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Prospective
Le secteur agricole pourrait perdre 40 000 emplois d'ici à 2030

Le rapport "Les Métiers en 2030" de France Stratégie dresse un panorama chiffré des perspectives des métiers à l’horizon 2030. Pour ce qui concerne le secteur agricole, la tendance baissière se confirme.

secteur agricole
Depuis 2008, le secteur agricole a perdu 45 000 emplois et la tendance se poursuit.
© Michel Portier

L’emploi dans l’agriculture se réduirait entre 2019 et 2030, prolongeant la tendance de la décennie passée : depuis 2008, on compte 45 000 emplois en moins dans l’agriculture. Le secteur agricole, historiquement à forts gains de productivité ne représenterait plus que 2 % de l’emploi national en 2030 – contre 3 % en 2019 et 4 % en 2000, selon une prospective de France Stratégie à travers le rapport Les Métiers en 2030. La part du secteur dans la valeur ajoutée totale resterait toutefois équivalente, à 1,5 %. En l’absence d’inflexion majeure dans la répartition des aides agricoles, le secteur devrait perdre 40 000 emplois entre 2019 et 2030, poursuivant la tendance à la concentration des exploitations et à la diminution de l’élevage plus intensif en main d’œuvre au profit des grandes cultures mécanisées.

Afin d’assurer la cohérence d’ensemble des projections d’emploi par métier, à travers sa publication Les Métiers en 2030 France Stratégie s’appuie sur un scénario macroéconomique de référence issu d’une modélisation sectorielle de l’économie. Plusieurs scénarios alternatifs sont également considérés à titre de variantes. Le scénario « bas carbone » permet de respecter jusqu’en 2030 les objectifs de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), notamment via une accélération substantielle de l’investissement. Le scénario « Covid+ » suppose un impact plus fort de la crise sanitaire sur la distanciation sociale à l’horizon 2030.

Percée de la robotique

Selon le rapport, la robotique, considérée comme un « investissement d’avenir », continuerait sa percée

Les gains de productivité se poursuivraient, poussés par l’innovation et la pression concurrentielle qui s’accroît en dépit du caractère encore relativement protégé et localisé de la production agricole en France et en Europe (notamment du fait de la politique agricole commune et de l’attention portée aux circuits courts dans les territoires). La robotique, considérée comme un « investissement d’avenir », continuerait sa percée dans l’agriculture, améliorant la performance et limitant les pénuries de main d’œuvre. La valeur ajoutée se maintiendrait, avec des produits plus chers, de meilleure qualité et plus « individualisés ».

Un scénario bas carbone limitant la baisse de l'emploi

La demande alimentaire devrait de fait croître en qualité et en quantité : la demande intérieure serait portée par la consommation domestique – accrue par le télétravail – d’une population en croissance et la demande mondiale par la hausse du revenu des émergents et par le rapprochement des modes de consommation. En revanche le scénario "bas carbone" limiterait la baisse de l’emploi dans l’agriculture à 20 000 postes dans la décennie à venir. L’agroécologie et la croissance de la production biologique ont en effet un contenu en emploi plus élevé qui se manifesterait essentiellement dans le maraîchage, soutenu par un accroissement de la consommation de fruits et légumes. L’exploitation forestière serait également favorisée par une demande accrue de matériaux biosourcés dans la construction. Enfin, la reconnaissance du rôle de la forêt et de la biomasse dans la lutte contre le changement climatique permettrait de protéger les productions locales par des réglementations européennes sur le commerce (interdictions de la « déforestation importée » – huile de palme dans les biocarburants ou bétail nourri au soja ; taxe carbone aux frontières) ou par des aides publiques.

Maraîchage et viticulture plus porteurs

Comme dans l’industrie, les professionnels de l’agriculture n’occupent pas tous des emplois dans le secteur agricole. Les agriculteurs, éleveurs et sylviculteurs qui exercent quasi exclusivement dans l’agriculture continueraient certes de perdre des emplois dans la décennie à venir (23 000 emplois en moins, soit un repli de 5 %), mais il n’en va pas de même des autres métiers. Les maraîchers, jardiniers et viticulteurs occupent ainsi également des fonctions d’aménagement paysager dans les secteur des activités administratives et de soutien et dans les services généraux de l’administration. Ces deux secteurs seraient soit créateurs d’emplois pour le premier, soit moins destructeurs d’emplois que l’agriculture pour le second.

Au total, l’emploi dans ces professions se stabiliserait entre 2019 et 2030. Quant aux cadres et techniciens de l’agriculture, ils sont majoritairement employés dans d’autres secteurs que l’agriculture, essentiellement dans les services aux entreprises et le commerce qui créeraient de l’emploi en projection : ils gagneraient donc 7 000 emplois entre 2019 et 2030 (soit une progression de 11 %).

Le scénario bas carbone favoriserait surtout les agriculteurs et les sylviculteurs

La persistance de craintes sanitaires avantagerait l’ensemble des professions agricoles dans le scénario Covid+ : 10 000 emplois supplémentaires créés par rapport au scénario de référence, notamment parce que les inquiétudes sur la traçabilité des produits vont en se renforçant. L’atteinte des objectifs climatiques dans le scénario bas carbone favoriserait surtout les agriculteurs et les sylviculteurs. Le développement de modes de production agroécologiques et biologiques, plus intensifs en main d’œuvre, et l’entretien de la forêt et de la biomasse permettraient de préserver dans ces professions 15 000 emplois supplémentaires par rapport au scénario de référence.

Toujours des difficultés de transmission

Alors que pour l’ensemble de l’économie, le taux de départs moyen sera de 28 %, autrement dit, d’ici 2030, plus d’un quart de l’emploi de 2019 aura été renouvelé du fait des seniors qui quitteront leur emploi , le taux de départ chez les agriculteurs dépasserait les 35 %. Chez les agriculteurs dont l’emploi décroît ou est stable en projection, les remplacements de postes de seniors en fin de carrière devraient être très importants sans qu’il y ait beaucoup de jeunes débutant en emploi pour les pourvoir. Les agriculteurs devraient toujours faire face à des difficultés de transmission de leur exploitation.

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