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PAC post-2027 : avec un budget en baisse de 20 % et de nombreuses simplifications, la réforme déçoit

La Commission européenne a présenté le 16 juillet la réforme de la PAC post-2027. Entre le budget en baisse de 20 % et la fusion des deux piliers, les annonces de Bruxelles sont très critiquées de toutes parts. 

Bâitment du siège de la Commission européenne à Bruxelles, avec des drapeaux européens.
Le 16 juillet, la Commission européenne a dévoilé son projet pour la future Politique agricole commune (PAC), lors de la présentation du cadre financier pluriannuel pour la période 2028-2034.
© European Union

[Modifié le 19/07/2025 avec la réaction de la ministre de l'Agriculture Annie Genevard]

Avec Agra Europe

Lors de la présentation du cadre financier pluriannuel (CFP) pour la période 2028-2034 le 16 juillet, la Commission européenne a dévoilé son projet pour la future Politique agricole commune (PAC). Comme le soulignent nos confrères d’Agra Europe, si le budget global du CFP proposé par Bruxelles est en hausse par rapport à la période 2021-2027, celui de la PAC 2028-2034 diminue de 20 %, passant de 387 à 300 milliards d’euros (Md€). Dans ce budget, 293,7 Md€ seront dédiés aux nouvelles aides au revenu pour les agriculteurs, et 6,3 Md€ serviront à la réserve agricole qui voit son financement doublé par rapport à la période actuelle. 

Les deux piliers de la PAC seront fusionnés 

Dans un communiqué du 17 juillet, la Commission européenne propose aussi une réforme du système d’aides. Les deux piliers de la PAC, à savoir les aides directes et le développement rural, seraient fusionnés dans un même ensemble de règles. Les aides directes seraient simplifiées, avec désormais une unique aide à l’hectare dégressive (-25% à partir de 20 000 euros jusqu’à un plafond de 100 000 euros, comme l’indique Agra Europe). Avec cette distribution « plus équitable », « le soutien sera ciblé sur ceux qui en ont le plus besoin » affirme Bruxelles. Aussi, les aides couplées pourraient être octroyées dans la limite de 20 % des enveloppes nationales des aides directes, en hausse par rapport aux 15 % actuels. Et le budget de la PAC serait ajusté sur l’inflation avec un déflateur de 2 % quand l'inflation est entre 1 et 3 %. 

Lire aussi : PAC post-2027 : quelles sont les cinq trajectoires possibles ? 

Le système de conditionnalité de la PAC entièrement revu

Dans ses mesures, la Commission propose de revoir entièrement le système de conditionnalité de la PAC. Les bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) pourraient être remplacées par des nouveaux dispositifs « que les États membres conçoivent en fonction de leurs besoins spécifiques, et conformément à nos orientations formulées sous forme de recommandations », a soutenu le commissaire européen à l’Agriculture Christophe Hansen. En commission de l’Agriculture le 16 juillet où il présentait les mesures, le Luxembourgeois a aussi assuré qu’il y aurait « des lignes directrices claires pour éviter 27 dispositifs trop différents ». Aussi, les écorégimes et les mesures agri-environnementales pourraient être fusionnés dans un dispositif unique co-financé par les Etats membres. Il rassemblerait les aides environnementales, climatiques et en faveur du bien-être animal, avec un objectif de passer « d’exigences prescriptives à davantage d’incitations ». Et un paiement pour encourager les transitions volontaires d’exploitations est serait créé, pouvant aller jusqu’à 200 000 €. Christophe Hansen s’est aussi réjoui que « 6% du budget de la Pac » devront être consacrés au renouvellement des générations, l’une de ses priorités. 

Lire aussi : Telepac 2025 : comment obtenir le bonus haie de 20 euros par hectare ?

