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PAC 2023 : respectez-vous bien les règles de la BCAE 8 sans dérogation Ukraine ?

En 2023, les obligations en matière d’infrastructures agroécologiques et de jachères ont été facilitées par la dérogation Ukraine. La très grande incertitude qui pèse sur sa reconduction oblige à une réflexion à l’échelle de l’exploitation pour être dans les clous de la conditionnalité, et notamment de la BCAE 8.

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En l'absence de certitude concernant la jachère Ukraine, il est conseillé de se conformer à la BCAE 8.
© N. Ouvrard

Sortez vos calculettes ! En 2024, les règles de la conditionnalité de la nouvelle PAC vont se révéler sous leur vrai jour si la dérogation Ukraine n’est pas reconduite. À commencer par celles qui concernent les infrastructures agroécologiques (IAE). Bon nombre d’agriculteurs les connaissent déjà : les IAE ont remplacé les SIE (surfaces d’intérêt écologique), qui au passage ont basculé du paiement vert vers la conditionnalité des aides PAC, encadrées par les bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE). En cas de non-respect de la réglementation, les conséquences peuvent être fâcheuses, avec une réfaction sur les montants d’aides appliquée selon un taux réglementaire généralement de 3 %, qui peut atteindre jusqu’à 9 % en cas de récidive.

Anticiper son assolement face à l’incertitude de la jachère Ukraine

C’est la BCAE 8 qui spécifie les règles à respecter en matière d’IAE. Les agriculteurs ont le choix entre deux options. La première est de consacrer au minimum 4 % des terres arables à des IAE (possibilité notamment de mettre des terres en jachère). La deuxième option est d’avoir un taux minimal de 3 % de terres arables dédiées à des IAE, ainsi que 4 % minimum des terres arables dédiées à des cultures dérobées et/ou des cultures fixatrices d’azote, sur lesquelles aucun produit phytosanitaire ne peut être utilisé.

La dérogation, qui a permis en 2023 de déclarer en jachère des surfaces cultivées et d’atteindre ainsi facilement les 4 % d’IAE, fait l’objet d’une demande de reconduction portée par plusieurs États membres auprès de la Commission européenne. Cette possibilité avait été accordée par Bruxelles dans une optique de sécurité alimentaire dans le contexte de guerre en Ukraine et de flambée du prix des matières premières. Les démarches entreprises en faveur d’une reconduction sont longues et leur aboutissement très incertain, ce qui ne coïncide pas avec les échéances liées au calendrier cultural. « La présence ou non de vraies jachères change tout dans les calculs des pourcentages pour être dans les clous de la BCAE 8 », déplore Damien Brunelle, président du syndicat France grandes cultures.

Date limite au 1er mars pour implanter une jachère

Alors que faire dans cette situation d’incertitude ? « On conseille aux agriculteurs de respecter la BCAE 8 telle qu’elle est écrite dans le règlement européen », précise Roch-Marie Stern, du service études économiques et PAC au sein de la FNSEA. Si vous avez effectué vos semis d’automne en pariant sur un renouvellement de la dérogation, c’est sur les cultures de printemps que tout va se jouer pour respecter les surfaces d’IAE. « En grandes cultures, la marge de manœuvre est étroite », souligne Éric Jeannin, conseiller environnement et PAC chez Cerfrance Saône-et-Loire. Dans bien des cas, il n’y a pas beaucoup d’autres options que d’installer de la jachère. « Les agriculteurs peuvent choisir les parcelles les plus éloignées du siège d’exploitation, difficiles à travailler ou les moins productives », suggère Marc-Antoine Volhuer, conseiller de gestion réglementaire chez Cerfrance Champagne Nord Est Île de France.

Pour être comptabilisée en IAE, la jachère classique doit impérativement être implantée avant le 1er mars (six mois de présence obligatoire, destruction possible à partir du 31 août). Une date précoce parfois difficile à tenir dans certains secteurs où les sols peinent à ressuyer. Pour une implantation plus tardive, il faudra opter pour de la jachère mellifère dont la présence est obligatoire du 15 avril au 15 octobre. « Il faut éviter de se retrouver dans une situation où l’on n’aura plus de solutions pour se retourner », insiste Alexis Carraz, responsable environnement chez Cerfrance Val de Loire.

Des équivalences de surfaces d’IAE à ne pas négliger

Il reste aussi possible de s’appuyer sur d’autres éléments reconnus comme IAE : haies, bosquets, bordures de champ… Toutes les IAE ne se valent pas au regard de la PAC (voir tableau). « Il ne faut pas sous-estimer certaines IAE, note le conseiller. Les bordures de forêt, dans les régions où cela est possible, sont par exemple intéressantes car elles permettent de sacrifier une surface bien moindre qu’une bordure classique. »

Les équivalences surfaciques des infrastructures agroécologiques (IAE)

 IAEÉquivalence en surface
Éléments non productifsHaie1 m linéaire = 20 m2 d'IAE
Alignement d'arbres1 m linéaire = 10 m2 d'IAE
Arbre isolé1 arbre = 30 m2 d'IAE
Bosquet (0 à 50 ares)1 m2 = 1,5 m2 d'IAE
Mare (10 à 50 ares)1 m2 = 1,5 m2 d'IAE
Fossé non maçonné1 m linéaire = 10 m2 d'IAE
Bordure non productive1 m linéaire = 9 m2 d'IAE
Bordure de champ1 m linéaire = 9 m2 d'IAE
Jachère1 m linéaire = 1,5 m2 d'IAE
Jachère mellifère1 m2 = 1,5 m2 d'IAE
Éléments productifsPlantes fixatrices d'azote (sans produits phytosanitaires)1 m2 = 1 m2 d'IAE (BCAE 8)
Cultures dérobées1 m2 = 0,3 m2 d'IAE (BCAE 8)

 

En effet, si une bande tampon classique en bordure de champ doit mesurer 5 mètres de large pour être comptabilisée en IAE (équivaut à 0,9 ha), cette largeur peut être ramenée à 1 mètre dans le cas d’une bordure de forêt. Les haies chiffrent aussi plus vite au compteur puisque 1 kilomètre linéaire de haie équivaut à 2 hectares d’IAE. « Force est de constater que ces dispositions ont accéléré la réflexion de certains exploitants pour implanter des haies le long de leurs parcelles », note le conseiller.

Hélène Challier et Virginie Charpenet 

Les IAE concernent aussi l’écorégime

Aide facultative et annuelle, l’écorégime se décline en deux niveaux (standard et supérieur) et permet d’obtenir une aide forfaitaire à l’hectare dont le montant exact reste aujourd’hui à préciser. Chaque exploitant agricole a le choix entre trois voies pour accéder à l’écorégime : pratiques agricoles (ex. : diversité d’assolement), certification (agriculture biologique, HVE) et IAE. En optant pour la voie des IAE, l’agriculteur est rémunéré s’il justifie de la présence d’éléments non productifs (haies, bosquets…) présents sur l’ensemble de l’exploitation, prairies permanentes comprises. Les mêmes coefficients que pour la BCAE 8 sont appliqués. Pour prétendre au niveau standard de l’écorégime, les IAE doivent représenter 7 % de la surface totale de l’exploitation, et 10 % pour le niveau supérieur de l’aide. Il est conseillé de prévoir une marge d’erreur sur le calcul de ces pourcentages, car ceux effectués par le système de suivi des surfaces en temps réel sont très précis et chaque are manquant peut être pénalisant.

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