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Méga-bassines : l’ONU demande à la France d’éclaircir certains points

Dans un courrier adressé au chef de l’Etat et au gouvernement français, six rapporteurs du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme s’interrogent sur la gestion des méga-bassines et demandent à l’exécutif de leur apporter des explications sur des points qu’ils jugent préoccupants.

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© Nicole Ouvrard

Dans une missive datée du 18 mai et rendue publique le 18 juillet dernier, comme il était prévu, les six rapporteurs spéciaux écrivent notamment : « L’opposition aux projets de méga-bassines en France s’appuie sur le déséquilibre annoncé entre leurs avantages potentiels, tels que l’augmentation de la disponibilité de l’eau ou la production d’hydroélectricité, et leurs conséquences négatives sur l’environnement, la biodiversité, la production alimentaire et les moyens de subsistance des communautés locales ». Et d’ajouter : « Les projets seraient en effet principalement soutenus par les acteurs de l’agriculture industrielle à grande échelle, à qui les méga-bassines permettraient de sécuriser leur accès à l’eau en période de sécheresse ».

« Les méga-bassines n’irrigueraient que 7 % de l’ensemble des surfaces agricoles en France »

Les auteurs du courrier s’interrogent sur l’avenir de l’agriculture française : « La grande majorité des agriculteurs, en revanche, ne bénéficieraient pas de l’eau stockée dans les méga-bassines, qui n’irrigueraient que 7 % de l’ensemble des surfaces agricoles en France. Le pompage excessif des nappes phréatiques à 50 ou 80 mètres de profondeur pour remplir les méga-bassines priverait celles et ceux qui disposent de leur propre forage, qu’il s’agisse de petits maraîchers ou d’éleveurs, des ressources en eau indispensables pour abreuver et nourrir leurs animaux, rendant leurs installations inopérantes ».

Inciter les pratiques agroécologiques

Les experts onusiens estiment : « Pour garantir le droit à l’alimentation, il conviendrait de plafonner les volumes d’eau attribués aux exploitations agricoles en fonction du nombre de travailleurs et leur production. De manière générale, nous soutenons que les financements liés à l’eau en agriculture doivent être massivement réorientés vers le soutien et le développement de pratiques permettant de retenir l’eau dans les sols (pratiques agroécologiques telles que les couverts végétaux, haies, prairies permanentes, semences paysannes, bandes enherbées…), la protection de l’eau (réduction des intrants chimiques de synthèse) et l’économie des ressources en eau ».

Des experts « préoccupés par la poursuite du développement des projets de méga-bassines »

Alors que plusieurs manifestations contre les méga-bassines ont été marquées par des faits de violence, les auteurs affirment : « Nous sommes profondément préoccupés par la poursuite du développement des projets de méga-bassines en France, les allégations de répression des manifestations et de criminalisation des organisations de défense des droits humains et de l’environnement, ainsi que des personnes agissant en leur capacité individuelle, qui semblent en violation du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, tous deux ratifiés par la France ».

Différents points à éclaircir

Parmi les points à éclaircir, les rapporteurs réclament notamment des informations sur « les mécanismes existants pour impliquer les agriculteurs français et les organisations qu’ils représentent dans le processus de concertation, médiation et prise de décision concernant les projets de méga-bassines et assurer que leurs intérêts et préoccupations sont pris en compte de manière adéquate pour garantir le droit la nourriture, à l’eau et à l’assainissement et à un environnement sain ».

La Confédération paysanne et le CETIM réclament un moratoire

La Confédération Paysanne et le CETIM (Centre d’étude, de recherche et d’information sur les mécanismes à l’origine du mal développement) ont salué la publication de ce courrier et ont réitéré dans un communiqué « leur appel au gouvernement français à s’engager pleinement dans la réouverture d’un dialogue inclusif et transparent sur l’usage de l’eau en agriculture et à cesser la criminalisation des mouvements sociaux. Pour se faire, un moratoire sur les projets de construction de méga-bassines est indispensable ».

« Permettre un dialogue constructif autour de la question de l’eau »

Par ailleurs, selon eux, « La venue des experts de l'ONU sur le sol français permettrait d'assurer le suivi de leur mission et notamment d'entendre les organisations paysannes, de défense des droits humains, les organisations environnementales, les collectivités territoriales et ainsi permettre le retour d'un dialogue constructif autour de la question de l'eau. Nous ne pourrions imaginer que le gouvernement français y fasse entrave ».

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