire du marché de Réquista un établissement exemplaire, nous avons modernisé son fonctionnement et améliorer les conditions de travail notamment au niveau du bien-être animal. »

Repère

La Fédération française des marchés de bétail vif (FMBV) représente 46 structures de vente de bovins et d’ovins, soit près de 95 % des établissements français. La fédération est membre fondateur d’Interbev, l’interprofession de la viande et du bétail et représente les marchés de bétail auprès des instances gouvernementales. La FMBV tient également une base de données opérateurs en répertoriant toute personne vendant ou achetant sur les marchés membres.

Les plus lus

<em class="placeholder">Eleveur conduisant ses brebis au pâturage.</em>
« Les Ovinpiades m'ont permis de faire ma place dans la filière ovine »
« J’ai un CV complet », c’est par ces mots que nous avons terminé l’entretien avec Benjamin Piot, meilleur jeune berger…
<em class="placeholder">Brebis au pré, en train de manger des feuilles d&#039;arbre au sol.</em>
Faire la feuille : une pratique adaptée aux ovins à besoins faibles et modérés
En complément d’un apport de foin, « la feuille » complète la ration des brebis peu exigeantes, à l’entretien, taries,…
<em class="placeholder">Marion Lassalle et Yannick Helip </em>
« Nous dégageons deux salaires avec notre système transhumant et nos brebis romanes"
Dans les Hautes-Pyrénées, Marion Lassalle et Yannick Helip conduisent une troupe de brebis allaitantes en optimisant la ressource…
<em class="placeholder">L&#039;éleveur se tient devant ses brebis en bergerie.</em>
« Nous distribuons trois kilos bruts de betteraves fourragères par brebis pour le lot au pâturage en hiver »
Dans les Côtes-d’Armor, Ida Prigent et Nicolas Le Provost pratiquent deux périodes de mises bas par an pour leurs brebis…
<em class="placeholder">Markus Klützke</em>
« J’ai créé un atelier de 1 000 moutons sur la ferme familiale »
Au septentrion de l’Allemagne, en Frise-du-Nord, le jeune Lasse âgé de 19 ans, s’installe sur l’exploitation familiale et crée…
<em class="placeholder">Sana avec son bâton. </em>
La drôle d’estive de Sana, fille de bergère
Sana, 10 ans, partage le travail en montagne de Chloé, sa maman bergère. Elle raconte son quotidien sur les flancs du Chalvet et…
Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 96€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir Pâtre
Consultez les revues Réussir Pâtre au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Réussir Pâtre