Le commissaire européen à l’Agriculture se félicite des mesures annoncées sur la PAC

Au global, le commissaire européen à l’Agriculture s’est félicité que la PAC « reste une priorité du financement dans le prochain CFP ». « Il est très important d’avoir des fonds sanctuarisés, c’est ce qui va directement dans la poche des agriculteurs », soutient Christophe Hansen. Sur la baisse de 20 % du budget par rapport à la période actuelle, le commissaire répond que « ce montant sanctuarisé est un montant minimum, les Etats membres pourront investir davantage en fonction de leurs besoins ». Le Luxembourgeois affirme aussi que le second pilier ne disparait pas, car « ses outils et leurs financements sont toujours là ». « On a sauvegardé l’aide aux agriculteurs », affirme Christophe Hansen, alors que les Etats membres et les eurodéputés craignaient de voir le budget de la PAC dilué dans un fonds unique

Lire aussi : Pac post-2027 : les États membres de l’UE appellent à un budget distinct

Lire aussi : Budget de la PAC post-2027 : les eurodéputés se prononcent contre l’idée d’un fonds unique 

 

Lire aussi : Commissaire à l’Agriculture : Christophe Hansen choisi par Ursula von der Leyen

L’annonce de la Commission européenne critiquée de toutes parts

Mais l’engouement du Luxembourgeois n’a pas été très contagieux. Selon nos confrères d’Agra Europe, les eurodéputés de la commission de l’Agriculture ont offert un accueil glacial aux propositions du commissaire européen, à cause notamment de la question du budget. Toujours à Bruxelles, et pour des raisons similaires, les organisations agricoles européennes se sont aussi montrées très critiques : le Copa-Cogeca, principal syndicat agricole européen, estime dans un communiqué que c’est « un mercredi noir pour l’agriculture européenne ». Le syndicat fustige « des coupes budgétaires sans précédent, la dissolution des deux piliers, la perte du caractère commun, et le désengagement de la Commission vis-à-vis de sa politique agricole historique ». Le syndicat paysan européen Via Campesina regrette aussi dans un communiqué des propositions qui « menacent les revenus et l’existence de nombreux agriculteurs ». L’organisation juge « dangereuse et irresponsable » la suppression des budgets dédiés aux mesures agroenvironnementales et climatiques.  

Lire aussi : Budget PAC : Ursula von der Leyen annonce un fonds unique qui inquiète le Copa et la Cogeca

Les syndicats agricoles français vent debout contre la présentation de la PAC post-2027

En France aussi la déception est unanime. La FNSEA dénonce dans un communiqué la « provocation » de la Commission européenne, qui bouleverse « l’architecture environnementale mise en place en 2023 ». Selon le syndicat agricole majoritaire, la dégressivité des aides proposée « fragiliserait profondément le modèle agricole familial en France comme en Europe ». Les Jeunes agriculteurs (JA) jugent dans un communiqué qu’avec le budget proposé « la PAC devient une sous-politique, sous dotée financièrement ». Toutefois les JA saluent les annonces en faveur de l’installation et des jeunes agriculteurs, ainsi que les nouveaux outils d’accompagnement des exploitations dans l’adaptation aux enjeux climatiques. La Confédération paysanne regrette dans un communiqué la « renationalisation de la PAC », et « l’abandon de la régulation des marchés et de la transition agroécologique ». La réforme de la PAC et la baisse du budget risquent de « fragiliser fortement nombre de paysan.nes » et signent « la fin de la politique agricole commune » affirme le syndicat. La Coordination Rurale (CR) dénonce aussi dans un communiqué la baisse du budget, signe d’une « absence de cohérence ». Et fustige les « nouvelles conditions techniques et environnementales qui seront imposées aux exploitants ».  Dans un communiqué, la Coopération agricole défend la structure en deux piliers de la PAC, et demande que « toute évolution de la PAC soit assortie d’une étude d’impact rigoureuse » pour mesurer ses effets sur « la compétitivité des entreprises agricoles, la souveraineté alimentaire de l’Union européenne et la vitalité de ses territoires ruraux ». 

Un budget de la PAC post-2027 aussi dénoncé par la ministre de l'Agriculture 

Sur le réseau social X, la ministre de l'Agriculture Annie Genevard a aussi regretté le 18 juillet la proposition de la Commission européenne pour la PAC post-2027. Le budget proposé « ampute notre capacité à agir à l'heure du renouvellement des générations » et du « changement climatique » déplore la ministre. Et Annie Genevard de dénoncer « les risques pesant sur la politique commune la plus aboutie en Europe à un moment où il n’aura sans doute jamais été aussi impérieux de s’unir pour faire front face aux menaces ». La ministre de l'Agriculture affirme jeter « toutes [ses] forces » dans la négociation « qui s'ouvre pour de longs mois ». 

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